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samedi 21 avril 2018

LA COMBE DE MONSIEUR SEGUIN (fin) / Fleury-d’Aude en Languedoc.


Cerisier dans la garrigue.
Ici, tournées au soleil, des laisses étroites sur une pente raide. En bas, sur la plus belle pièce, celle du cerisier voisin d’un abricotier aussi peu vigoureux, 3000 m2 environ, et en face, sur des terrasses plus larges, des vignes. Plusieurs familles ont cultivé ici, l’émiettement cadastral actuel en atteste toujours. Que faisaient-ils venir avant le boum de la vigne qui finalement n’est vieux que de cent-cinquante ans ? Des céréales, du blé certainement, les moulins des collines, ruinés ou réhabilités, en témoignent. Disposaient-ils de citernes pour entretenir un potager ? 

A l'avant d'une figuière, la citerne et le bassin pour préparer le sulfate de cuivre. 


Garoulho, chêne-kermès.

Après les années 70, les vignes du bas dont celle du cerisier, trop petites, peu productives, difficilement accessibles, n’ont été gardées que pour équilibrer un rendement moyen à l’hectare. Sur les laisses en hauteur, la garrigue a vite repris ses droits. La garoulho buissonnante de kermès[1], les cistes, parsemés de ci de là d’un pied de romarin, d’un genévrier cade ou d’un arjalat, un genêt scorpion intouchable, se sont réinstallés. Sur la première parcelle à gauche en débouchant dans la combe, un bataillon de pins serrés avait remplacé les cultures et le long du mur qui semble les contenir, au pied de l’appareil de pierres sèches, restait un alignement d’iris rappelant, plus vivant que les friches alentour, l’occupation millénaire des hommes…


Iris Van Gogh Wikimedia Commons source Web Museum.

Si Jean Ferrat nous a laissé une des plus belles chansons françaises avec « La Montagne », en 1964, cinquante années plus tard, nous assistons à un reflux, à une « reruralisation » pour ne pas répéter bêtement « rurbanisation », le mot-valise des "socio-géographes". Les citadins reviennent à la campagne parce qu’en ville, se loger est toujours plus cher, parce qu’en banlieue les communautarismes se sont imposés, parce qu’on aspire à un repos plus calme et réparateur, à un air à priori moins pollué, à une cohabitation moins stressante, à une école plus sereine. Les nouveaux venus vont-ils se fondre dans ce qui reste de l’histoire, de la culture villageoises ? Ce passé, cet enracinement représentent-ils encore quelque chose à l’heure où ils ne sont plus portés que par un quart (800) de la population permanente de la commune[2] ? Est-ce que dans l’antagonisme ville-campagne voyant cette dernière moins dotée, abandonnée par le commerce de proximité et les services publics, la première va exporter les dérives qui l'insupportent, l’écart toujours plus marqué entre un centre favorisé (économie, dotations, culture) et une ceinture laissée pour compte ? La ville ne va-t-elle pas se soulager de ses problèmes en refilant une part de son malaise sociétal grâce à l’obligation de construction de logements sociaux, par exemple ?        



Plutôt que de répondre que rien ne s’arrange avec des cataplasmes sur des jambes de bois, autant se ressourcer en parcourant la combe de Caussé. Les iris y fleurissent-ils encore ? S’ils n’y sont plus, pour nous consoler, pour aller au-delà de ce décrochage des hommes dans le vallon, montons même au-delà, là où, sur quelques millions d’années, l’eau quelquefois en colère fait inlassablement reculer la falaise, dans un ressaut où elle doit gronder avant de finir, deux ou trois jours après le pic, en cascatelles claires. Revoir en haut ces oulos dau diablé[3], ces marmites de géant avec, à l’intérieur, bien rondes, les pierres qui fourbissent et érodent sans témoins… Sans trop penser aux truffes que les aigats déterrent, le regard perdu dans le bleu d’un ciel où ne déroge que le vol planant d’un grand rapace, avec, sous nos pieds, les mystères d’un monde souterrain encore inexploré de grottes fraîches et de sources[4] qui partent jusque sous la mer, gardons cette liberté de rêver qui seule peut entrouvrir de l’amour infini l’évanescente sensation.


Merci Au Fil du Temps pour le partage de cette sortie dans les collines de Nissan. Belle, mauvaise ou entre les deux, l’inspiration dont elle est à l’origine démontre seulement la seule prétention à ne pas marcher seul. Elle devrait se prolonger avec une recherche sur les chapelles wisigothiques, les moulins à plâtre ou à blé et pas seulement puisque Nissan est la patrie de l’abbé Joseph Giry (1905-2002), spéléologue (exploration de l’aven le plus important de la clape, celui de l’Hospitalet) puis archéologue reconnu. A suivre donc pour d’autres aventures !              



[1] Lou garric en occitan qui a donné la garrigue. Exploité pour ses fagots vendus au boulanger, son écorce et ses racines riches en tanin pour le travail des peaux, sa cochenille en mai  qui lui a donné son nom latin « quercus coccifera », faisant l’objet d’un droit de récolte laissé aux pauvres  et pour lequel on se laissait pousser les ongles (cette cochenille donnant une couleur rouge vermillon très prisée serait devenue rare). Page 21106 Tresor dau Felibrige, F. Mistral cite « vermeiado cochenille du chêne nain, kermès. 
[2] Un rapport consécutif surtout à la condition de commune touristique avec les stations balnéaires de Saint-Pierre-la-Mer et des Cabanes-de-Fleury sur 7 kilomètres de plage. 
[3] Prononcez « diaplé ». Le terme « oulo », adopté en français sous la forme « oule » indique la présence de cette forme d’érosion : le Clot de l’Oule (Niort-de-Sault, Pouzols-Minervois), le gourg de l’oule à Villelongue-d’Aude et Villanière, toujours dans l’Aude.
[4] Exsurgences puisque pour une rivière qui réapparait on parle de « résurgence ». 

samedi 29 octobre 2016

DING, DENG, DONG... / Fleury en Languedoc


Essayez-donc d’imiter nos campanes d’alors et reprenez en chœur « Mi, sol #, si... »
Grâce à l’ouvrage collectif « De Pérignan à Fleury » (1) nous en savons davantage. Remercions d‘abord les chroniqueurs pérignanais d’avoir partagé avec tous le résultat de leurs recherches (beau livre à prix modique... merci aussi la municipalité).

Page.55, un « HISTORIQUE DES CLOCHES » ne compte pas moins de trois pages grand format agrémentées de photos.
Jusqu’en 1673, l’église Saint-Martin de Pérignan (2) ne dispose que d’un clocher-tour (campanile ?).
En 1782 (le village s’appelle Fleury depuis 1736), les sept cloches abritées à l’intérieur ont été refondues et bénites... Cela voudrait dire que, plus anciennes, elles ont été réparées (3), peut-être faute d’entretien...
En 1837, Nicolas Martin, fondeur, refond une grosse cloche fêlée. Celle-ci ne pèse plus que 8 quintaux mais les 70 kilos qui restent permettent de livrer aussi une "mandarelle" au prix de 40 francs
En 1895, après les guerres révolutionnaires puis impériales, cinq cloches ont certainement fait les frais de réquisitions pour être transformées en canons et seule reste la "mandarelle" puisque les deux autres sont fêlées. Disposant de 1000 francs, le conseil de fabrique de la paroisse de Fleury (4) décide de refondre les deux cloches hors d’usage et d’en acheter une troisième.
– Philomène-Camille (mi) accuse ses 1020 kilos.
– Théodore-Brigitte (sol dièse, celle de l’horloge) n’en fait même pas la moitié (420 kilos).
– Joseph-Noélie (si) la plus aigüe ne pèse que 265 kilos.

« Que la voix de ces cloches fasse monter vers le ciel l’accent de nos prières et descendre sur nous les bénédictions du Seigneur ! »
Jean Prax, curé à Fleury depuis 1890.



(1) 2009 / ISBN non renseigné.
(2) Du XIIème voire du XIème dans sa forme romane vu que le décor extérieur de billettes en damier est daté approximativement des XI et XIIème siècles (Pierre Moulier / Eglises romanes de Haute Auvergne / Editions CREER 2000).
(3) Pour des causes diverses : vieillissement, oxydation de l’airain, fêlures dues aux battants ou au grand froid (c’est à cause du froid que la Maria Regina de la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg, considérée come la plus grosse cloche de France [plus de 20 tonnes], fut fêlée avant de disparaître en 1521, deux ans à peine après son installation).
(4) Changements du nom du village : Pérignan (? 1736) Fleury (1736 – 1790) Pérignan (1790 – 1814) Fleury (1814 -1815) Pérignan (mars 1815 – nov 1815) Fleury depuis cette date... mais on parle toujours de Pérignanais.
Photo François Dedieu / diapo du village vu depuis le moulin.

dimanche 23 octobre 2016

LES TROIS CLOCHES / Fleury d'Aude en Languedoc


Dessin du clocher de Fleury du temps où les trois cloches trônaient sur la plate-forme, rythmant les heures, les joies, les peines, rapprochant la communauté villageoise.
Chaque message d'ici-bas daignant décrocher de très haut pour rebondir et se joindre aux voix familières et du voisinage, chacun, dans le secret de son esprit ou de sa foi les portait en soi avec un respect plus ou moins mystique. Je suis sûr, que les hommes, dans les terres, savaient jusqu'où elles portaient, nos cloches, suivant le vent, la température, la saison, le moment. Ils savaient aussi, si le glas sonnait pour une femme, un homme ou un enfant. Grave, le timbre des campanes vibrait longuement au plus profond des êtres. Plus léger, pour que la vie perdure, que la joie demeure, il entretenait la promesse céleste. Cette exaltation, entre le recueillement et la satisfaction modeste d’une journée bien remplie, Millet l’a si bien rendue avec ce couple de paysans en prière pour « L’Angélus ». 



ENCORE TROIS CLOCHES... 

Cette communion, le soir venant, entre le dur travail accompli aux champs (1), le bon vouloir des cieux et l’espoir fervent des hommes, est présente aussi, chez Victor Hugo célébrant cet autre temps fort des campagnes, celui des semailles :

« ... Pendant que, déployant ses voiles,
L’ombre, où se mêle une rumeur,
Semble élargir jusqu’aux étoiles
Le geste auguste du semeur. »
V. Hugo / Saison des semailles. Le soir.

 Le semeur de Jean-François Millet et celui de Vincent Van Gogh. 
Pour les enfants loin de tout comprendre, les cloches tintaient surtout pour rendre solennelles des joies plus terre à terre, certes à l’unisson des fêtes chrétiennes mais non sans une aura bienveillante pour des libations et des bonheurs apparemment plus païens. Quand je passe aux pins de Barral, la pensée me vient toujours que, vers mes huit ou neuf ans, le printemps m’offrit ici un « Premier matin du monde » et son souvenir poignant me travaille toujours davantage, un demi-siècle plus tard, tant je crains de ne pouvoir en transmettre aux plus jeunes que la vision nostalgique d’un paradis perdu.

(1) ils récoltent des pommes de terre. Dans l’œuvre de Jean-François Millet, figure aussi « Le semeur » toujours dans un travail jouant de l’ombre et de la lumière.

photos autorisées commons wikimedia. 

vendredi 26 août 2016

TOUR DE L’ÉTANG DE VENDRES (II) / ATTAGUS, CERCIUS, vers VÉNUS (avec le clin d’oeil d’Hibernatus) / Fleury en Languedoc.

Aude, n. f., fleuve de France, né dans le massif du Carlitte et qui rejoint la Méditerranée : 220 km. Elle passe à Quillan, Limoux et Carcassonne. 
Le Petit Larousse ne parle ni de Fleury ni des Cabanes. Tant mieux ! trop de monde l'été ! Et si le Petit Robert en parle au masculin, l’Aude, "la rivière" pour les locaux, "se jette" dans le Golfe du Lion par un estuaire qui, par le passé, a pu être la branche naturelle d’un delta fermé à l’époque par une digue romaine à hauteur de Sallèles (1).
Une écluse et une échelle à poissons permettent de passer le barrage anti-sel. Depuis le tablier, l’approche de la mer se fait solennelle : large, apaisé après le sursaut ultime imposé par les hommes, le fleuve n’est pas sans rappeler la force tranquille d’un naturel fougueux (2). 


Depuis au moins deux milliers d’années (3), "la rivière" qu’on rapproche à tort aussi de la Belle Aude, la fiancée de Roland, a tout d’un macho brutal. A choisir, disons plutôt "IL" pour ce celte appelé Atacos (4) puis Atax puis Attagus dans sa forme la plus latinisée (VIème siècle). Ses rives, avec les tamaris, les pontons, les bateaux, les pêcheurs, évoquent aussi Galabru et de Funès au Chichoulet, la campagne en face des Cabanes, dans le Petit Baigneur. Grâce au film, pour que ça fasse beau, le hameau, les bords de l’Aude avaient blanchi à la chaux leurs tons ternes et pas recherchés pour un rayonnement, méditerranéen certes, mais de carte postale.   


Au Grau de Vendres, jadis Grau de Fleury, après le nouveau port de plaisance, si la route borde les nombreux campings du bord de mer, un chemin dans la pinède (5) permet de rejoindre la tranquillité des bords de l’étang. Un affût pacifique permet d’observer les oiseaux ; une allemande et sa fille, venues aussi à vélo, sortent les jumelles et pointent une pièce d'eau visiblement désertée.
A vélo, pour éviter la fringale, il faut boire avant d’avoir soif et manger avant d’avoir faim. En dessert puis régulièrement, des dattes en guise de carburant. Énergivores que nous sommes alors que dans le désert, les bédouins tiennent deux jours avec quatre de ces fruits ! Quoique... à dix-huit ans, pour une fille, plus loin encore, sans rien dans le ventre je pédalais ! Une bordure de saladelles accompagne un gentil chemin sableux : ce sont ces fleurs et non les dattes qui me rappellent ces petits rendez-vous. Alors je fredonne « A Bicyclette », la si jolie chanson de Montand même si j’ai du mal à faire rimer Lysiane plutôt que Paulette... J'ai Louisette aussi mais c'était sur l'Orbieu...   


Le vent est frais mais à la rage du soleil, sur le coteau exposé, ils sont étranges, les trois, dont une femme, à soulever les pieds dans les friches épineuses... Pour quelle conjonction ? Et quelle conjoncture ? 

Imperceptiblement, nous sommes passés du milieu salin à l’eau douce sans rien remarquer du saumâtre. Les carabènes, l’églantier dont les gratte-culs ont déjà tourné à l’orangé, le gros peuplier blanc, vénérable, en témoignent. Au pied de l’arbre, à l’ombre, un banc public dit aussi combien cette promenade, depuis le village de Vendres, est appréciée.
   
(1) afin de détourner l’eau vers Narbo Martius, alors port romain accessible par l’étang lagunaire aujourd’hui de Bages et de Sigean. Son cours est celui du Canal de la Robine que des raisons aussi économiques ont fait déboucher par un passé récent à Port-la-Nouvelle (péniches jusqu’en 1970 en gros).
(2) le barrage anti-sel ferme avant tout le fond où l’eau salée, plus lourde, remonte surtout lorsque Cercius, le vent de terre d’ouest-nord-ouest, souffle, et de quelle manière !
(3) En ont parlé : Strabon géographe grec (vers - 64 / vers 21-25), Pline l’Ancien (23-79), Ptolémée (90-168).
(4) du gaulois "at-" = très, excès et "acu" = rapide, fougueux.
http://www.arbre-celtique.com/encyclopedie/atax-atacos-aude-808.htm 
(5) Nous y voyons notre premier apuput, une huppe fasciée. 

photos : 1, 3 personnelles août 2016
2. François Dedieu 1967.

vendredi 19 août 2016

TOUR DE L’ÉTANG DE VENDRES (I) / de PÉTASSUS vers VENUS ! / Fleury d'Aude en Languedoc

Plaisir du grand air quand Cercius sorti des foudres cyclopéens aquitains reste frais. Plaisir des platitudes lagunaires entre la mer, la Clape et le Crès avec le fleuve dans sa trouée, apportant l’eau douce et la vie. Plaisir gâché par ces possédants accapareurs toujours en attraction-répulsion vis à vis du touriste, une contrariété amenant à douter de l'administration du bien public. Que font-ils ? Et s'ils font, pourquoi ne daignent-ils pas communiquer ? 

L’Étang de Pissevaches où jadis pissaient les sources avant que ne viennent les vaches. L’Étang de Pissevaches avec quelques pins, en bosquets, sur quelques oasis gagnées sur le milieu salin. L’Étang de Pissevaches avec ses oiseaux marins dont les flamants roses, et ses pistes, entre les salicornes,  marquées par les sangliers. Après les campagnes de l’Oustalet, de Boède et l’accès à Moyau où solitaire, résiste le dernier des grands pins centenaires, prendre à droite la route de la Grande Cosse, accessoirement camping naturiste. A gauche, un peu avant, une piste mène vers la route des Cabanes, entre le lieu-dit la Guirlande et la propriété des Salins du Midi, Saint-Louis d’Aude. Une chaîne barre le passage et, faute d’indications, l’accès sur le côté peut faire plus l’effet d’une entrée que d’une intrusion. Hélas, au moment de reprendre l’ancien lit de l’Aude, en guise de réponse, sans autre forme de procès, un large et profond fossé arrête même les piétons... Une eau brune refoule et un alignement de barbelés révulse. Du coup, ces barrières lointaines mais agressives des ranches ou des haciendas reviennent à l'esprit. Faut revenir, faire demi-tour, Florian contre le vent en perd sa casquette. Après la station d’épuration qui accueille nombre de migrateurs mais qui pue si fort en amont (ce n’est pas la dernière que nous rencontrerons lors du périple (1)), moins salés qu’annoncés sur la carte d’état-major, les marécages où pointent les tamaris se parent de roselières, de massettes ou de carabènes. Quelques hirondelles en chasse virevoltent. Par cette route des marais, nous passons au large des campagnes de La Négly, Gaysart, Anglès et Cabibel (2) non sans faire une pause au caudiè (3) d’Anglès où l’eau pompée reste d’une utilité certaine. 



Quelques vaches noires ou fauves, une paire de chevaux cherchent l’ombre sous les petits frênes.
Au carrefour, une benne ferme la circulation (sauf pour les vélos !) par les chemins de la plaine en remontant vers l’axe Fleury-Lespignan : a priori une bonne chose avec l’interdiction de stationner dès que les grosses chaleurs en plus de la sécheresse augmentent les risques d’incendies. Sur la route des Cabanes, nos premières saladelles (de la balade) dans des prés sinon pelés. On dit que, depuis la mise en fonction du barrage anti-sel, cette route s’inonde... Le changement climatique n’y serait-il pas aussi pour quelque chose ? En attendant, s’ils ont remblayé les bords avec un ruban de goudron, c’est vraiment salopéjé, plein de trous et de bosses ! Un manque de considération évident pour l’usager qui paie doublement ! Déjà qu’ils rognent sur la signalisation (bandes blanches et d’accotement) ! A vélo, c’est terrible quand il faut se tenir à droite !.. Comme si on avait à raquer pour un dieu Pétassus (4) ! L’héritier de François II le Piteux fera-t-il pire ? (à suivre)      




(1) Entre Fleury et Vendres, autour des étangs et lagunes, nous en avons croisé au moins trois.
Il faut revenir surtout sur le problème de l’eau, besoin vital et néanmoins privatisé. Une eau désormais facturée deux fois, d’abord propre au robinet et ensuite, plus chère encore, en tant qu’usée et à traiter !!!
Est-il loin, le temps où il faudra payer pour l’air qu’on respire tandis que les vampires du fric étudient la possibilité de nous mettre un compteur pour le soleil ???
(2) Pour les trois dernières, les dénominations ont changé, soit, respectivement, Anglès, Rivière-le-Bas et Mire l’Étang.... Allez donc savoir pourquoi...   
(3) source ? résurgence d'eau toujours tempérée même en hiver d'où son nom occitan évoquant la chaleur ? 
(4) le verbe pétasser est accepté en français alors qu'en occitan, le pétas, le pétassage font partie d'un vocabulaire courant. 

mercredi 3 août 2016

A BICYCLETTE ! (II) / Fleury d'Aude en Languedoc



Après le pont de Fleury, les pruniers d’Ente ont été arrachés, les vieux qui restent ne portent pas de fruits, le four à pruneaux n’est plus, la plaine est rendue à sa viticulture comme si c’était une fatalité de ne pouvoir varier les productions... Quand je le dis que depuis quarante ans, « nos » politiques qui nous précipitent dans le mur ne font pas grand chose (1) !
J’attends de voir le cabanon aux chevêches ou chevêchettes qui sortaient au crépuscule, à la queue leu leu. Et là, surprise, non pas pour un trou de plus aux volets mais parce que des arbres sur l’entrée ont eu tout le temps de prendre de la vigueur. Moi qui suis scandalisé du vide laissé par les tronçonneuses, là c’est le trop-plein qui me choque, la remise rendue à la nature, la main de l’homme qui n’est plus, une absence ressemblant trop à une mort sans descendance. 


Non loin, une bâtisse fait penser à une métairie, l’habitation au-dessus de l’écurie. Le toit profite de l’ombre des grands peupliers blancs, vieux et majestueux, qui bordent l’implantation. Sauf qu’on a ouvert le ventre à une vie révolue, le portail est forcé, les volets, les ouvertures arrachés vomissent des ordures et un matelas pouilleux. Triste spectacle d’un passé fracassé, pillé sans retenue par les voleurs, gommé par des hippies qui n’avaient pas les moyens de leurs prétentions et finalement squatté jusqu’à l’écœurement !  



Vers l’embouchure, à partir de cette pointe nord de l’île de la Clape, les domaines se succèdent, comme émancipés par la distance croissante avec le bourg. Le plus cossu veut frapper les esprits avec, depuis les vignes, ses grandes dépendances mariant l’ocre des hauts murs au rouge de la tuile derrière une allée de pins parasols solennels. J’y vins, à vélo, vers mes dix-huit ans, journalier d’une semaine, pour faire quelques sous, quand ils produisaient des poires. Le domaine, blanchi à la chaux, chantait si bien le Sud que mes souvenirs préfèrent gommer le présent. 


Sur ces terres gagnées au fil des siècles par le fleuve, les vignes voudraient encore le disputer aux roseaux sinon à la sansouire. Cette année, quelques champs de blé déjà mûrs sont visibles : ce doit être une variété adaptée, courte sur tige mais avec de beaux épis, lourds et déjà mûrs en cette mi-juin. Avant le boum de la vigne, voilà cent-cinquante ans, le Languedoc n’était-il pas une terre à céréales ? Aujourd’hui, les cultures doivent-elles à l’eau douce pompée dans l’Aude (2) ? Avant Mérins et la Bâtisse-Haute, une grosse buse travaille à gros débit. Est-ce pour les taureaux et chevaux d’une manade installée voilà une vingtaine d’années ? Alimente-t-elle l’étang de Vendres, presque totalement interdit au public, au profit de chasseurs qui paient bien ? Est-ce pour le riz, confidentiel, mais qui peut pousser dans cette autre petite Camargue ? Une buse vraie, elle, cherche son équilibre sur un rameau de frêne : elle patiente, sûrement, pour le cadavre du mustélidé, on dirait, compressé sur le macadam. 

Je souris souvent en pensant aux étriqués qui, lapidaires et parce qu’ils ne sont pas sensibles aux bleus si divers du Golfe du Lion, parlent d’une côte languedocienne uniforme, monotone, ennuyeuse. A ces inconditionnels des bronze-culs huppés, ne parlons pas du modeste estivant, ne parlons pas plus de la garrigue que des étangs doux ou salés, des résurgences, de la rivière, de ses riverains, des noms qui traduisent une présence plus adaptée que dominante, émouvante même, tant elle est fragile. L’autochtone ne dit-il pas « campagnes » pour ces domaines, sans trop préciser si ce sont des châteaux, des fermes ou de simples cabanons ? Nous retrouvons cette modestie souriante dans les noms de ces implantations : les Hortes d’Andréa et de l’Ami, Joie, Mérins, les Bâtisses Haute et Basse,  les Saints Louis d’Aude et de la Mer honorant le mois d’août, le Capel, Saint-Jean de Birouste, Pistole, la Guirlande et Chichoulet !
Et si le barrage anti-sel a ouvert le passage au trafic vers la côte héraultaise, au-dessus des foyers, des cultures, des arbres, pour l’homme dans son milieu, l’air est traversé des chants de passereaux et par ces voyageurs falcinelle, crécerelle, philomèle ou seulement sarcelle qui parlent pour un monde autre que celui vendu à la fiducie.
Un jour, fin juin, à 6h 20 du matin, Florian a vu un loriot d’Europe à la Barque... et pour moi, c’est plus renversant que le brexit de nos voisins ! 


(1) J’ai vu une plantation d’amandiers dernièrement (mais je ne sais plus où) pour ajouter aux oliveraies replantées.
(2) le barrage anti-sel empêche une couche salée, plus lourde, de remonter haut en amont sur le fond de la rivière. Les poissons d’eau douce (et le silure en prime) sont plus présents désormais que les muges et les loups qui appréciaient l’eau saumâtre. 

vendredi 24 juin 2016

A BICYCLETTE ! / Fleury d'Aude en Languedoc.

C’est vrai qu’il y a les guines que nous chantons avec le Temps des Cerises et les beaux jours revenus, les bords de la rivière qui invitent à la pêche, les potagers qui étalent leurs offrandes (oignons, pommes de terre nouvelles, artichauts...), la vigne en fleur qui promet ses présents. Les frênes foisonnent dans les friches, formant un taillis serré où des passereaux cachés répondent aux trilles des chardonnerets, aux verdets et aux romances des rossignols gardiens de nids. Juin ! bouquet final du renouveau avant qu’un été torride ne l’accable. Le grand air oxyde les pétales pâlots des derniers coquelicots, on dirait avril : le printemps reste frais et s’attarde. Des amateurs de ce même grand air ont peint des coccinelles sur le goudron, la température est idéale pour la marche et les jeux de pistes.  

Un pont à voie unique, pavée de galets, passe l’Aude. Une petite plaque précise « Syndicat du Pont de la Gare Basse. 1928. Passage privé ». Un flot rapide fait onduler une chevelure d’algues, sur un haut-fond, peut-être un gué ancien. Malgré les orages d‘hier, l’eau reste verte, d’un vert précipité : on dirait le pernod des extraits de jadis, interdits et pourtant présents dans tous les placards des cuisines. 

De l’autre côté, la maison du pontonnier : son délabrement, suite à son énucléation, les poubelles déversées font l’effet d’un outrage ultime. Le contraste est total avec la grande vanne fonctionnelle, fraîchement repeinte,  qui, juste derrière, sur deux paires de mètres, ferme  le Canal des Anglais, un des épanchoirs drainant le lointain étang de Capestang (1). Le gardien du pont en était-il aussi chargé ?

Le chemin vicinal longe l’Aude : dans l’autre sens, en venant de Lespignan,  il permet de ne pas faire demi-tour quand la chaussée sous l’autoroute s’inonde.. Que les ploucs du coin s’en accommodent, eux qui ne pèsent rien contre le business vers Toulouse ou l’Espagne !
Un aigle ou une buse patrouille en se jouant d’un Cers qui fait pourtant défiler un chapelet de nuages. Entre les guigniers, les martelièiros (2), les vannes des fossés de la plaine rappellent le temps des immersions contre le terrible phylloxera... Plus bas, à La Pointe, papé Jean pompait aussi, à l’aide d’un moteur Bernard.



De ci, de là, une grange, offrant l’abri aux vignerons et aux montures, parce que le village se trouve à une heure et plus de route, avec sa réserve de bois pour la flambée, son gril, ses rats et tant d’anecdotes liées à la saqueto (3), la musette, la besace qui contenait le déjeuner.
Au bord du chemin, un cabanon à étage... pour le foin ou pour habiter ? Il en émane une beauté épurée, ruinée mais empreinte de dignité ; tout a été dépouillé, même le râtelier des chevaux, il ne reste que la mangeoire. Pourtant, vu de loin, le muret descendant vers le chemin apporte à l’esthétique et les tons crème de la chaux se marient bien à l’ombre tendre de deux platanes vénérables, ceux-là mêmes qui encadrent les pierres du portail et qui m’ont fait revenir pour la photo.

(1) l’Aude, fleuve côtier, appelé familièrement «rivière», est, comme nombre de cours d’eau méditerranéens, sujet à de brusques inondations, les Audencos. Ces crues sont causées par des aigats, plus communément nommés « épisodes cévenols ». Dans la Basse-Plaine, des étangs permettent d’écrêter ces excès (étang de Capestang, La Matte à Lespignan, étang de Vendres). Le lit du fleuve est artificiel ; le tracé de l’ancien lit subsiste, ses sinuosités qui marquent des limites plus nord avec le département voisin de l’Hérault attestent d’un apport important d’alluvions. (v. IGN géoportail).
Un deuxième drain, le Canal de France, débouche un peu en amont, à quelques dizaines de mètres à peine. Les noms sont-ils liés à une page d’Histoire ? 
(2) l’eau indissociable de la forge : une plaque indique le constructeur de la vanne, de son mécanisme : « Guiraud Jeune à Carcassonne », « Verlinde à Lille » et la troisième que je vous laisse déchiffrer.
(3) « Porter la saqueto » signifie « apporter son manger »  





dimanche 12 juin 2016

LA SAISON DES GUINES, C’EST JUIN / Fleury d'Aude en Languedoc.


Nous parlions de l’occurrence peu fréquente entre la fête de Pentecôte et la saison des guines. Wikipedia (1) nous précise que les deux calendriers, le naturel et le religieux, s’accordaient pour confirmer le proverbe seulement en 2000, 2003, 2011, 2014 ; ils coïncideront aussi en 2019 et 2025, ce qui, entre nous n’empêchera personne de fêter tant la fête que le fruit. 
Dans le trésor du Félibrige, Mistral qui associe lou guiniè, cerisier à fruits acides, à l’agriouliè (d’où le nom "griotte" en français), a relevé un extrait de H. Lacombe en occitan : « Filheto de setge ans, frescocoumo uno guino. » (Fillette de seize ans, fraîche comme une guine). 


En cherchant « guine » sans porter la moindre « guigne » (2) (autant préférer le terme languedocien !) : la recherche renvoie au merisier ou cerisier sauvage prunus avium. On trouve quand même prunus cerasus, « petit arbre dépassant rarement 8 mètres» (Wikipedia) drageonnant facilement, buissonnant.
Cela se complique quand la page précise « En France, il pousse spontanément principalement dans la moitié nord du pays ». 
Parce que le long de l’Aude, ce serait du forçage peut-être !
Il est vrai que les confusions sont légion et sans parler des variétés cultivées (Annonay, Précoce de Rivers, Amourette), le petit arbre sauvage est souvent assimilé au griottier, au merisier... 
Le nom vient d’Asie Mineure même si des contreverses subsistent puisque certains maintiennent que la variété de la côte sud de la Mer Noire aurait seulement amélioré, par greffage, des espèces sauvages déjà en Europe à l’époque des Romains.
Si « guigne » vient peut-être de « kign » en celte (« guindo » en espagnol ?), le mot turc « vischna » (cité par F. Mistral), aurait donné « višně » en tchèque, « visna » en espagnol moderne (encore d’après Mistral), éventuellement « weichselkirsche » en allemand.
Laissons la conclusion à Maria Sanchon du temps de ma « grand » qui parlait elle, de "cerises sures". 

(1)https://fr.wikipedia.org/wiki/Calcul_de_la_date_de_P%C3%A2ques
(2) par le passé, les cerisiers sauvages étaient censés abriter de mauvais esprits. 



Photos 1 pixabay guignes. 
2 pixabay sour-cherry. 
3 Commons wikimedia Wisnia pospolita aut Alina Zienowicz. 

samedi 28 mai 2016

LA DINDE A OUVEILLAN ! QUELLE CHANCE ! / Fleury d'Aude en Languedoc

ou CHERCHER LE PRÉSENT DANS LE PASSÉ : OUVEILLAN (2).
 
Tout ça pour vous dire que j’avais des notes sur Ouveillan, l’historique de la paroisse tel qu’il se reconstitue au fil du demi-millier des pages du dictionnaire topographique de l’abbé Sabarthès. J’avais... jusqu’à ce que l’ordinateur me lâche. J’avais... jusqu’à cette envie aussi improvisée qu’incontrôlée de mêler nos vies à ce village sur sa colline...  
       
 L’autre soir, parce qu’un «Racine et des ailes», avec les châteaux pinardiers du vignoble languedocien, est venu titiller insidieusement sur une résolution vaporeuse en sommeil depuis plus d’un an, je repars en quête des belles pages d’histoire d’Ouveillan, en reprenant le dictionnaire topographique de l’Aude (1912) de l’abbé Sabarthès, à la première page ! 


Ouveillanais, vous aussi, êtes à l’origine issus d’un métissage liguro-ibérique lié aux Grecs de Phocée et peut-être même aux Phéniciens, avant que n'arrivent les Celtes pour faire place nette, ici les Atacins, des Gaulois qui s’établirent dans la vallée de l’Aude. C’est chez eux que passa Hannibal  avant que les Romains ne s’en mêlent. Ensuite, les Wisigoths qui tinrent tête aux Francs mais subirent les Sarrasins... Passons sur nos dynasties de fainéants puis de vaillants rois qui vinrent mettre notre Languedoc en coupe réglée.

L’entrée «OUVEILLAN» figure dans le Trésor du Félibrige de Frédéric Mistral sans qu'il soit précisé si le village doit son nom aux moutons ou à sa situation d'île quand la mer était bordée d'étangs salés :
Óuvelhan, Aubelha : les habitants sont nommés Aubelhanot, v. manjopiot (mangeur de dindons) (1), sobriquet des habitants d’Ouveillan (de Fabrezan aussi). 
Prov. Lang. Qu vol sa filho saumeto,
    A Ouvelhan que la meto, à cause de l’eau que les femmes sont obligées d’aller chercher fort loin.

Mentions pour Ouveillan, fief du domaine royal, page 286, dans le dictionnaire topographique de l’Aude de l’abbé Sabarthès datant de 1912 :

Le «Château-Bas ou Vieux» au bord de l’étang desséché, et le «Château-Haut, dans le fort».
Ovilianum 924, Ovelianum 993, Ovellianum 1143, Ovelanum 1192, Oveglianum 1250, Olivianum = Ovilianum 1294, Ovelhanum 1319, le chastel de Ovillan 1334, Ovelhan XIVe s., Hovelhan 1402, Oveilhan 1479, Ovilhanum 1497, Hovelha, Hovellac 1536, Obelhan 1587, Houvelhan 1592, Oveilhan 1639, Ouveilhe 1666, OUVEILLAN 1781, Aubeilhà (vulg)... Sabarthès distingue aussi les mauvaises graphies.
Note sur l’Étang d’Ouveillan, au midi de la localité. 


Les étangs et ruisseaux :
Aiguefer, anc. étang, lieu-dit L’estanhol d’en Agaffer 1497
Les Canimals anc étang 924
Conseyrac anc étang au terroir de Saint-frichoux l’estang de Conseyrac 1147
la Courtine anc étang L’estang de la Courtine 1286
A l’Estanhol, jots les vinhas de Cussac.
Libarda, ruisseau, anc fief mouvant du roi lo Libardar 1411
La Mayral ruisseau, al Maïral 1536.
La Nazoure, 1781, ruisseau, canalisé dans sa plus grande partie pour déssécher l’étang de Toutous, tributaire de l’étang de Capestang Aqua vocata la Neroza 1322.
Recaudier ou l’Aiguille, ruis. (15 kil) affluent de l’Aude (aujourd’hui Ruisseau Audié).
Etang de Toutous, désseché par le ruisseau de la Nazoure L’estang de Totos, 1497.

Les divers fiefs (domaines de vassaux en échange de services et redevances dus aux suzerains) :
Agaret anc fief du roi (col d’Agaret cad.)
La Courbayrole anc fief La Corbayrola 1497.
Erminis anc fief appartint en dernier aux Frégose.
Le Fesc anc fief royal puis de Frégose Al Fesc 1497.
Les Launes anc fief de l’Ordre de malte, dans l’ancien décimaire de Saint-André, aussi sur la commune de Montels Condamina qui dicitur de launis 1275.
Loupian ou Villespassants, anc fief. 
Murviel, anc château dépendant de la seigneurie de Rieux et d’Alzonne, tenu au XIVe par les d’Harcourt, au XVe et XVIe par les Montredon.
Le Peyral, anc. fief royal. Al Peyral 1404.
La Poulverouse, lieu-dit, anc. fief royal. La Polverosa 1497.
Les Pujals, lieu-dit, anc. fief royal Als Pogols 1404.
Trente-Sols, anc. fief du roi. Als Trente Sols 1497.

Les fermes et écarts :
Bailly f. Bailli 1807
Bedos f Alha boria de Bedos 1536
La Bergerie f La Grangette 1774
Le Bousquet f Ad Buscaletum 1255
Cachefigues f.
Chambard f 1497
Colombet f.
Le Colombier château et f. ad Colombierum 1255
La Commanderie f
L’Étang f.
Filère f
Foncalvi, f anc propriété del’ordre de Malte, puis de l’abbaye de Fontfroide. Grangia de Fonte Calvio 1275.
Frayssinet, f., Le Gers (vulg).
Labastide, f.
Mailhère, écart. Le jardin de Maillère 1807.
Montplaisir, f.
Le Pain de Sucre, f., démembrement du domaine de Preisse
Petit-Rabes f.
Pézétis, f., Pézéty, une vieille masure appelée la Chapelle, confrontant d’aquilon la rivière Cesse ; de midi, le Canal Royal 1692.
Pigasse, f., Méterie appellée Pigasse 1776.
Preisse, chât. et f. ; anc. commanderie de l’ordre de Malte ; la chapelle était dédiée à saint Paul. Prexanus 782.
Le Terral, f., ancien prieuré sous le vocable de saint Martin ; anc. propriété de l’abbaye de Fontfroide. Castrum de Tarrallo 1176.
Terre Noire, f.
Le Viguier, f., métairie à Tailhesang..., métairie ditte le Vié, 1776.

Les lieux-dits :
 Belvèze lieu-dit 1776
Cassenac, lieu-dit
Les Faisses lieu-dit A las Fassias 1536
Le Finistère lieu-dit
La Gardiole, lieu-dit Alha Gardyolla 1536
Gazet lieu-dit, in Gizet 1256.
Lombric, lieu-dit, ad Lumbricum 1255.
Montpaho, lieu-dit Monpaho 1497.
Peyrefite, lieu-dit. Peyra ficha 1497.
La Porte-du-Salin, lieu-dit.
Le Pourcel, lieu-dit. Ad Porcairillum 1255.
La Rouquignole, lieu-dit. Via de Mirapisceto, vocata la Roquinola 1595.
Saint-Cristol, lieu-dit, Sant Crystolh, 1536.
Sainte-Marie, lieu-dit. Chemin de Sainte Marie 1692.
Saint-Brès, lieu-dit. Podium sancti Berrichi, 1192.
Taillesang, lieu-dit. Tailha Sanc, 1497.
Les Vases, lieu-dit. Ad Vasa 1255.
Ville méjeane, lieu-dit ; Villemejane, 1339.

Edifices religieux et liés à la charité :
la Maladrerie anc léproserie Als mesels 1497.
Saint-Charles, chapellenie, 1776.
Saint-Paul, ancien hôpital, Saint Paul, l’hôpital 1776.
Saint-Pierre-d’Artiague, chapellenie, 1756.
Sainte-Sixte, chapelle et ermitage ruinés. Podium Sancti Cirici, 1204.

Divers :
Le Bourguet-Neuf, faubourg, Al Bourguet Nou 1697
La Croisade auberge et distillerie
La Fardille A la Fardylha 1536
Le Fort, quartier, de là la distinction entre Ouveillan-le-Haut et Ouveillan-le-Bas.
les Malviès, Als Malviès 1497.
Le Moulin à vent
Saint-André, anc. décimaire au territoire de Montels (Hérault) et, par extension, commune d’Ouveillan. Condamina de Sancto Andrea, ... decimarium Sancti Andree, 1275
Saint-Frichoux, localité disparue, anc. prieuré uni à l’abbaye de Montolieu.
Toutous, loc. disparue ; anc. prieuré sous le vocable de Notre-dame. Villa Totonis 782.
Villa Sancti fructuosi, 932 ? 

(1) le surnom est relativement récent vu que le dindon n’a pu traverser l’Atlantique avant Christophe Collomb... 

photos autorisées :
1. Commons wikimedia / Le Terral, château, aut Flolma. 
2. Commons Wikimedia / Ouveilhan année 1498 aut Eutexie.

vendredi 27 mai 2016

CHERCHER LE PRÉSENT DANS LE PASSÉ : OUVEILLAN / Fleury d'Aude en Languedoc.

Trausse, Lapalme, Sallèles, Vinassan, Salles, Gruissan, Cuxac, Coursan, autant de villages sans lesquels nous ne serions pas ce que nous sommes. A la suite, sur cette liste, de celles qu’on établit pour de joyeuses retrouvailles, j’avais des notes sur Ouveillan, bien fournies, s’ajoutant aux chers souvenirs des condisciples de lycée et surtout liées à une amitié plus forte que les kilomètres à vélo nous séparant... même si lui avait une mobylette... bleue, à en croire la fragilité des souvenirs. 


Nous braconnions alors sans complexe et surtout par provocation, à jouer les croquants dans les pinèdes de ces châteaux et grandes fermes bourgeoises, en plein jour, à une heure et dans des circonstances n’incitant heureusement pas au zèle des gardes. Pire encore quand, la carabine en avant, nous arpentions l’étang en contrebas du village, de la route, des chemins, à la vue de tous ! Loin des escapades furtives et nocturnes d’un Raboliot, nous étions seulement dans l’extravagance des excès existentiels. Surtout pas liée à Sartre qui nous barbait autant que la prof de philo coco ! Non, une extravagance toute rabelaisienne (1) plutôt, de gros rires, comme quand Georges puis Antoine, trop pris par l’excitation d’un gibier tentant mais lointain, tombèrent tour à tour dans une cave* remplie d’une eau froide comme peut l’être novembre en Languedoc, dans les bourrasques d’un Cers* pénétrant venu des montagnes ! Sauf qu’ils m’auraient bien jeté aussi derrière les sénils*, mes copains rigolos, par égalitarisme !
Tel le piégeur flânant l’air de rien sur le théâtre de ses forfaits passés, j’aime repasser par Ouveillan dans un sens ou dans l’autre. L’été dernier, par la Minervoise, puis le carrefour de la Croisade, un jour que la  ramure élancée des platanes balançait sous les coups du Cers justement... Je veux parler des feuillages à terme condamnés par le chancre doré (2) tueur des pauvres arbres. Les gros nids d’agasse* d’autrefois ont aussi disparu... Te souviens-tu Antoine, de ta peur, cette fois-là, à trop jouer au pendule, si haut, pour quelques œufs à piller ? 


En bas du village, la cave coopérative et son architecture superbe (3), tout à l’honneur du raisin et de 1936, année du Front Populaire (prenez vite une photo car elles sont effacées un jour, comme à Vinassan, à Lespignan...). En redescendant vers Cuxac et la plaine de l’Aude, en surplomb de l’étang, feu la distillerie-coopérative d’un temps où la vigne et le vin quotidien rythmaient la vie. Entre la cave et l’alambic, parce que la vanité n’est pas leur fort, on cherche longtemps le monument aux morts. 


Village du midi, assoupi en cette mi-août, désert à l’heure de la sieste, qui veut nous laisser croire que tout à l’heure les gens partiront arroser les jardins, pour profiter au retour, de l’air moins chaud sur le devant de porte, manière de bader* le mouvement des éclats de voix et des boules sur les bancs de la place... Le Sud qui s’offrait en traversant la localité vers l’impasse Camarade (4), en récupérant des efforts liés à la dernière côte (en venant de Cuxac, celle de la distillerie).   
  
Enfin le monument aux morts, pour la paix, de ceux stigmatisés alors par les "braves gens" (4) remontés par les va-t-en-guerre. On le doit à René Iché (5), un enfant du pays, né à Sallèles-d’Aude, à quelques kilomètres à peine et d’Ouveillan par sa mère (il y est inhumé). Il est mal indiqué, la verdure le cache, c’est difficile de le cadrer... Dommage pour un village par ailleurs connu pour ses vendanges du cœur (au profit des Restos du même nom lancés par Coluche). 





Sur la route de Cuxac, à gauche, l’embranchement vers Fontcalvy, une grange fortifiée. Les vieilles pierres en imposent, au milieu des vignes il est vrai. Dans les ruines réhabilitées, l’été, un festival, des spectacles et un repas, pour ceux qui veulent, en bas, dans l’ancienne bergerie... N’espérez pas faire ripaille comme les moines d’antan... ceux-là donnaient plutôt dans l’ascétisme, la rigueur et le travail, règle de Cîteaux oblige. Sans remonter au XIIIe siècle et parce que nous n’étions que des chenapans aux cheveux longs, vers l’an de grâce 1968, nos jeux ne dérangeaient que les vols de corneilles qui logeaient là et la terre et les détritus comblaient presque le bercail des moutons. Maintenant, ils peuvent monter le son et multiplier les projecteurs : fini les troupeaux et plus de corneilles (comme dans la garrigue d’ailleurs). 


A Joël des PO, Georges de Narbonne et Antoine d’Ouveillan, à nos folles années 68-70 ! 
(à suivre)

(1) Ah ! Monsieur Rabéjac qui nous enseignait le XVIème siècle en littérature !
(2) champignon mortel qui serait arrivé d’Amérique avec les caisse de munitions en 1944. Il existerait comme un vaccin porteur d'espoir et testé à Sallèles...
(3) Architecte Gaston Ladousse qui fit aussi celles de Vinassan (1937) et de Trausse (1937), pour parler de cette période.
(4) Nino Ferrer ne chantait pas encore le Sud (1975) mais Jean Ferrat en remontrait déjà au camarade (1969) et Brassens était bien le seul à défendre l’anticonformisme pacifiste. 
(5) René Iché (1897-1954), Croix de Guerre 1914-1918, Médaille de la Résistance. Devenu sculpteur contre l’avis de ses proches, Iché vit son œuvre Forfaiture enlevée pour "indécence" (1923).
«Laissez-moi vous dire...» écrivait-il au préfet de police «... que votre décision, si inattendue pour moi, m’a beaucoup ému. certes, je ne prétends pas avoir fait un chef-d’œuvre et si mon intention fut mal interprétée, c’est peut-être que mon talent ne fut pas à la hauteur de mon ambition. Quoiqu’il en soit, j’ose affirmer que j’ai poursuivi, en sculptant Forfaiture, un but hautement moral. J’ai voulu traduire dans la matière plastique, la douleur et l’angoisse d’une trahison, la trahison de l’instinct génésique, le reniement de la vie elle-même vis à vis de la continuité de la vie : le drame affreux que la loi poursuit car il constitue un véritable crime de lèse-humanité.
«L’illustre maître Bourdelle, qui a bien voulu m’éclairer de ses conseils, m’a répondu que ce sujet, s’il avait été inspiré par le sixième commandement à un imagier de cathédrale, aurait très bien pu trouver sa place dans la pénombre d’une haute ogive. je m’en tiens là et j’accepte de retirer ma statue. Il me suffit de pouvoir affirmer en toute conscience que je l’ai méditée et exécutée sincèrement et que, pas un instant, je n’ai pensé ni visé au scandale mais à un vérisme significatif conforme à l’éthique la plus naturelle.»
Son projet de monument aux morts pour le village de Canet-d’Aude, fut aussi refusé pour «pacifisme» sinon pour excès d’humanité ! 

glossaire :
* l’agassa (o) = la pie.
* bader = fixer, reluquer, afficher sa curiosité sans retenue.
*cave = fossé.
*Cers = plus vieux nom de vent en France, honoré par les Romains parce qu’il chassait les miasmes, malheureusement assimilé par parisianisme à une tramontane par trop générique ! Pour être plus généralistes, nous disons aussi (et certainement à tort) "vent du nord" !
*sénils = roseaux dont on fait le chaume. 

photos autorisées : 
1. Commons wikimedia / Ouveillan aut Map data (C) OpenStreetMap contributors CC-BY-SA
2. Commons wikimedia / Canal_du_Midi near Colombiers 2011 aut Michiel1972 
3. La cave coopérative, personnelle août 2015. 
4, 5, 6. Le Monument aux morts, personnelles août 2015.  
7. Commons wikimedia / grange cistercienne Fontcalvy aut ArnoLagrange. 
8. Commons wikimedia / Ouveillan, Grange cistercienne Fontcalvy aut Rauenstein.