Affichage des articles dont le libellé est vin blanc. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est vin blanc. Afficher tous les articles

dimanche 12 avril 2020

PÂQUES, DIMANCHE 24 MARS 1940 / Fleury-d'Aude en Languedoc

"... (Ste Catherine de Suède, pas celle des « catherinettes », qui se fête le 25 novembre : c’est lors d’une telle fête, dans un bal à Paris, que j’ai pu voir Louis Aragon qui présidait le jury chargé de juger la beauté des fameux chapeaux). Monsieur Sanchon arrive à trois heures du matin. Je le vois après la messe au café, avec papa, dégustant le fameux « Noilly ». Lorsque papa, encore élève de l’école primaire de Fleury, habitait à Mire-l’Etang, les camions de la maison Noilly-Prat venaient acheter le vin blanc du lieu pour en faire la célèbre boisson. En parlant de cette « campagne », comme nous désignons ici les divers domaines vinicoles autonomes, mon père disait toujours « Cabibel », du nom de l’un des propriétaires du dix-neuvième siècle. Cette coutume était générale. M. Angles avait ainsi laissé son nom à « Rivière-le-Bas » et « Gaïsart » (orthographié vraisemblablement Gaysard, prononcé à la Bayrou) n’était autre que « Rivière-le-Haut » cher à Ségura – c’est aussi déjà du passé –. Pour les autres domaines, le vrai nom fut toujours chose courante.
L’après-midi (ici nous disions « le soir »), je vais au cinéma avec François Pédrola, dit Franou, qui changera son prénom en « Francis » pour le distinguer de son père, et attendra pour cela sa vingtième année ! Fernand Milhau, de Salles, reçu lui aussi à l’Ecole Normale d’Instituteurs de Carcassonne comme Pédrola, est avec nous. Le film ? « Griseries », avec la fameuse cantatrice Lily PONS, film noir et blanc américain de 1935 où joue encore Henry Fonda, comédie dramatique : une chanteuse française épouse un compositeur américain. Sans doute ne laissera-t-il pas une grande trace dans les annales du septième art..." 
Il a grandi ce pitchou depuis sa communion...
 
Lettre du 4 avril 1997 : 
" Jour de Pâques.
Le matin à onze heures, j'étais allé à la messe ­ je n'y vais plus très souvent, sauf pour quelques enterrements ­ : l'église était pleine de monde, avec beaucoup de figures inconnues. C'était le jour aussi de la communion solennelle pour six jeunes tout de blanc vêtus. Où est le temps où l'on mettait pour la première fois les pantalons longs et le beau costume sombre, pour l'achat duquel la « Maison Labau » de Narbonne, ou bien les « Vêtements René » ou « Conchon-Quinette » offraient la première montre au communiant ? La mienne était bizarre avec son boîtier nickelé et pas d'aiguilles. Une petite fenêtre en léger arc de cercle laissait apparaître le nombre des minutes, et, au-dessus, une autre ouverture, carrée celle-là, indiquait les heures. C'était une « sauteuse », et elle n'a duré bien entendu que quelque temps..."

CABOUJOLETTE, Pages de vie à Fleury 2, chapitre "Le Renouveau", 2008, François Dedieu.  

10 heures, ce dimanche 12 avril de l'an de disgrâce 2020, jour de Pâques, notre clocher carillonne... Pâques sous cloche... consolation.  


Le fleuve Aude qui va vers la mer passe la pointe de la Montagne de la Clape, lieu-dit sur la carte "Les Caudiès" sources d'eaux peut-être pas chaudes mais ne gelant pas les jours de température nulle ou négative... dans les limites nord du département calquées sur l'ancien lit du fleuve canalisé depuis, le grand Etang de Vendres, aussi connu pour ses oiseaux que pour les restes de la présence romaine. Après la Pagèze sur la départementale des Cabanes, à droite la route dite "des campagnes" aligne des domaines vinicoles sur des terres privilégiées, éboulis de la Clape, alluvions fertiles laissées par le fleuve gagnant au fil des siècles sur la mer : du Nord au Sud, Mire-l'Etang, Rivière-le-Bas.

L'Aude coule vers son embouchure (en réalité la branche restante du delta). Entre la Clape qui fut île et le littoral sableux, le hameau à l'origine de pêcheurs des Cabanes-de-Fleury, des marais lagunaires ou encore salés, des zones humides où l'eau douce du fleuve accède. Et toujours sur la bordure de la Clape s'égrènent trois autres campagnes: Rivière-le-Haut, La Négly, Moyau.
Troisième vue vers le Sud. La longue plage littorale, l’Étang de Pissevaches qui se remplit avec les coups de mer et se vide avec les coups de Cers (mais en période de submersion il est arrivé que le grau soit mécaniquement creusé pour évacuer des zones inondées). Entre les deux le canal anti-char que les Allemands firent creuser en échange de payes bienvenues... La mer bute ensuite sur le massif de la Clape avec la station balnéaire de Saint-Pierre-la-Mer. En bordure de la garrigue, les deux dernières "campagnes" de ce piémont privilégié et si favorable à la vigne, Boède et l'Oustalet.    
Merci Geoportail pour les ressources plus qu'appréciables mises à disposition du public.

vendredi 11 octobre 2019

CLAIRETTE, PICPOUL, CLAIRETTE / Les vendanges 1939 à Fleury.

"... Mercredi 11 octobre (Ste Clémence). Reste le vin blanc, gardé pour la fin, comme chaque année, car il faut le pressurer tout de suite. La vigne du Baous lui est réservée. On l’atteint en prenant la route de Marmorières et en prenant ensuite à droite pour suivre, prétend-on, l’ancien chemin de Narbonne que devait prendre mon arrière-grand-mère, mamé Babelle, maman de mamé Joséphine, tante Pauline et tante Marie, épouse de Gérard Rossignol, lorsque cette dernière était souffrante à Narbonne. Et dire qu’elle y allait à pied !
Pour d’autres, le Baous, c’est la « Carrieiro Blanco », peut-être parce que le calcaire y est partout présent mais sous forme de lauzes.
Alors que les raisins noirs sont depuis longtemps dans une cuve ou un foudre, nous nous intéressons aux quelques rangées de cépages blancs qui restent : la clairette, le picpoul aux petits grains chétifs, le malvoisie venu nous apporter ses grappes divines depuis la lointaine Grèce. Ce mélange nous donne un vin blanc qui fait l’admiration des connaisseurs. et qui n’a pour rival que le muscat de derrière la maison, un muscat comme jamais je n’en dégusterai un d’aussi bon. Il faut dire que ses grappes sont cueillies très mûres, alors que les guêpes ont déjà profité de nombreux grains. Le nombre de litres sera particulièrement limité quand mon père  aura soigneusement calculé la quantité d’alcool à 90°, à ajouter pour muter l’ensemble et pour qu’aucun goût alcoolisé ne ressorte à la dégustation, ce qui est rarement le cas quand on vous sert de la carthagène…"
Caboujolette /  2008 / François Dedieu

Clairette, picpoul, muscat... des cépages déjà mentionnés par Claude-Joseph Trouvé pour les années 1803 - 1820. Concernant le muscat, les villages d'Ouveillan, Pouzols et Sainte-Valière sont les plus réputés. 

Concernant la fabrication des comportes à Rivel, si  Jean Girou, auteur de L’Itinéraire en terre d’Aude (1936), note, à propos de l'activité  « … Région industrielle qui va de Rivel à Mazamet… » il n'a pas un mot, par contre, pour le village des comportes.
Quelques échos complémentaires chez Charles, Paul, Auguste Ditandy (1826 - 1902), inspecteur d'académie à Carcassonne de 1872 à 1878.

"... Il est peu de familles de cette commune dont quelque membre n'ait exercé jadis, la profession de sémalier. Citons l'illustre Fillol lui-même et à ses côtés les Saliniés ou Courals, les Bergès,les Jean de la Jeanne, les Olive dits Pétrins, etc, tous hommes de forte trempe, de haute stature, d'une force et d'une souplesse peu communes,qualités essentielles pour faire, comme on dit, un rude sémalier, enlevant journellement ses huit comportes ordinaires.
Le sémalier, debout au chant du coq, débute par l'assemblage des douves ; il fonce ses cuves après son déjeuner et procède sur le soir à leur toilette par le polissage. Quelques grands coups de massue, frappés en cadence, achèvent le cerclage : cette ceinture en lattes de châtaignier, rehausse la blancheur de la sémal. Dès lors, elle est complète : elle ira briller dans cet état sur la place de Quarantan, aux foires d'Azillz, d'Alzonnz, de Caunes, de Lézignan, de Peyriac et de St-Maurice-de-Mirepoix. 

Rivel Les contreforts du Pays de Sault Wikimedia Commons Auteur Lucas Destrem

C'est au plus fort de l'hiver, dans les quartiers les plus reculés de la forêt, que les sémaliers exécutent leurs grands travaux. ils s'abritent la nuit dans une cabane faite en écorce de sapin, recouverte de branches sèches et de mousse. Après leur frugal repas, où les pommes de terre ont toujours les honneurs de la table, ils s'étendent tout bonnement sur de la paille ; à leurs pieds brille un immense brasier qui les réchauffe jusqu'à l'heure de leur réveil.

Jadis, auprès des Rivelois, fiers de la renommée de leur industrie, nul n'était réputé bon sémalier, connaissant à fond son métier, s'il n'avait hiverné plusieurs années consécutives au milieu des sapins, occupé à façonner un nombre déterminé de "charges de douves ou douelles, destinées à la fabrication des comportes.

[...] Moins empressés à l'office du soir, ils se réunissaient par bandes à l'hôtellerie du Cheval-Blanc, à celle du Lion-d'Or, où quelque bon quartier de mouton mitonnait pour eux dans une ample ration de haricots parfumés à l'ail et au jambon..."

Passons sur le lyrisme parfois trop poussé et revenons sur ce qui est digne d'intérêt. Dans ses "Lectures variées sur le département de l'Aude", Ditandy n'a pas fait que lire sur Rivel et les Rivelois. Ceux qui connaissent les lieux pourront vérifier s'il dit juste quand il nomme huit sources ou fontaines pour nous apprendre que le dimanche, les sémaliers ne buvaient pas d'eau !
"Les verres se heurtaient sur la nappe rougie [...] Adieu, ce jour-là, le pain aigre de maïs, qui, sous le nom de tougno, a fait de tout temps la principale nourriture des ménages peu fortunés ! Avec quelles délices ils mordaient dans le pain blanc du boulanger !.." 

Note : à propos de Rivel, je voulais voir le site belcaire over-blog.com que tenait Jean-Pierre. J'apprends, même si des posts trop vagues le laissaient deviner, qu'il est décédé...  "parti si vite" à cause d'une maladie rare à laquelle on venait à peine de donner un nom. C'était un passionné et si vous aimez l'Aude et l'Ariège, avec lui vous serez servis, c'est un blog d'une richesse foisonnante même si les sémaliers de Rivel n'y figuraient pas encore.   

samedi 1 juillet 2017

LES MUSCLES... QUE C'EST BON AVEC LE VIN BLANC ! / apéritif Méditerranée

" Viens, on ira aux tenilles (1) ! "

Tu as porté un vin blanc. Personne sur la plage, seulement le tracteur qui ratisse méthodiquement. Tu me dis qu'on est les premiers à fouler la virginité retrouvée du sable ! Belle jambe de bois que cela nous fait car à neuf heures donc sept au soleil, pas question de quitter le pull ! Et en prime ce vent du diable ! Et la mer qui s'est bien refroidie ! Les canicules de juin semblent loin... On se mouille jusqu'aux cuisses manière de teniller un mètre ici, un mètre plus loin, mais ces satanées vagues qui appellent le marin nous mouillent jusqu'aux parties sensibles de nos anatomies ! Et puis rien sinon des graviers, des coquilles mortes !

" Viens va, allons acheter des moules !" que tu me fais ! 
Pas besoin de le dire deux fois ! 

Moules crues, moules cuites... c'est que c'est bon les muscles (2) avec le vin blanc ! 
Un vin blanc à retenir... Quelque chose ce vin pourtant bio mais au goût de vin ! Fort mais par ce temps frais, même s'il monte bien à la tête ! 

" Bourreau tu montreras ma tête au peuple, elle en vaut la peine ! " aurait dit Danton sur l'échafaud ! 
  


    
Peuple, je te montre son cadavre, il en vaut la peine ! Il nous a même fait chanter "Fanchon quoique bonne chrétienne fut baptisée avec du vin..." Et cette bouteille, bien pleine, bien faite, au cul bien marqué, la rendant plus belle encore, même vide ! 
    


Alain, nous retournerons aux tenilles parce que les muscles, c'est bon avec le vin blanc ! 

(1) "telline" rapport aux estrangers (ou "haricot de mer"). 
(2) les moules en occitan ; "Li bèu muscle !" crie la muscleièro, la marchande de moules de Marseille.