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mardi 19 mars 2024

Pas un CASSOULET de MOUNJETOS ! Paul SIBRA (1).

Merci à mes aimables et non moins honorables correspondants “ facebouquins ” qui tournent nos pages et inspirent plus souvent qu'ils ne croient. Voyez Alain, Bob, Max et Henry, toujours en quête de petits plus internet, mais aux lignes de force, à la conscience marquées. Sinon Bettina, éclectique, passant sans transition des nourritures célestes aux terrestres, nous présenta un jour le plat emblématique du Lauragais vu par Paul Sibra, à savoir « La Porteuse de Cassoulet » (voir sur escapetdecouv.com)...

Surnommé “ le peintre du Lauragais ”, Paul Sibra (1889-1951) est un artiste classé régionaliste, auteur de scènes religieuses, campagnardes, de portraits aussi, de gens, de métiers, de villages... 

D'une famille aisée (ses parents sont propriétaires des « Dames de France »), grâce à son professeur Pierre Thalabas, il prend goût au dessin « Étant enfant, j'aimais crayonner des dessins... ». 
Suite à des études de Droit et à un séjour à Paris en tant qu'avocat-stagiaire, de 1912 à la guerre, il entre dans la réputée Académie Julian ; il y suit le cours de Jean-Paul Laurens (1), peintre d'Histoire et du Lauragais comme lui. 

Paul Sibra, Mémorial_aux_anciens_élèves_et_instituteurs_de l'école Prosper Estieu morts pour la France,1921, détail Author Widlauragais

Après sa période militaire (deux ans à partir de 1905), il est marqué par la Grande Guerre : les tranchées, les blessés, les morts, la campagne dévastée, les villes, les cathédrales bombardées. À Castelnaudary, dès septembre 1921, sous la direction du directeur de l'école de l'Ouest, Émile Cantier qui déjà en 1915, rassemblait les photos des premiers morts de la guerre, pour le premier Monument aux Morts du pays, avec Pierre Thalabas, ils sont chargés de peindre un mémorial solennel de trois fresques (« Le Front à Reims », « La Bataille des Flandres » de 4,35 x 1,85 m. ainsi qu'une rosace au plafond « La Victoire avec le clairon du 143e Régiment d'Infanterie de Castenaudary » / l'ensemble a été réhabilité en 2011). Ne pas oublier les 126 anciens élèves et les trois instituteurs tombés pour la patrie !  

Vue de Sidi-Bou-Saïd - 1920 - Paul Sibra, Musée des Beaux-Arts de Narbonne

Portrait de l'évêque Jean-Joseph Pays Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Notre-Dame-de-l'abbaye, Carcassonne

Autre facette du personnage : dès 1927 il suit les cours d'occitan de Prosper Estieu (1860-1939) et de l'abbé Joseph Salvat (1889-1972, connu pour ses sermons), au Collège Occitan qu'ils viennent de créer. Sibra a de qui tenir, Auguste Fourès “ le félibre rouge ” étant un cousin de sa mère, et surtout, son grand-père maternel, Joseph Dupuy (1837-1916), poète aussi, médaillé aux Jeux Floraux de 1909, qui lui inspirera « l'amour des choses du Pays d'Oc ». 
Ces années 20 le voient s'adonner à l'orientalisme (il voyage en Tunisie) et aux représentations religieuses (“ La Voix de la France ”1924 : évocation d'une France rurale sur laquelle veille Jeanne-d'Arc [Pin on Art (pinterest.jp)], “ Saint-François prêchant aux oiseaux” 1924. Voyage aussi, en Italie, sur les pas de Saint Dominique (“ saint ”pour ceux qui légalisent la dite “ sainte ” inquisition contre le catharisme... ). 

Paul Sibra, Le_Lauragais 1929 Domaine public Photo Tylwyth Eldar

Le Lauragais détail

Le Lauragais détail

Dès la fin des années 20, bien que parisien pour la reconnaissance de son art, il va témoigner de son attachement au pays natal, de son respect pour le monde paysan. Avec « Le Lauragais » sa grande toile (2 x 2 m.) allégorique figurant, avec le blé des semailles au dépiquage, la mère donnant le sein, la terre nourricière, nous reconnaissons le cours arboré du Canal du Midi, les fermes, les moulins, un clocher-mur, au fond. Il va faire les portraits des villages, peindre les bouviers, les petits pâtres, les bœufs au travail, par paires, une inspiration de grande valeur ethnographique avant l'avènement du mécanisme agricole. (à suivre) 

(1) auteur des décorations du plafond du Théâtre de l’Odéon en 1888, du Salon Lobau de l’Hôtel de Ville de Paris en 1889, de la décoration  « Le Lauraguais » de la Salle des Illustres du Capitole de Toulouse en 1892, de « La Fondation des Jeux Floraux » décorant l’escalier d’honneur du Capitole (1912). 

Sources principales : Wikipedia ainsi que Garae, en charge de la diffusion de la revue Folklore-Aude. 
Sur le site “ Garae ethnôpole ”, sous la plume de Florence Galli-Dupis, ingénieur CNRS, une biographie essentielle, illustrée (dont un portrait avenant du peintre) Dessiner la tradition : Paul Sibra (1889-1951) et le Lauragais - Garae. Il y est précisé que Paul Sibra figure dans le numéro 1 de la revue saisonnière, au titre de vice-président de « Folklore », représentant de l'arrondissement de Castelnaudary. Si ses « études de Folklore » auraient pu figurer dans bien des articles, on ne le retrouve qu'une seule fois, pour ses dessins du costume narbonnais dans un article d'Anne-Marie Ponrouch-Petit, depuis le moulin de Saint-Nazaire-d'Aude « Quelques notes sur le costume traditionnel féminin au pays Narbonnais » (Folklore n°6, août 1938, p. 89-92) (inclus, de Clovis Roques, notre voisin sallois « La derastoulhado » un article dans un occitan si recherché en vocabulaire qu'il me fait instantanément éprouver la distance entre  la richesse de la langue et le pauvre amour qui me reste pour le languedocien usuel de mes grands-parents paternels...). 



dimanche 21 août 2022

La GEOGRAPHIE modèle les HOMMES.

Juste une poignée (18 août 2022)

Vision depuis l'embouchure de l'Aude ; fin de ce panorama en partant des Pyrénées plongeant dans la mer, avec le Lauragais et le Tarn, avant le demi-tour vers le sud pour cette pêche aux tenilles... alors les pensées et l'imaginaire se tournent vers le nord du Golfe, la Provence, son haut-pays et au-delà...  

Saint-Felix-Lauragais wikimedia commons Auteur Asabengurtza

Le Lauragais de la polyculture, des volailles de grain, d’une humanité paysanne des années (50-60) si bien retracée par Sébastien Saffon (roman "Ceux de la borde perdue"). Loraguès aussi d’un cassoulet historique à Castelnaudary. Seuil de Naurouze, pays de cocagne pour le pastel où les moulins tournaient au vent marin devenu d’autan à l’intérieur des terres... Les rigoles de la Montagne Noire qui alimentent le Canal du Midi.

Ce tour d’horizon se termine avec le Tarn « en haut », la vallée du Thoré pour ses laines et le cuir, Mazamet connue internationalement pour sa renommée industrielle et Laurent Jalabert, champion cycliste... Castres pour son rugby et Jaurès, Lautrec, un patronyme que nous retrouverons, plus proche de notre village et là-bas pour un ail rose si doux en bouche.

Libre de plonger dans un panorama sans fond, dans de l’eau pourtant peu profonde, c’est inouï d’être ainsi emporté dans une exploration à côté, plus pittoresque et enrichissante qu’une vacuité de plage à cocotiers... non, je suis partial : à Mayotte aussi une culture ancienne est plus que respectable... " Chaque homme est une histoire universelle " disait Jules Michelet !

Comme le cheval dans la vigne, à un moment donné, au bout de la rangée, il faut tourner dans l’autre sens, surtout si l’instinct dit de revenir sur un possible banc de coquilles, reprendre le piétinement, s’aider de lents zigs et zags pour soulager les reins attelés à la lame qui fait geindre le sable. Tourner le dos aux Pyrénées bleues, au voyage en Espagne. 

Vers un nord toujours du Midi, quelque part à tribord, ce sont les collines de Pagnol, si cousines, par la géologie, par nature, de notre Clape. Avec la Provence, l’occitan vient, de son accent, de ses consonances, confluer avec la langue française même si le mariage entre la Durance et le Rhône n’a pas tenu, à cause des humains, pour l’économie mettant à mal la géographie (détournement des eaux), pour l’ethnocentrisme du français, langue du Jacobin dominant (qu’en est-il, chez nous encore, du romand dit francoprovençal ?). Et pourtant, ce n’est pas une ligne de crête des Alpes, montagne si présente pour l’Europe jusqu’aux Carpates de même nature, qui couperait l’entité occitane puisque la langue est officielle sur l'autre versant, dans les vallées italiennes !

Comme en pendant à l’Espagne, le cousinage avec l’Italie, le brassage avec l’immigration aussi, jusque chez nous bien que plus marqué de l’autre côté du Rhône, au point de figurer dans la littérature, la filmographie, je pense à Manon et aux charbonniers de Jean de Florette ; à Nice, les réseaux sociaux n’ayant pas que du mauvais, Bébert de Garibaldi, par ses dialogues avec sa mémé fait beaucoup pour garder un parler niçard qui nous reste familier !

Et ce cinéma italien, aussi proche des méridionaux qu’il est distant avec l’Europe nordiste ! Le Voleur de bicyclette ou la Strada d’un néoréalisme touché par la vie difficile des pauvres, à la télé, parce qu’au cinéma la programmation préférait  divertir avec les peplums et les westerns-spaghettis. 

La Durance vers Oraison wikimedia commons Auteur Wikicecilia

Pour passer en Italie, sur la route, Manosque de Jean Giono, Sisteron de Paul Arène... Le barrage de Serre-Ponçon (1), Briançon... Il est intéressant de constater que le Sud qui nous anime ne se limite pas à la façade méditerranéenne, Après les Pyrénées, les Alpes, pour Emilie Carles, Marcel Scipion et toujours la Durance descendant de là-haut.  05 Hautes-Alpes, 04, Alpes-de-Haute-Provence, oh la jolie appellation qu’on dit devoir à Jean Giono de Manosque. «L’eau vive», le film, on lui doit aussi. Comment ne pas se surprendre à fredonner «Ma petite est comme l’eau...» mise en musique et en chanson par Guy Béart. Comme la Durance « domptée » est emblématique des hommes triturant la nature à leur profit. En rejoignant Nyons par l’ancienne nationale venant de Gap, serait-ce en passant par la Drôme provençale, l’eau vive de l’Eygues fredonne de même en moi... 

(1) après une longue sécheresse, le lac a enfin vu son niveau au plus bas remonter de 20 centimètres (août 2022). 

lundi 28 mars 2016

NON, NON, NON, NON, IL N'EST PAS MORT CAR IL SOUFFLE ENCORE ! (bis) / Fleury d'Aude en Languedoc


Suite aux articles « QUI TROUVE LE CERS PERD LA TRAMONTANE... I & II d’octobre 2013, la défense de l’identité audoise impose d’exposer, au fur et à mesure qu’ils la confortent, les arguments contre une globalisation détestable parce que le consumérisme intéressé qu’elle impose va de pair avec le dénigrement du particularisme culturel.
Plutôt que d’alimenter en commentaires les articles concernés (accessibles d’un clic sur les liens ci-joints), un extrait de la REVUE FOLKLORE 1972.
https://www.facebook.com/fleuryaudelanguedoc/posts/692089987470599:0
https://www.facebook.com/fleuryaudelanguedoc/posts/696016180411313:0
Sous la plume de P. Andrieu-Barthe, à propos des vents de l’Aude en aval de Carcassonne, nous pouvons lire :
 

* «...un vaste couloir où les vents acquièrent la vitesse de courants d’air...» définissant, vers le Lauragais, la plaine minervoise qui se resserre entre la Montagne Noire et les Corbières.
 

** «.../... Le rival du Marin est le Cers.../... que les Romains, par crainte, déifièrent.../... Dans la plaine Minervoise toute habitation comporte une orientation, une muraille ou une haie de cyprès pour se défendre du côté du Cers et non du Marin... ».
 

*** «.../... Après la Toussaint s’installe habituellement une période de marin froid. Le Cers glacé règne ensuite en hiver et surtout au printemps où il effeuille impitoyablement les pétales des précoces amandiers, mais durant l’été, il tempère agréablement la chaleur, caressant et léger...».
 

**** «.../... La Tramontane reste localisée en Roussillon. Il faut arriver à Montpellier pour entendre parler du Mistral... »
 

***** «.../... Détestés des étrangers venant de pays plus calmes et qu’ils tourmentent, ils sont familiers aux autochtones qui, en fulminant sans cesse contre eux, ne peuvent s’en passer. S’ils viennent à se calmer, on entend dire : "On ne respire pas, il n’y a pas d’air" ou, dans le cas contraire : "Il fait bon, il fait de l'air".

diapo François Dedieu vignes et pins à l'automne. 

vendredi 25 décembre 2015

EN LAURAGAIS, DES SOUVENIRS AUSSI PRÉCIS QUE PRÉCIEUX... / Noël en famille.


EN LAURAGAIS, DES SOUVENIRS AUSSI PRÉCIS QUE PRÉCIEUX...
Né au Mas Saintes Puelles le 22 juillet 1923, Alfred Cazeneuve a passé son enfance dans ce village du Lauragais audois, entre Castelnaudary et le Seuil de Naurouze. Dans "Le Goût de la Vie dans le Lauragais d’Autrefois" (La Gouttière, mars 2005), il raconte la fête de Noël vers 1930 avec un père Noël s’émancipant de la religion omnipotente, une autre idée de la bûche, une vision arrêtée du réveillon. Extraits :
    « .../... Des santons, beaucoup de papier multicolore plantant le décor, des anges, statuettes dont l’une avait la tête articulée et qui semblait dire merci quand une pièce de monnaie était glissée dedans. Je me souviens avoir mis, tout gosse, des pièces dans cet "ange". L’abbé Rieux nous avait distribué, une fois, une pièce de deux sous au cours du catéchisme et nous avait accompagné à la crèche pour la remettre à l’ange. Il était sûr de récupérer l’argent à la sortie !... /...
    Les gens avaient veillé, même les enfants ; ils avaient passé la veillée de Noël au coin de l’âtre. On avait mis dans la cheminée la bûche de Noël, une grosse bûche qui devait durer jusqu’à minuit. Avant le départ à la messe, on éteignait le foyer, une étincelle pouvant provoquer un incendie, mais on gardait un bout de tison consumé. Pourquoi ? Certaines croyances voulaient qu’on glisse le tison sous le lit de la parturiente afin que l’accouchement se passe bien.../...
    Le Père Noël allait passer dans la nuit. Les sabots astiqués et cirés étaient alignés devant la cheminée. En rentrant dans la nuit du Loto, le père les garnissait d’un paquet de bonbons, et d’un petit sabot en chocolat dans lequel un petit Jésus tout rosé trônait. Peu de jouets chez les gens modestes : quelquefois un vêtement, des sabots, mais toujours le paquet de bonbons contenant des dragées, des fondants, des pralines. Je n’ai jamais entendu parler de réveillon ! La crèche restait encore quelques jours dans la chapelle, puis, on rangeait les santons pour l’année prochaine.../... »

    Alfred Cazeneuve mentionne aussi un LOTO presque rituel dans les années trente et tel que nous l’avons connu il y a peu encore. Or le nom même de LOTO semble avoir disparu du vocabulaire sans qu’on s’en aperçoive, comme, entre parenthèses, les 40 % des passereaux de nos campagnes... Et parce qu’on se sent bête de n’en rien savoir depuis des mois et des mois, ça fout un coup sur le coupet (occiput, nuque en languedocien) ! J’ai cru un instant que nous en étions plus coupables, à Fleury, où les publications mensuelles font seulement état de « loteries familiales » peut-être réservées aux seuls adhérents d’associations. En fait, la nouvelle appellation, loin de répondre à un effet de mode, semble seulement découler de la législation. Nous la devons à des parlementaires certainement plus vertueux s’agissant du contrôle des bénéfices générés par les lotos que pour l’utilisation très opaque des 500 millions que l’Assemblée s’alloue elle-même avec la loi de finances ! Et comme, sans parler du Médiator et du sang contaminé, nos chers élus se soucient tant de notre santé, les grains de maïs pour marquer sont aussi interdits, des fois qu’ils nous inoculeraient la grippe aviaire !

    Manière de ne pas gâcher la fête avec ces signes de démocratie confisquée, je voulais prendre congé en vous laissant le lien « Couleur Lauragais » pour ce que je n’ai pas repris des écrits d’Alfred Cazeneuve (http://www.couleur-lauragais.fr/pages/journaux/2007/cl98/histoire.html), quand le moteur de recherche m’a mis sous les yeux : http://www.ladepeche.fr/article/2010/09/22/911451-mas-saintes-puelles-un-paysan-poete-nous-a-quittes.html.
    Et moi qui ai raccroché suite à un message de répondeur incompréhensible, pas plus tard qu’hier, alors que je voulais le remercier, demander la permission pour des extraits et souhaiter un bon Noël. Je me suis senti d’autant plus bête qu’un site permet toujours de lui commander ses livres... Et puis je n’avais pu m’empêcher un parallèle avec papa, parce qu’Alfred Cazeneuve suivait, à un an près, parce que les témoignages de cette génération sont des plus précieux et qu’il faudrait être superficiel ou très inconscient pour ne pas trouver leurs capacités admirables et passer à côté de ce que leur expérience liée à une belle mémoire peut nous transmettre.   L’Internet est une belle machine qu’il ne faut pas remettre en question. Il n’empêche, ça fout un còp sur lou coupet !


Photo Commons Wikipedia : village du Lauragais (Saint-Félix) sur fond de Pyrénées / Didier Descouens. Et 2 auteur Asabengurtza.