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mercredi 17 janvier 2024

VIE PASTORALE SUR LE CAUSSE.

 « ...depuis Mende, le visage des Français s'éclaire, les sourires apparaissent plus souvent, la méfiance recule et l'hospitalité se fait moins difficile...  » (p. 202, " CHEMIN FAISANT " Des Causses aux Corbières ", Jacques Lacarrière. 


Exactement ! Merci, monsieur Lacarrière. D'ailleurs, pas plus acariâtre que teigneux, bien au-dessus de la ladrerie mesquine de l'autorité, au nom de notre belle victoire du Larzac sur le gouvernement jacobin, avec le poème " Lou pastre " 1912, Pescalunetas, Antoni Roux (1842-1915), dans l'air pur du causse, c'est au souffle enivrant d'une qualité de vie que j'aspire... 

Causse de Sauveterre
Diapositive de juin 1979. 

"... E lou vèspre, am l’aver, content s’embarra au jas..." 

(Et le soir, avec le troupeau, content il se confine au bercail) / Diapositive de juin 1979. 


"...Quand reven lou printens et que la soulelhada (sourelhada)
Fa reverdir la terra et florir lo bartas, " 

(...Quand revient le printemps et que la soleillade 
Fait reverdir la terre et fleurir le buisson...) 
Diapositive de juin 1979. 

"... Sus lo causse auturòs qu’es coumo sa patrio,
Mestrejo son tropèl que s’augmenta dau creis..."

(Sur le causse orgueilleux qui est comme sa patrie, 
Il maîtrise son troupeau s'augmentant des naissances).
Diapositive de juin 1979. 

"... E pompant l’air tebés de la bèla natura,
Tot solet, luènh dau monde, amont se crei lo rei."

(Et pompant l'air tiède de la belle nature, 
Tout seulet, loin du monde, en haut il se croit le roi). 

Antoni Roux (1842-1915), né et mort à Lunel-Viel, vétérinaire de formation, ce n'est qu'à la fin de son engagement "politique", qu'il se consacre à la littérature :

« Per estre mèra de vilage
Fou avedre un famous courage. »

(c'est vrai qu'il suffit d'être deux pour générer tiraillements, disputes et dissensions !)

Vice-président du Félibrige Latin (qui, à l'initiative d'Alphonse Roque-Ferrier (1844-1907), occitaniste et linguiste de premier plan, pionnier, déjà en 1876, d'une orthographe commune aux déclinaisons locales de l'occitan, était partisan d'une union des pays du Sud de l'Europe), il est l'auteur de poésies dont ce sonnet " Lou Pastre " dans " Pescalunetas " (Petites Lunelloises), son recueil ultime paru en 1912. 

Source principale : Wikipédia. 

Ce poème, qui pour bien des raisons m'a littéralement ébloui, j'en dois la transmission à monsieur Couderc, Roger peut-être de prénom (comme le commentateur de rugby d'alors ?), professeur de français-occitan au lycée Lacroix de Narbonne. 

N.B. : ce poème figure dans ce blog et la page fb. 




jeudi 31 août 2023

LE-GRAU-DU-ROI (fin).

Dans tous les cas, c’est une atmosphère très méditerranée ; elle sature l’esprit : les rouge, bleu, blanc de la joute, le blanc de la chaux des murs, du phare, le bleu dit “ charron ” ou “ charrette ” (1), pourtant sur les portes et volets des maisons blanches du pourtour de la mer. Ah ! fredonner « bleu blanc... » de Marcel Amont (1929-2023) qui vient de nous quitter le 8 mars. Et comme pour ajouter à cette palette très Sud, discrète, la nuance ocre rose de la tuile canal, voyante, la touche verte des palmiers phoenix... 

Le_Vieux_Phare_du_Grau-du-Roi 2010 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Author Airair

« Bleu, blanc... » l’impérieux appétit de vie pour le monde d’après 1945 et cet élan pour aller, pleins de curiosité bienveillante, vers les autres.  : il y a de ça dans les peintures que ce cadre motive. Il y a aussi le pathétique d’un vieux monde, d’un “ vieux phare ”, comme les habitants du Grau disent avec, au pied, de vieilles barques aux voiles latines carguées. 

Le_Grau_du_Roi-Pointe_de_l'Espiguette-Zone_humide 2015 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Daniel VILLAFRUELA

Le vieux phare d’Aigues-Mortes, haut de 18 mètres, a fonctionné de 1829 à 1869 seulement : un rapide ensablement du golfe l’a rendu inopérant. Il sera remplacé par celui de l’Espiguette mais les gardiens continueront à occuper les logements, les conditions de vie dans le nouveau phare s’avérant trop difficiles l’hiver.    

Entre mer et lagune, Le-Grau-du-Roi est un port de pêche dynamique, le deuxième derrière Sète mais  le tonnage des prises ne cesse de s’infléchir, la flotte est de moins en moins nombreuse. Au Grau, on disait qu’après des jours de Mistral, le vent du sud pouvait donner de bonnes prises, et que s’il n’y a le Mijour qui fait danser les coques, ni le Levant, pas plus que l’Intre, une tramontane de l’intérieur, c’est calmasse, la pétole, un temps de curé.

Une autre ressource le long de la côte sableuse, jusqu’en Camargue, les tenilles (tellines, haricots de mer) et bien sûr le tourisme d’été.

Concernant surtout Agde puis Sète, notre intérêt avait versé vers les bateaux-bœufs. Au-Grau-du-Roi, jusqu’au début des années 60, existaient les « mourres de porc » (mourre pour museau). Quant au gréement des bateaux-bœufs, ces pêcheurs dérivés de la tartane provençale, notons un détail, à ce jour, attestant de l’importance de la langue mère :

* la mestre est la grande voile latine.

* les focs sont lou trinquet, lou gran et lou pichot défès...

Un gréement basique permettant une manœuvre souple, ne nécessitant que peu de matelots, rappelé ici pour ses noms en occitan... (source l’excellente revue du Chasse-Marée). 

(1) Tiré du Pastel des teinturiers aussi appelé “ Herbe du Lauragais ”.

lundi 14 août 2023

Les étangs palavasiens / VILLENEUVE-lès-MAGUELONE.

La surprise d’une toute petite route à droite dans la descente à la sortie de Fabrègues ; le panneau conforte le désir d’évasion : le mot « Camargue ». Déjà ? Je ne sais plus mais c’est là-bas que l’abbé Nothon, celui qui nous mène vers la communion solennelle nous emmène pour une randonnée d’une journée. Si l’usure du temps a décapé la part du rêve, elle ne peut rien contre l’infime ADN gravé dans le souvenir. 

Cordon_dunaire_de_Maguelone 2015 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Elmontpelierano

Villeneuve aujourd’hui, c’est le village à l’écart entre les deux forts, la prison sur la nationale de Sète et cette forme massive comme étrangement plantée entre l’étang et la mer. Une île ? Un point fort du lido ?

La prison ? seulement et pour la raison que la malbouffe est trop bien acceptée, dans le but de souligner le séjour qu’y fit José Bové, le meneur des paysans du Larzac, suite à l’attaque du “ Dacmo ” de Millau (août 1999). 

Cathédrale_de_Villeneuve_les_Maguelone_(Hérault,_France) 2014 the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Serge RBT

La forme massive ? un écrin de verdure improbable à deux pas de la mer, pour ce qui fut une cathédrale. Des traces des Étrusques, des Romains, des Wisigoths, d’une église du VIIe siècle. Étonnante cette implantation alors que toute la côte est délaissée car insalubre et trop exposée aux attaques et épidémies venues de la mer, dont la peste de Justinien en une vingtaine de vagues sur 225 ans (541-767). Cette cathédrale d’abord église est détruite en tant que mosquée par Charles Martel (737). Vingt années encore seront nécessaires pour reprendre la Septimanie aux Arabes (prise de Narbonne en 759 par Pépin-le-Bref suite à sept ans de siège). Au XIe siècle, Arnaud, évêque de Maguelone, décide de reconstruire la cathédrale protégée par des fortifications. Devenue propriété du Saint-Siège, l’île accueillera des papes venus s’y réfugier lors de troubles à Rome. La richesse, la notoriété vont pousser à la construction d’une nouvelle cathédrale. Grandeur puis décadence : suppression du siège de l’évêque (1536), vendue par les chanoines, démantelée sur ordre de Richelieu en tant que place forte protestante (1632), en partie démolie pour border le canal (1708). Aujourd’hui restauré (vitraux), le site, siège d’un festival annuel de musique médiévale, vit de son activité propre (« Les Compagnons de Maguelone », un groupement d’aide aux handicapés par le travail s’occupe de viticulture, d’aquaculture, de pêche, de sous-traitance). 

Villeneuve-lès-Maguelone_panneau_entree 2016 the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Fagairolles 34

La ville de Villeneuve-les-Maguelone marque aussi la lutte pour la reconnaissance de l’occitan. En novembre 2010, suite à la pose par la mairie de panneaux en occitan, le Mouvement républicain de salut public, une association, porte plainte. Le 12 décembre 2010, le tribunal administratif statue contre la mairie. Robespierre a gagné : des têtes vont tomber ! Le fait nouveau de la part du Sénat autorisant lesdits panneaux (16 février 2011, sur proposition de Roland Courteau, sénateur de l’Aude), le 26 juin 2012, la cour d’appel administrative de Marseille va aller contre le tribunal administratif... Deux années à hue et à dia, méli-mélo, foutoir à la française consistant à empiler les traitements sans que les précédents ne donnassent à s’appliquer, à inscrire tout et son contraire dans le marbre... La France reconnaît la langue régionale mais ne ratifie pas la charte européenne la concernant ! Quant à la brutalité manifeste pour une France jacobine monolithe, prônant chez les autres des principes d’ouverture et de tolérance qu’elle ne s’applique pas, on peut la rapprocher de celle que craignaient les Wisigoths, peu enclins à apprécier leurs « libérateurs » du Nord... une constante que nous retrouvons dans le fonctionnement pyramidal du pouvoir français oppressif. Lous manjo-poufres de Villeneuve-lès-Maguelone, les mangeurs de poulpes (étonnant comme le céphalopode est apprécié dans le secteur) ne se sont pas laissé faire ! Chapeau bas !  

mercredi 7 juin 2023

FRONTIGNAN (3), Achille Munier, le Thalamus.

" Qui cherche trouve "dit le dicton, pas toujours ce qui nous importait mais plus sûrement, ce qu'on ne cherchait pas...

La région proche m’arrête plus que prévu et va peser lourd alors que le Sud provençal jusqu’à l’Italie se fera plus léger au fur et à mesure de l’éloignement...      

« Notes sur Frontignan pour servir à son Histoire », Achille Munier 1874, deuxième édition, Montpellier C. Coulet Libraire-Éditeur, Paris E. Dentu Libraire-Éditeur, 376 pages. 

Villeneuve-lès-Maguelone_projet_de_canal_des_étangs_1742_-_Archives_départementales_de_l’Hérault domaine Public wikimedia commons

Pour avoir seulement picoré :

* page 172. D’après Pline l’Ancien (23-79 suite à l’éruption du Vésuve), les riverains de « l’Étang de Lates » (peut-être le Méjean actuel) se faisaient aider par les dauphins pour pêcher les bancs de mulets. Achille Munier en déduit donc que cette association devait se faire dans les autres étangs. Par contre, il constate qu’à son époque il y a longtemps que les dauphins n’approchent plus, les hommes étant trop intéressés par leur graisse.

En plus des explications historiques, l’ouvrage raconte bien des détails sur la pêche, la chasse, dont le procès contre les gens de l’évêque de Maguelone qui barrent les graus au moment du frai avec un filet prohibé nommé « brugine ». 

Grandes_compagnies_miniature_XIIIe_BNF domaine public wikimedia commons

* page 225. Un exemple des rudes temps (vers 1350, époque de Du Guesclin) d’insécurité avec la venue et la prise de Frontignan, à l’enceinte non close du côté étang, par Seguin de Badefol, anglais ou gascon selon les dires. Ce routier descend d’Auvergne avec 3000 soudards qui brûlent, pillent et ravagent. Après Aniane, Gignac, Villeveyrac, Pomerols, Florensac, c’est le tour de Frontignan.

Le Thalamus, de Montpellier, archive manuscrite sur trois siècles, jusque vers 1600, en témoigne « dans la langue de nos pères »... Surprise, c’est bien écrit en occitan ! (tous ceux qui se disent « fiers » du patois parlé par le papé ou la tantine, plutôt que de persister à ressasser « patois » « patois » sans réaliser que le mot a été imposé par l’envahisseur pour mieux soumettre, sont priés de dire désormais « occitan » ou « languedocien » concernant notre langue historiquement première... il n’y a pas de tradition qui tienne... ce n’est pas parce que mon père et mon grand-père acceptaient Pétain que je dois manifester une quelconque indulgence à l’égard de ce maréchal qui faisait le salut fasciste... Putain va !).

Donc, « En lan... de nostre senhor... MCCCLXI... en lou mes dabril... matin a la poncha del jorn a XII dabril, et intret ame sas companhas... per l’estanh... aqui non avia gis de mur... » Les assaillants perdirent deux-cents des leurs, les défenseurs trente. Mais les bandits restèrent sept semaines à piller, violer et incendier. Quand les troupes alliées au lieutenant du roi se mirent en branle, les bandits partirent au Vigan pour revenir en mai enlever plusieurs personnes. Absent pour défendre la ville, le capitaine-châtelain fut destitué par lettres patentes.

Arrêtons de picorer même si cette provende reste des plus intéressantes, entre autres, sur la naissance de la ville de Sète, quitte à revenir sur nos questions de territoire déjà évoquées ! 

lundi 8 mai 2023

JEAN MOULIN & MACRON

Ce matin, la cérémonie de la victoire (heureusement que malgré les collabos et grâce à de Gaulle, la France a pu se mêler aux grands vainqueurs)... Pour ceux qui comme moi n'ont pas voulu gonfler les statistiques d'un Macron casserolé même symboliquement, même mis sous bulle, je garde l'image pathétique des Champs-Élysées déserts avec juste ce qui restait du passage du premier des Français... le crottin pisseux plus brun jacobin que vert espérance des chevaux de la garde... 

A  présent, il doit être en train de rendre hommage à Jean Moulin, rappelons-lui, en passant, le bonheur immense de son père à Béziers, fin 1899, quand ce petit "Janet" a ravi la famille. Est-ce plutôt en provençal qu'en languedocien ? Peu importe c'est en occitan, un peu en écho au parler de nos soldats de la Grande Guerre.  

« A moun fieu jan (A mon fils Jean)

(qa pas ben tres mes) ( qui n’a pas encore trois mois)

O moun Janet, moun cagounis, (O mon Janet, mon dernier né,)

Tu que siés vengu de Paris (Toi qui es venu de Paris )

Dins un coulet, coumo lou dis (Dans un chou, comme le dit)

Toun fraire (Ton frère)

O moun mignot, coumo siés beu (O mon mignon, comme tu es beau)

Quand, dins la faisso e lou banéu (Quand, dans tes bandes et ton maillottage)

Te viro coumo un cabédéu (Te tourne comme une pelote)

Ta maire (Ta mère)

Siés lou jouguet de tout l’oustau (Tu es le jouet de toute la maisonnée)

Quan fas riseto emé ti trau ; (Quand tu fais risette de tes fossettes)

Mai, subre-tout, à iéu fas gau, (Mais surtout tu me fais joie à moi)

Toun paire (Ton père)

E longo-mai siegués ansin, (Et que tu restes ainsi longtemps encore,)

Fres, amistous e cremesin (Frais, caressant, le teint rosé)

En digne fieu di viéi Moulin, (En digne fils des vieux Moulin,)

Ti reire. » (tes aïeux)

Antoine-Émile Moulin (1857-1938). 

Jean Moulin 1937 studio Harcourt Domaine public.


 Alors la France, toujours honte de tes ascendances latines ? 

Alors la France, on croit se venger lâchement sur l'Italie du peu de considération de la part du reste de l'Europe ? (si quelqu'un demande j'ai de quoi développer et à l'avantage de Meloni qui plus est...)

Alors la France, à quand le persiflage sur l'Espagne en oubliant de dire qu'elle a tenu tête à Napoléon jusqu'à prendre Toulouse (avec Wellington il est vrai !). 

Rien à attendre d'un Macron qui continue à faire le kakou, à essayer de faire le beau avec le Russe ou le Chinois, qui n'est même pas capable de se faire respecter par l'Afrique, rapport à l'immigration et même par un nain sous perfusion comme les Comores, qui ment effrontément aux Français (retraite) pour amadouer les créanciers ("Oh! c'est pas juste, ils nous ont baissé la note !") et que les Étasuniens se frottent les pieds sur nous. 

Lâche, cynique, complètement déconnectée, usant de la commémoration comme si tout allait bien, faisant craindre une "chute de l'empire romain" si les talents de nos sinistres (Lemaire, Schiappa) dégénèrent en travaux pratiques, cette clique sera vraiment celle de la fin...  

Une consolation, au Panthéon, ce ne sont pas les cendres de Jean Moulin... Paris, une fois de plus, n'a pu confisquer un Grand Homme au reste des Français... et moi j'ai passé le cap de ne plus vouloir me faire accepter mais plutôt de rejeter cette France du Nord pas très engageante, non !  

Jean Moulin Plaque_Henri_Deschamps Miribel the Creative Commons CC0 1.0 Universal Public Domain Dedication Auteur Benoît Prieur



lundi 24 avril 2023

ENCORE UNE CROISADE

Si l'Histoire les retient en dehors des Guerres Saintes, la Reconquista notamment, les Croisades marquent un affrontement entre Chrétiens et Musulmans. Nous pouvons aussi en parler en inversant l'ordre des belligérants. Sans qu'on ait à les nommer, les Croisades n'en finissent pas d'opposer deux visions du monde qu'un système économique mondialiste trop sûr de lui n'arrive pas et n'arrivera pas à niveler, à étouffer. 

Pardon d'avoir parlé de ce biais à propos d'un autre problème, bien moins sanguinaire, lié surtout à la culture et au respect des différences identitaires.. L'expiration du ressenti, bien que révélatrice d'un certain inconscient laisse parfois à désirer (je la vis souvent comme une maîtresse autoritaire qui me domine...) m'a fait violemment réagir, ce matin, aux écrits laconiques d'un rédacteur de Wikipedia disant que si les Romains ont appelé Cers un certain vent du Languedoc, en fait ils ne faisaient que parler de Tramontane ! 

E o ! cal pas que s'i amuse ! Il ne faut pas qu'il s'amuse à ce jeu ! (le " Y " n'existe pas, à ma connaissance... Jean de Siran peut-être ? Guy, cher copain de toujours et guide fondé à nous éclairer, corrigez svp si besoin). 

D'où ma croisade matinale macarel ! À la place j'ai mis : 

"  Il diffère de la Tramontane. Apparenté au Mistral par sa nature catabatique de vent de couloir, son emprise s'élargit au niveau du Golfe du Lion entre Agde au Nord, Port-la-Nouvelle au Sud. Le Cers d'un nom de vent peut-être le plus vieux de France, se retrouve, toujours par l'entremise des Romains, désigné aussi au niveau de l'Èbre. De grâce, rendons à César et sans lui en vouloir aucunement, laissons la Tramontane partout où elle voudra et où les présentateurs du temps, pas plus météorologues que vous et moi, veulent bien la coller pour les touristes, par parisianisme. Qu'elle souffle son joli nom ailleurs mais pas dans le Narbonnais. "  

Fleury-d'Aude. Les Pins de Barral non traumatisés mais penchés par le Cers, vent dominant. Pour ceux qui connaissent, au fond, Lespignan et vers nous, touchant les pins, la vigne de Noé.  Diapositive 1963


Est-ce trop réagir ? Suis-je sanguin et invivable comme ce Cers qui souffle trop fort et rend fou dit-on ? Il y a 2140 ans que les Romains l'ont honoré dans le Narbonnais vu qu'il assainissait l'air du tout au tout... et étymologiquement le mot " Tramontane " n'apparaît qu'en 1210. Tout est dit non ? 

Qu'on suive la bannière ! En chantant " Non non non non, le Cers il n'est pas mooort car il b... encore, car il buffe encore... " (buffa = souffler en languedocien). Sus aux Jacobins ! La jacobinite ne passera pas ! 

mardi 14 mars 2023

ESPÉRAZA et ses ermites

A Espéraza et dans les villages autour, le lendemain du mercredi des cendres, pour clore la fête de carnaval, c'était la coutume des ermites. Arrêtée en 1947, elle reprit dix ans plus tard mais à partir de 1970 perdit son lien au carnaval en n'étant plus programmée que pour Pâques et même en mai. 

View_of_Esperaza  Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Author Krzysztof Golik

En chemise de nuit de femme et chapeau melon (Espéraza a été une riche capitale du chapeau), les ermites se passent le visage au noir de fumée, surlignent leurs sourcils et moustaches, se font un gros point sur chaque joue ainsi qu'un rond autour d'un œil.  

L'ermite de tête, un costaud, porte une croix de trois mètres de haut, chargée qui plus est, de gros chapelets au centre, de saucissons et saucisses sur les bras qui balancent au bout une courge bouteille. Les ermites suivent, porteurs de paniers. Accompagnés, idéalement, d'une quinzaine de musiciens (percussions, clarinettes, basses, cuivres et barytons), ils entrent dans les maisons pour recueillir des charcuteries, du jambon, des œufs. 

Devant les maisons où habitent une fille ou une jeune femme, ils se font passer pour de faux ermites et chantent une sérénade d'amoureux qui soupire ; des paroles en français alors que plus anciennes, celles en languedocien relèvent des farces de carnaval dont celle à propos d'un "paure ermita" qui s'est pris fantaisie de se couper la barbe : 

"... Un jorn que fasia vent             Un jour qu'il faisait du vent
La barba sioguec copada                 La barbe fut coupée
E le bent se l'emportec                 Et le vent l'emporta
Aval, sus l'esplanada                  Là-bas, sur l'esplanade, 
Un pintré la ramassec... "             Un peintre la ramassa...

Les provisions collectées permettent de régaler les participants dans un banquet où les femmes sont exclues. 

Vers trois heures de l'après-midi, tout le monde est invité pour le vin chaud. Dans une pairolo, une grosse marmite à l'origine posée sur des pierres (d'où son nom), soixante litres de vin, cinq kilos de sucre, des clous de girofle, de la cannelle, du citron, des zestes d'orange.  

En attendant que ça chauffe, le dernier marié de l'année doit faire le tour de l'âne. Tourné vers la queue de l'âne, sur la tête, le bainat, un frontal de boeuf avec ses cornes (surtout qu'à Espéraza, existait une vieille tradition du bœuf gras (1) (souvent une vache) qu'on poursuivait dans les rues avant de le manger) il doit écouter du cocu, réminiscence machiste sur la jalousie possessive du mâle alors que la femelle est réputée infidèle... 

" ...te caldra monta la garda... il te faudra monter la garde 
En portant le bainat. (bis) 

(1) la viande est réputée meilleure et les bouchers de bêtes qui ont couru étaient plus recherchés... c'est donc, il me semble, le contraire que lors du sacrifice du cochon... 

Source Revue Folklore n° 119, automne 1965. 

Voir aussi Rennes-le-Château, ses légendes, son mystère : La sortie des ermites d'Espéraza (rennes-le-chateau-bs.com) 


samedi 18 février 2023

LE MESSAGER DES JOURS NOUVEAUX...

« … Dessús ma fenèstra      Au-dessus de ma fenêtre

I a un ameliè                          Pousse un amandier
Que fa de flours blancas         Qui fait des fleurs blanches
Coumo de papièr… »            Comme du papier...          Gaston Fébus 

Référence à Gaston Fébus (1331-1391) (Fébus avec un "Feu" : le "ph" n’existe pas en occitan) qui parlait le béarnais mais écrivait en principe en français (« Livre de Chasse »). On lui attribue les paroles en langue d’oc de « Se canto » devenu chant de rassemblement assimilé à ce qui serait désormais l’hymne occitan... 

17 février 2023.

Un matin calme, pas un souffle... à entendre le bruissement joli des abeilles, entre pétales, étamines et gynécées... Oh ! 8000 kilomètres plus au Nord... 


Depuis le coteau donnant sur l'Aude, la " rivière ", Loulou, Gérard et moi vous envoyons le bonjour du plus imprudent des amandiers !  

L’amandier ? faut toujours qu’il fasse son petit original celui-là. Cette année, Loulou le copain d’enfance a photographié les premières fleurs le 7 janvier, en haut d’un arbre (pas Loulou !). Le 12, l'original devait confirmer sur ses branches du bas, presque drageons... (sur un talus, non taillé, laissé à son développement naturel). Gérard, encore un de ces copains qui vous fleurissent la vie depuis l’enfance, témoigne du même, alors en pleine fleur... Alors il suffisait d’attendre qu’après l’éclaireur, tous ses comparses se décidassent à faire de même, à grossir les rangs au bord des vignes, sur les talus, au-dessus d’un mur de pierres sèches abandonné dans la garrigue... Peut-être qu’à Caboujolette, après l'émouvante croix de pierre, ceux de Bernard et Jean, centenaires, au tronc imposant d’amandiers domestiques, attendent de montrer leurs plus beaux atours, posément, une fois la frénésie des sauvageons passée ? 

« Vous êtes pressés ? mais faites donc... » semblent-ils dire...

Que mon impatience ne passe pas pour de l’agacement... finalement, du côté De Sorbas (Almeria), les amandiers de Diego fleurissent à peine aussi.  

Rien n’est réglé, programmé, cette année c’est bien la première fois que j’observe (même de si loin) un décalage de plus d’un mois entre les premiers et le gros de la troupe : l’amandier des copains d'abord a attendu en vain le renfort, tel Roland à Roncevaux.

Oungan, cette année, il a fait mentir le proverbe « Imprudent coumo l’amelier »... inutile de traduire... 


Le petit amandier de l'Horte (voir sur "J'aime Fleury..., les photos 2023 d'Elena). En 2017, il avait fleuri le 2 février (l'année 2020 n'apparaît que pour une retouche de ma part immodeste à la beauté sans fard... 

Ils se décident enfin, depuis deux ou trois jours, Bettina s’est arrêtée exprès à Lespignan, Anne-Marie a pris les siens aux fleurs roses, dans la garrigue de Saint-Pierre-la-Mer, Evelyne me dit qu’en Provence, entre Le Luc et Gonfaron, ils ont fleuri, Bertrand confirme que sous un soleil plus brillant, les parures blanches ou roses, si généreuses voudraient chanter que notre joie demeure, si n’étaient les soucis, les remords. Et Elena, sitôt posées les valises, en a voulu plein les yeux !

On l’attend, on la pressent, on la patiente, éblouissante elle reste, pourtant, cette floraison, à plus d’un titre, pour son éclat, son côté bohème aussi, affranchi, qui n’a pas à demander la permission, parce que, tant qu’elle se manifeste, elle dit avec éclat que la nature est belle, que la Terre et la terre ne font qu’un... A nous de penser, s’il n’est pas trop tard, qu’il est criminel de faire disparaître les fleurs, les insectes, les oiseaux et tous les animaux qui ne pourront pas s’adapter au déséquilibre brutal, à la catastrophe climatique trop rapide par notre faute...  

« … Regardez les branches,
Comme elles sont blanches.
Il neige des fleurs… » Théophile Gautier (1811-1872). 

À Lespignan, capté par Bettina... 

jeudi 26 janvier 2023

La Sauze, poète et messager en langue d'oc (fin)...

 

Aude_-_Ouveillan_-_Eglise_Saint-Jean_l’Évangéliste  Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author EmDee  (le clocher a un peu le même aspect que celui de Fleury avant... 

Obsèques d'Émile POUYTES vigneron à Arquette-en-Val (11) 6 mars1976) photo André Cros 1926-2021 (celui des vendanges dans les Corbières) Archives municipales de Toulouse licence CC BY-SA 4.0

Le temps, qui finalement finira mal pour nous tous (plus il passe et mieux on s'en persuade), nous apprend que Marcel (1921-2003), l'auteur du " Vinhairoun " le texte sur le vigneron, est le père d'Alain, dit " La Sauze ", d'une famille d'Ouveillan, que ce dernier a commencé à chanter dans les années 70, qu'il compte dans la nouvelle chanson occitane d'alors, que sa trivialité rabelaisienne, " ... uno grosso cagarèlo te fa fourça per cagar... " (2) (chanson Lou Fenhant), s'accompagne d'une grande humanité notamment lors de sa chanson hommage à la confrontation de Montredon où la fusillade causa la mort de Joël Le Goff, commandant d'une CRS puis en face, d'Émile Pouytès viticulteur, les estimant tous deux victimes, les coupables étant à chercher " ...cap a Paris,, l'Élyséu, Matinhon... ", inutile de traduire surtout lorsque l'hypocrisie, les mensonges des gouvernants sont aujourd'hui flagrants au point de faire honte à leur minorité de soutiens, de députés, d'affidés souvent intéressés...  

On peut classer La Sauze dans les contestataires à condition d'entendre, sous ce vocable, celui qui veut plus d'honnêteté, de justice, de respect ! Contestation contre l'agrandissement du camp militaire du Larzac... il faut reconnaître que la bêtise crasse d'un secrétaire d'État, plus de 21 ans député, a bien aidé : estimer que les Français ne sont que des moutons ou des veaux a des limites ; heureusement que la surenchère se paie, à terme, dans une situation abusive, qui plus est, de mandats électifs  à répétition. 

" Qu'on le veuille ou non, la richesse agricole potentielle du Larzac est quand même extrêmement faible. Donc je pense qu'il était logique de considérer que l'extension du Larzac ne présentait que le minimum d'inconvénients. Alors la contrepartie c'est le fait qu'il y a quand même quelques paysans, pas beaucoup, qui élevaient vaguement quelques moutons, en vivant plus ou moins moyen-âgeusement, et qu'il est nécessaire d'exproprier "
André Fanton, secrétaire d'État à la Défense. 

Ajoutons à ce coup de force pompidolien que venait de se créer le camp de Canjuers, plus de 30.000 hectares, plus proche encore du Plateau d'Albion, alors base de lancement de missiles nucléaires.

La Sauze a chanté en occitan des airs de Brassens, Ferrat... La Mountanho ne traduit que le drame des paysans evant quitter la terre pour la ville ou aujourd'hui, qui se font escroquer par les centrales d'achat des grandes surfaces ou doivent laisser la place à de grandes sociétés de l'agroalimentaire qui concentrent les vaches par milliers, n'empoisonnent pas que les abeilles et confisquent l'eau pour toujours plus de pognon !  

Alors qu'il faut tromper notre impatience dans l'attente des fleurs blanches ou roses de l'amandier, messager du renouveau de la nature et du cœur des indigènes, le Cercle Occitan de Narbonne lui rend hommage en tant que messagiè de nostro lengo resté fidèle à la vigne, aux traditions, à la vie de nos villages. 

Le 8 janvier 2023 Alain Sauzel dit " La Sauze " poète et chanteur occitan d'Ouveillan nous quittait à 79 ans suite à une maladie (1943-2023). C'est bien lui qui grattait ses cordes et nos pensées aux Cabanes-de-Fleury...

(1) Touriste, laisse ta femme et ton argent, et toi va-t-en ! 

(2) qu'une grosse crotte te fait forcer pour caguer (un comble pour un fainéant !). 

https://cercle-occitan-narbona.fr/index.php/notre-amic-la-sauze 

Sur ce blog, les autres articles sur Ouveillan

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2016/05/la-dinde-ouveillan-quelle-chance-fleury.html

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2016/05/chercher-le-present-dans-le-passe.html 

Le passé reste vivant, ceux qui nous quittent aussi... En apprenant le décès de La Sauze, je crois devoir accepter aussi celui du copain Antoine, le 10 mai 2020 (Pyrénées Orientales), à l'âge de 70 ans... je l'ai cherché... Téléphoner ? je n'ai pas osé... Ceux qui partent, ceux qui restent... dont tous ceux qui n'osent pas dire "je t'aime" de leur vivant... c'est comme ça... 

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2016/11/festo-felibrenco-ouvelha-aude-en.html

mardi 24 janvier 2023

La Sauze, poète et messager en langue d'oc (première partie)...

Les Cabanes-de-Fleury, fin des années 80, début 90 peut-être, Lou Cabanaïre, le resto au bord de l'Aude, si agréable pour ses tables côté cour, a programmé un chanteur accompagné de sa guitare. Mais c'est qu'il chante en occitan ! Les couverts se font discrets, se posent même quand le vocabulaire devient d'autant plus piquant que la langue est aussi imagée que parlante. Le plaisir des mots et celui des papilles se télescopent. Les plats refroidissent.   

 

Les Cabanes-de-Fleury lors du tournage du Petit Baigneur (1967) (diapositive de François Dedieu). 

" Touristo, touristo, daïsso ta fenno et toun argent et tu vaï t'en ! (1) " Et il le répète en plus ! A en poser sa fourchette parce qu'ils sont là, les touristes, autour, le nez dans l'assiette... Heureusement ils ne comprennent pas, d'ailleurs même d'ici on ne comprend pas tout de cet occitan châtié... Heureusement qu'avec " Touristo, touristo " pas besoin de faire un dessin, c'est du vocabulaire populaire, pour ne pas dire basique ! A mettre mal à l'aise, à moins d'être extrémiste, même si chez nous perdure un fond de contestation contre le nordiste envahisseur qui embarrasse depuis des siècles de même que la complicité de Narbonne avec les Croisés... 

Oh ! mais qui c'est cet artiste ? " La Sauze " ? un nom de guerre ? un surnom ? francisé on dirait... ça donnerait " la Sauzo ", en languedocien quoique " lou sauze ", au masculin, on connaît, dans le dicton " Un sauze fa pas un piboul " : pour dire " les chiens ne font pas des chats ! ", un saule ne fait pas un peuplier. 
" La Sauze " : difficile à articuler en français tant la tendance à dire " lou " en occitan est forte, quoique " la figuièiro ", pour le figuier, c'est féminin. 

En attendant, proche du quai, de la pêche au globe, non loin de l'embouchure par un beau soir d'été sans trop de Cers, les accords de guitare, la voix ferme et pierreuse, les accents romans de notre vieille langue ne peuvent mieux s'allier au cadre, si  languedocien, si Sud... Sûr que des touristes, désireux de compenser l'image lourde et primaire de bronze-cul de l'Europe, apprécient cette authenticité... sans qu'on doive en vouloir aux autres " Il y a le ciel, le soleil et la mer... "(François Deguelt 1932-2014).  

Rue des Barris / Fleury-d'Aude. 

Rue des Barris / Fleury-d'Aude


5 novembre 1981. Henri, "l'Henric das Barris", l'Henri du faubourg dit aussi " lou mecanicièn " de cette rue rayonnant depuis l'ancienne Porte du Cros, hors les remparts du village, Fleury-d'Aude. Célibataire, Henri enregistre des cassettes en occitan, à la radio ou de son propre chef, parfois accompagnées d'un commentaire, dont un papier sur les difficultés à faire venir la vigne : les gelées d'avril -mai " te roustissoun lous bourrés... " et ce qui survivra des bourgeons rôtis sera bien entamé par les chenilles velues " las canilhos bourreudos... " et l'oïdium, le mildiou, l'eau, la grêle, le ministre " I a que l'argen bourdel Que te fa pas la guerro... ". 
C'est joliment dit et comme l'auteur n'est pas précisé, on en arrive à penser qu'Henri pouvait être inspiré. On ferait presque erreur quand sans savoir par quel biais, un nom s'impose, Marcel Sauzel. Ah ! l'artiste qui grattait sa guitare aux Cabanes ! (à suivre)

jeudi 5 janvier 2023

LE LOTO, CHALEUR D’UN TEMPS ÉVANOUI (6)...

Sixième volet, jusqu'à présent le dernier mais c'est psychologiquement toujours aussi dur de mettre "fin" tant on espère la possibilité d'éléments supplémentaires, d'une nouvelle source.   

La preuve : le site OCCITANICA du CIRDOC nous donne encore l’occasion de prolonger...    

https://occitanica.eu/items/show/423 (Lo Lòto : recueil de mots et expressions pour animer un loto ou quine en occitan · Occitanica, Portal collectiu de la lenga e de la cultura occitanas).

A Barcelone, le « loto carton » s’appelle « quinto », à Perpignan ils participent à des « rifles » (au féminin). Ce terme « rifle » est courant aussi dans le Berry ou en Bourgogne (!).

Chez nous, ce seraient les municipalités qui auraient retiré le droit d’organiser (?? explications demandées...).

Dans nombre de départements, les préfectures autorisent les lotos entre le 1er décembre et le 1er février.

Les expressions accompagnant les numéros les désignent sans risque de confusion, c’était plus essentiel encore avant l’invention du micro, qui plus est, dans le bruit ambiant.

En habillant plaisamment la sortie des numéros, le nommeur démontrait des talents d’acteur certains ; ses reparties collaient parfois à la vie du village, souvent à l’actualité (74. La cuve à Clermont-l’Hérault, inutilisable pour la vinification suite à un nettoyage au gas-oil / 42. Allez les Verts ! / 33. Rika Zaraï dont les bains de siège prêtaient à rigoler !).

Le public aussi joue un rôle en anticipant le mot d’esprit attendu ; souvent il aiguillonne le hasard avec un « mounto lou » (monte-le) ou « vai lou quéré » (va le chercher) qui fait monter un marmonnement de dépit dans l’assemblée sinon une rumeur de répit si l’intéressé dit « brigan » ; il arrive qu’un ou une extravertie se permette de commenter « bien compté » « mon âge » ; parfois, par connivence un joueur interpelle le nommeur toujours capable d’humour dans un retour qui fait sourire tous les joueurs... Le public habituel aime (certains viennent tôt pour garder la place dans la salle où aura lieu le tirage), le changement agacerait : pour cette raison, le nommeur reste attitré jusqu’à ce qu’un jour, souvent à l’usure, il faille bien changer d’époque. 

Et pourtant les affiches étaient en français... 
Lieuran_lès_Béziers_affiche_loto_1930_-_Archives_départementales_de_l’Hérault Domaine public.

Avec un brassage des populations favorisé par l’attraction du pourtour méditerranéen, la platitude du français  vient niveler le relief, le piquant propre à notre parler occitan... ce qui est bien à l’image de la domination aussi anachronique que malsaine du pouvoir de Paris, dans l’inclination honteuse pour la gouvernance absolue, la seule en Europe en bute aux langues, au particularisme des régions, mythifiant un Napoléon comme elle le fit d’un Pétain en collusion d’avantages mal placés... dèjà à préférer une soumission dangereuse à l’homme providentiel... pardon si je m’égare, serait-ce sans prêter à conséquence. Si nos lotos survivent, qu’ils soient commentés en occitan puis en français. 

Le site Occitanica nous offre des variantes rafraîchissantes :

2 Tu e ieu (toi et moi),

4 la man del fustier (la main du menuisier), la leca (baguettes en forme de 4 qui maintiennent en l’air la pierre plate d’un piège),  

6 la rèsso (la scie d'où le rasséguet utilisé par le poudaïré lors de la taille),  

7 la dalho (la faux),

14 la flour al fusil (début de la Grande Guerre),

15 lou rugbi, lou Cantal, un talh de cantal (un morceau de cantal),

16 lous ceses (les pois chiches), passo a Bagnols (sur Cèze), ço que se manjo per Rampalms (ce qui se mange pour les Rameaux),

17 Gafa, la déportation en Tunisie du 17e d’infanterie ayant mis la crosse en l’air lors de la révolte des vignerons en 1907.

18 i a pas lou foc (il n’y a pas le feu, en rapport avec les pompiers),

21 la moustardo (de Dijon),

22 las randouletos (les hirondelles),

23 Jan lou papo (Jean XXIII),

25 Nadal (Noël),

27 la soupo de porrès (la soupe de poireaux),

28 la fièiro de Naucèlo (la foire aux bestiaux de Naucelle, en Aveyron, connue pour ses bals, suite aux ventes),

29 l’an del gros ivern (l’année du gros hiver),

30 lou bel atgé (le bel âge) lou traouc de l’amour (le trou de l’amour... peut-être une réminiscence licencieuse du Moyen-Âge),

31 Aprei l’amour, los Toulousens, las violetos,

34 Erau, Bésiérs e Mountpelhier, lous fadolis ( l’Hérault... les timbrés),

40 lou cioul de ma tanto, l’an dau gran Rosé (crue mémorable du Rhône), michanto annado (méchante année),

41 les rutabagas,

42 les topinambours,

44 las cancarinetos (les castagnettes),

45 lou pastis,

48 la Lozero (la Lozère),

51 lou pastaga,

52 BB Brigitte Bardot (son mariage avec Vadim),

55 lous tetouns, lou paradis dels omès, douple,

56 lou gran fret

58 la Constituciou,

59 Lou Nord, lou cal pas perdre (le Nord, il ne faut pas le perdre),

60 la retreto (tu entends Macron ?),

63 Giscard, Danièle Gilbert (du Puy-de-Dôme),

64 lous Bascos, m’en vau a Pau (Les Basques, je m’en vais à Pau),

65 Bernadeto, m’en vau a Tarbes (ou à Lourdes ?),

66 Lous Catalans, lou Pertùs, Perpinhia, dous culhiers dins lous linçols (deux cuillères sous les draps),

67 la choucrouto,

68 las calados (les pierres), la revoluciou,

70 se manjavo de rats (il se mangeait des rats)

74 la néu (la neige dans le Vaucluse, le Gard, l’Hérault),

75 lous Parisiens, lous envahissaïres,

78 Versalho,

79 las dous cabros (ils prenaient déjà en compte Ségolène ?)

81 bougré de Tarnagas (sacré Tarnais),

83 la marino de guerro,

84 Sul poun d’Avignoun, Miréio,

87 Lous d’Argélièrs (les 87 vignerons du départ avec Marcelin Albert en 1907),

88 las dous cacaùetos, las poupos (les cacahuètes, les seins)

La dinde ou le jambon au bout de la soirée, qui sait ? En attendant, de l’Histoire, la paillardise du Moyen-Âge, la libido des hommes, une initiation à la géographie avec toute la convivialité complice des villageois...  

vendredi 26 août 2022

Il faut savoir danser...

"Pour passer le Rhône... il faut savoir danser..." La chanson enfantine raconte-t-elle autre chose ? Toujours est-il que de part et d'autre des flots puissants du fleuve, après avoir divagué dans les montagnes avec la Durance, l'esprit se sent encore libre de danser en suivant l'ourlet des Cévennes...    

Ensuite, la plaine, l’opulence du Vaucluse, le flux tendu des vacanciers vers la Méditerranée contrastent complètement. Pourtant d’autres noms : René Char, Jean Giono, Alphonse Daudet dansent dans ma tête comme les balancelles sur les vagues d’Henri Bosco. 

Delta du Rhone wikimedia commons Photo par Aldipower / Sous l'aile de l'avion, le Petit Rhône entre la Camargue et la Petite Camargue au-delà. Plus loin les étangs de la côte montpelliéraine ; au fond l'étang de Thau : on distingue même "l'île singulière" de Sète. 

Le fleuve et son delta, la Camargue, portent les tempéraments en partage du Sud et de la Méditerranée, violemment passionnés, que les amours contrariées exacerbent. C’est le pays de Mirèio de Mistral et d’une Magali séduite par les accords d’une guitare gitane : des amours sublimées finalement si proches des scénarios des romans-photos, qui captivent même pour leurs fins tragiques.

Pour passer le Rhône il faut être deux... Allons passe passe passe, allons passe donc... Revenons en Languedoc, repassons-le fleuve. L’Ardèche, de Ferrat, des châtaigniers, de la montagne encore puisque notre Sud est riche des hauteurs du Massif-Central aussi, des contrées courues par la Burle ce vent des neiges mauvais comme le blizzard. Un camarade de classe, à l’Ecole Normale, venait, comme la Loire, d’une ferme au pied du Gerbier-de-Jonc... Des pensées qui nous ramènent au cinéma, derrière le café Mestre et le tabac Prola de madame «Zan». Ah ! Fernandel en moine dans l’Auberge Rouge !

Gard_Le_Mont_Aigoual wikimedia commons Auteur rené boulay. 

Les Cévennes, Robert Louis Stevenson dans son voyage avec un âne à travers les Cévennes ! Modestine, qui l’accompagnait, dans le titre même de l’ouvrage, de ces animaux fidèles qui ont tant aidé à sortir les humains de la survie. Et ce prénom ! Adeline, Pauline, Joséphine, Céline, Ernestine, mes aïeules, directes ou non, ne m’en voudront pas d’associer Modestine à la grande tendresse qu’il me reste d’elles. C’est que les ânes aussi, reviennent dans ce large panorama, comme quelques notes d’une ritournelle (« Je connais une histoire... Hugues Aufray) sur un monde perdu même si les Cadichon, ,jadis compagnons de travail, vivent aujourd’hui seulement pour être aimés ou apporter dans la zoothérapie. Les Cévennes mythiques aux limites incertaines suivant les époques, jusqu’à désigner toute la bordure est du Massif Central pratiquement jusqu’au Morvan. Cévennes du mûrier et du ver à soie, Cévennes des Camisards, en butte aux dragonnades par la volonté d’un roi trop catholique, persécutés, en écho, plus au sud, aux Cathares éradiqués quelques siècles auparavant. Cévennes des mines de charbon... Cévennes sévères de Jean Carrière, auteur nîmois ("L'épervier de Maheux", "La caverne des pestiférés"). Cévennes d’André Chamson... « Cévennes », le nom de guerre de Jean Guéhenno... En suivant, ces montagnes ourlent aussi les Causses ; c’est souvent le rugby qui a contribué à nous éveiller à toutes les nuances de relief, de climat, de végétation, de cultures qui brident et modèlent les modes de vie. Suivre nos bleus et noir, au rugby. Accéder au Larzac en laissant un cirque du Bout du Monde à droite. Évaluer le printemps qui tarde par rapport à la plaine. Réciter «Lou pastre» d’Antoni Roux avec la consolation de voir la langue occitane respirer encore puisqu’elle figurait en option au baccalauréat et qu’elle grave dans la mémoire la grande humanité d’un professeur, monsieur Couderc... « Gardaren lou Larzac » contre un camp militaire qui envahit comme le firent les dragons du Roy ou les barons du Nord ! Les Causses, grands ou petits, Larzac, Sauveterre, Méjean, Rouge, Noir, de Campestre, de Blandas... Que n’irais-je revoir la grotte des Demoiselles, le cirque de Navacelles, les gorges de la Vis, de l’Hérault ? Et voir une fois dans la vie les pivoines de la Buège ?  A découvrir aussi, en poursuivant au-delà des ruffes rouges du Salagou, du cirque de Mourèze, des hauteurs de Pézènes-les-Mines où naît la Peyne, la rivière de Pézenas, la haute vallée de l’Orb. Les coulées stromboliennes qui ont rempli les sillons forment le plateau de l’Escandorgue depuis le Larzac jusqu’en bas, au pays de Michel Galabru.  des envies de découvertes tant notre territoire est riche de ses diversités ? Les Monts d’Orb couverts de forêts et où, comme dans le bassin minier d’Alès, on extrayait le charbon. En haut des Monts-d’Orb, parfois à près de 1300 mètres d’altitude, les Monts de Lacaune, ses lacs, sa charcuterie, ses eaux minérales (La Salvetat-s-Agout... et ses champignons). Un peu moins haut mais ligne de partage des eaux vers l’Atlantique ou la Méditerranée, les Monts de l’Espinouse, le Caroux, les Monts du Somail.  

Vieussan,l'Orb et la Caroux au fond wikimedia commons Auteur Christian Ferrer