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mercredi 8 janvier 2020

LOTO D'ANTAN, LE VRAI (4) ! / Fleury est mort ! Vive Fleury !

– … "Soixante-neuf", le tête à queue (disait-il ça à une époque toute en non-dits et encore prude?)… "vingté-un"… "quatre-vingt-huit", les deux carbasses… "quatre-vingt-dix", lou papéto !
– Là ! le "quatre-vingt-dix" arrête ! Mais un deuxième cri, comme en écho a aussi arrêté, dans une autre salle. Des joueurs résignés ont déjà démarqué mais en la circonstance les cartons sont bien bons. Les gagnants devront partager le lot par tirage au sort

Loto pixabay photo gratuite

Même sans l'ordinateur, les innombrables possibilités mathématiques font qu'il ne doit y avoir qu'un seul gagnant mais à condition que tous les cartons soient en jeu... Et nous combien sommes-nous ? Un beau loto se déroule dans les deux cafés : Billès et Mestre (Tailhan jusqu'en 1960). Et l'apogée avec en plus la salle des fêtes, grâce à le fée électricité et son servant Marcel ! Alors combien de personnes ? Combien de cartons ? 1000 ? 1500 ?
Et qu'est-ce qu'on n'entend pas chez les autres si le même établissement compte plusieurs gagnants de suite où si le sentiment qu'on a plus gagné ailleurs domine ! 

  
loto pixabay photo gratuite auteur Angelawilde
S'ensuit, dans une atmosphère de plus en plus enfumée, un joyeux brouhaha de cartons qu'on débarrasse ou dont on se débarrasse parce qu'ils « porteraient la masque » (la poisse).
Le loto du Fleury-Olympique se poursuit avec les heureux, les « claoufits », félicités par les déconfits. A l'heure de se quitter, lors de la consolante dotée d'une bombe glacée, tout le monde aura passé une bonne soirée, avec jusqu'au bout l'espoir « dé gagna quicon », de gagner quelque chose. Les plus friands seront au fait des dernières nouvelles, du plus frais potin. Certains auront reconnu un visage depuis longtemps parti pour ailleurs, souvent pour Paris mais revenu pour un congé.
Finalement, le nommeur, la voix, le récitant, l'annonceur, l'appariteur irremplaçable fait la réclame pour le samedi à venir. Les gens rendossent le manteau et sortent ; sur les tables dérangées, un couple économe récupère le maïs pour les poules. Dehors, la troupe se disperse, les gagnants soulèvent volontiers leur lot avec un plaisir non dissimulé :
«   Diaétou ! i polit aquèl cambajou ! Peso quicon ! (bon Dieu, il est beau ce jambon ! Il pèse quelque chose !) »
Il fait froid vers minuit et miège. Chacun se hâte vers sa maison d'autant plus pressé qu'il rapporte quelque chose. « Quaucun » veille peut-être encore près du feu sommeillant et puis il fait encore bon avec les braises qui couvent sous les cendres et qui reprendront dans quelques heures avec la dinde des fêtes à la broche, illuminée des flamèches de lard tombant goutte à goutte du flambadou ! 

Saint-André-de-Sangonis La tour de l'horloge - Archives départementales Hérault Autor Froment photographe

Dans Caboujolette, mon père précise. Il a même retenu ce qui se disait à Saint-André-de-Sangonis où il fut précepteur au château du jeune comte Maxence Worms de Romilly, alors âgé de quatorze-quinze ans (j'ai joint quelques expressions de Sigean, d'Olonzac) : 

"... Je te mets quelques tournures accompagnant les numéros tirés au loto des cafés, soit en occitan, soit en français :
1. lou prumièr de milo (le premier de mille),
2. « dous » coumo de mèl (doux comme du miel) ;
3. la cargo y és (du temps où 3 enfants, sans allocations familiales, représentaient une lourde charge pour le ménage. A Sigean " la guerro i ès ". A Olonzac " bal pas rès ") ;
4. le bigorneau (allusion à la petite enclume à 2 « cornes » des orfèvres) SADS (= St-André-de-Sangonis). A Sigean "vaï t'en té battré ". A Olonzac " se cal battré "
5. Toute la main ; à Sigean "as tapins", à Olonzac "l'Alzino". 
6. la queue en l’air, « le vigoureux » SADS (Saint-André-de-Sangonis) ; à Olonzac "d'aïci ?"
7. la pigasso (la hache) ; à Sigean "la pigasso sus eun sause", à Olonzac "sus un sauzé" sous-entendant "la pigasso". 
8. la carbasso (allusion à la calebasse, qui a bien cette forme vue de profil) ; à Sigean "la carbasseto", à Olonzac "la gourdo" (qu'es pas déma). 
9. la queue en bas, « le Honteux » (avec H bien « aspiré » !) SADS ; à Sigean "loubiou var", "cueuro l'iou", à Olonzac "tout noù". 
10. dis..putez-vous, à Lespignan « De qué dis ? », à Olonzac "la crouts". 
11. zonzon (est-ce une femme molle et insouciante ou une sorte d’onomatopée ?), à Olonzac "las cambos de Calhol". 
13. ma sœur (Thérèse) ; quel âge a-t-elle ? (Le tirage suivant donne la prétendue réponse). Une remarque sur le n° suivant : « Es jovenoto ! » « Macani, qu’es vielho ! » selon le cas.
14. Je crois qu’à SADS ils disaient « la clique de Gignac », mais c’est très local. A Sigean "l'homme fort", à Olonzac "l'omé fort". 
15 ?
16 (toujours bien répété pour ne pas confondre avec 13) ;
17. dozosèt (dix-sept. Un dans le public, qui a sans doute le 18 ou le 19 : « Dozo totjorn !! » (dix… encore !!). A Olonzac "lou boun legun (la gato cagabo y ténios lo lum et sentissios lou parfum)". 
20. Sans eau ! A Sigean "sans aïgo". 
22. les flics ; à Sigean "las dos poulétos", à Olonzac "lous auquetos". 
23.- 24 – 25 – 26 – 27 – 28 ;
29. A Sigean "San Miquel"
30. le Gard (entendu à Fleury) ; à Sigean "(trempo) la soupo".
31. Toulouse (id.) 
33. A Sigean "la musiquo de Sigea", à Olonzac "lous dous boussuts".  
34. nos voisins (id.)…
36. A Olonzac "las très doutsènos". 
44. A Olonzac "las dos quadièiros". 
50. A Sigean "lou quintal". 
55. A Olonzac "las dos Alzénos", "bitor de fil", "ame soun païré"
66. Perpignan (id.), à Olonzac "las dos coquilhos". – 67 – 68 ;
69 tête-bêche? A Sigean "cap et tioul", à Olonzac "coussi qué lou biré". 
70. A Olonzac, "se tampo"
71. A Olonzac "l'annado de la guerro".  – 72 – 73 – 74 ;
75. Boum-boum – 76 ;
77. las dos pigassos – 78 – 79 ; 
80. A Sigean "(quatre bious) qué pourtaboun un mort, amaï y escapet", à Olonzac "quatre biùsporteroun un mort et maï lou toumberoun". 
83. A Olonzac "quatre ventrés, n'eï prou d'un". 
88. las dos carbassos (les deux citrouilles) ; à Sigean "las dos carbassetos", à Olonzac "las dos gourdos". 
89. la maméto ; à Olonzac "la revouluciù". 
90. lou  papéto. A Sigean "lou biel papet", à Olonzac "lou bielh papa".  

" Tu vois : je n’avais pas grand-chose à ce sujet. " 
— Mais si papa, d'autant plus que je viens de trouver (déc 2022) sur la revue Folklore, un article de 1939 " ... voici les rimatoires du jeu de loto, à Sigean et à Olonzac, d'après nos délégués, MM Vals et Laurent Mathieu... / ...M. Vals fait suivre sa communication sur Sigean de la remarque suivante : « ­Ces expressions patoises ne sont, presque toutes, que la traduction d'expressions autrefois employées dans la marine où le loto était fort en honneur » 
En remarque de fond, dans le cadre d'une telle communication, l'utilisation de la graphie normalisée serait des plus utile et efficace puisque, en transcrivant, il est difficile de ne pas écrire dans sa version locale, ce qui oblige, par respect de nos locuteurs, à une grande concentration sur pratiquement du mot à mot.    

Il n'empêche, c'est loin d'être du "pas grand-chose" avec même un petit détail sur Lespignan ... Les variantes devaient être aussi diverses et nombreuses que les localités où s'organisaient les lotos... Et pas besoin d'aller plus loin que le village à côté...




 


samedi 21 janvier 2017

OCCITANICA & la revue FOLKLORE, première revue ethnographique de France.

OCCITANICA, médiathèque numérique occitane, nous parle de la revue FOLKLORE (de 1938 à 1988) portée par le « Groupe audois d’études folkloriques » (GAEF) puis le « Groupe audois de recherche et d'animation ethnographique » (GARAE)... D'où mon commentaire... 

 photo : auteur garae.fr

Non seulement un fonds unique mais aussi ouvert à tous par les voies de l'internet. A 9000 kilomètres, c'est simplement formidable de se plonger dans le passé, de s'enrichir... à peu de frais.
Si quelques rats de bibliothèque voulant monnayer leurs recherches grâce aux livres qu'ils sortent, sont contre la mise en ligne d'un patrimoine culturel, la quasi totalité des gens de culture ou ponctuellement curieux et en tous cas pas assez déterminés pour courir les archives, ne peuvent que s'en féliciter. 
Je lis dans cette présentation à propos de la revue Folklore « Doyenne des revues d’ethnographie publiées en France »... Dans une France exceptionnellement diverse, le département de l'Aude présente, à son échelle, une pluralité remarquable de climats, de pays, d'habitants et une histoire permettant de se projeter dans l'avenir. Et j'espère bien que tous ceux qui tiennent à leurs racines pensent de même, à commencer par mes frères de l'Hérault, du Roussillon, de l'Ariège, du Tarn et de Toulouse, pour ne rester que dans notre secteur !
Face au nombrilisme jacobin de Paris, phagocytant la province (1) et tendant à imposer de facto une vision francilienne de la langue, de la culture, de l’État, il est culturellement et historiquement vital de sauvegarder et d'entretenir notre identité audoise, sudiste, occitane... Comment celui qui ne commence pas en assumant qui il est et en s'occupant d'abord des siens peut-il en conscience œuvrer pour les autres en premier ? Ne culpabilisons surtout pas quand des reproches boboïsants et moralisateurs nous sont adressés ! Si les civilisations meurent, si des hommes, malheureusement, meurent, c'est en défendant sa vie et sa culture qu'on défend celles du voisin, puis celles plus loin, puis celles de l'Européen pour en arriver à considérer la planète en tant que village mondial. Quand je pense que la langue d'Oc, dénigrée, délaissée à force de lavements républicains (un patois à éradiquer !) n'a longtemps été étudiée que par des étrangers, en Allemagne notamment ! 
Mais je m'égare, macarel ! Je voulais seulement aller voir quelles étaient les grandes peurs, dans les campagnes, par le passé... et parce que le temps est au froid, les mythes liés par exemple à la chasse de la lèbro la nuit, quand la neige couvre le paysage...  (lièvre est féminin en occitan, Daniel Auteuil le dit bien dans Jean de Florette).

Al cop qué ven ! 

 le lièvre, animal mythique universel, ici en Tchécoslovaquie, par Joseph Lada (1948)

(1) Vous l'avez vue, la Marie-Sophie "à carreau" du journal télévisé, trahissant Perpignan, parce que perdre son accent et faire la parisienne c'est se convertir au jacobinisme carriériste des jolis minois... 

à explorer : http://www.garae.fr/new/spip.php?rubrique78