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lundi 6 mars 2017

LE MONDE NE DEVRAIT ÊTRE QUE CHANSON ET MUSIQUE... (2) / ratés existentiels

 VOYAGE DES 1 & 2 mars 2017


Impressionnante l’arrivée sur Amsterdam : des bateaux de haute mer à la queue-leu-leu pour remonter un de ces canaux aménagés qui, avec les bras innombrables de son delta font et défont, avant ses noces avec la Mer, la grandeur du Rhin. En face, de lourdes péniches. L’une d’elles vire vers le bord : le sillage le prouve. Faut dire qu’en face il fait son poids et ne semble pas disposé à ralentir. Où sont les troquets sur les berges, où les marins d’Amsterdam buvaient «... aux dames qui leur donnent leur joli corps...» (Brel) (1) ? On se laisserait aller avec le fleuve si le tunnel qui fait passer l’autoroute sous les gros bateaux ne rappelait l’énergie d’un peuple contre le harcèlement des eaux venues du sud butant contre la marée et les vagues de la Mer du Nord. 


Il a réussi un appel vidéo avec les siens. Après les banalités d’usage, il réalise qu’un certain voyage se matérialise par un changement de lieu : c’est ainsi que son père (2) s’est retrouvé sur las rajolos. Et dire qu’il a eu réclamé, et pas qu’une fois « Je veux aller par terre ! ». Et à voir sa mine réjouie, il est vraiment content d’avoir joué ce tour à ses proches et soignants ! « Y sios anat al décrochez-moi-ça !» (3) qu’il lui a dit, manière de rappeler un bon mot bien de son village. Tant pis si les pompiers ont foutu le rambal (du tapage) dans la rue avec la sirène (4) ! 
 Le voyage avant tout, c’est dans la tête.

Autre signe de bon augure, alors que l’avion, en plus des longues heures d’attente, des contrariétés habituelles dues aux retards et au cynisme commercial des compagnies, aux bagages perdus, cette fois c’est le 787 Dreamliner de Kenya et pas la grosse bétaillère de KLM... Vrai qu’elles ont toutes un air de fermières du temps de l'exode rural... les rombières bataves. Sa place est tout au fond. Personne à côté quand les portes se ferment. Sur le troisième siège un vieux monsieur maigre, fripé, petit, la personne à côté de laquelle on se se fait l’effet d’un Apollon. Sur son écran, il a mis les indications en français. Salutations. 

De nationalité belge revendiquée, pour se démarquer des Français. Il va à Nosy-Bé où il est marié. Il vient de passer quelques mois en Europe pour se faire soigner « Ça va mais il fallait bien... on verra pour la suite...» ajoute-t-il. Il poursuit « Je suis bien, pas loin de la plage et la belle-mère a les pieds dans l’eau... La vie est un peu plus chère dans l'île, rapport au nombre d'Européens mais nous sommes pas à plaindre... Je ne pourrais plus vivre avec une Blanche... Mais nous n’avons pas d’enfant... si tu en veux un que je lui ai dit, fais-le avec un Malgache parce qu’un métis ici est embêté tant tout le monde croit qu’il est riche... ». Mais quand il a dit son âge, 70 ans, ça l’a interpellé... a quatre ans près, il ne se voit pas aussi vieux. C’est qu’on lui donne facilement 85 ans ! 

Et pendant ce temps il tripote sa télécommande, l’écran tactile. Depuis quelque temps, il fait sans, les films, finalement... mais cette fois il a un besoin vital de musique, bien rythmée, n’engendrant pas la mélancolie, que les larmes lui viennent facilement aux yeux « C’est pas moi qui pleure, c’est mes yeux !» dit Galinette - Daniel Auteuil dans L’Eau des Collines de Pagnol. A l’aéroport il a trouvé « Tengo una camisa negra » (5), ce qu’il lui fallait, à passer et repasser en boucle manière de réviser un peu le castillan. Et en entrant dans l'avion, pas mal déjà, la musique d'ambiance... 

(1) https://www.youtube.com/watch?v=REKfgS1_A5I
(2) hémiplégique suite à un avc le 6 novembre dernier / « rajolo » au sens de brique dans l’Aude (Mistral, trésor du Félibrige), les tommettes de terre vernissée peut-être...
(3) attaque d’une mégère soupçonnant le mari d’être allé aux filles de joie et  venue l’interpeller au café devant tous les hommes présents. 
(4)  https://www.youtube.com/watch?v=SiIeI_iXu7o
(5) https://www.youtube.com/watch?v=kvEvATBiQ5U

samedi 4 mars 2017

LE MONDE NE DEVRAIT ÊTRE QUE CHANSON ET MUSIQUE... / ratés existentiels

VOYAGE DES 1 & 2 mars 2017

Entre ce qu’il peut ou ne pas dire, un moment fort avec en fond le sens de la vie, ce qui a été et qui ne peut plus être, une certaine permanence pour ses parents, ses enfants, la fragilité dans le temps pour la ou les femmes qu’il aime, celles qu’il a aimées, celles à côté desquelles il est passé, celles qui croisent encore sa route parce que son cœur reste jeune, serait-il tarabusté par la verdeur qui se fane... Merci, amis inconnus, de "l"’accompagner dans le voyage... c’est un essai... c’est plus facile d’écrire sur les autres et "il" hésite trop au point de ne vouloir l’écrire que pour lui... 


Tous ces amandiers fleuris qui marquent les talus ! Magnifique ! Entre le train en gare de Béziers à 11h 20, le billet de tram à prendre 1,60€, il arrive Place de l’Europe en même temps que la navette pour l’aéroport. A l’aller il avait apprécié l’amabilité du chauffeur. Cela se confirme alors qu’il se demande pourquoi à son volant il lui fait signe et stoppe la navette vingt bons mètres avant l’arrêt. « Je vous ai vu chargé, passez les valises par la double-porte au milieu ! » et avec le sourire en prime ! Hasard ou politique maison ? C’est appréciable en tous cas. Il  est passé devant tout le monde... c’est si idiot de faire ça sciemment... 
A l’aéroport, peu de monde à l’enregistrement, la petite vingtaine du bus. Pas besoin de sortir la carte d’embarquement téléchargée, le passeport joue les sésames. La conversation s’engage même avec l’hôtesse curieuse de savoir où il va :
« Que signifie le «DZA» de votre destination ? »
- Dzaoudzi à Mayotte...
- Je suis impardonnable, j’y ai été ! »
Ils vont même parler des problèmes de l’île : il n’y a personne derrière. Grâce à l’internet on peut choisir sa ou ses places. Pour le vol à travers l’Afrique il a pris la 36 D complètement au fond. Besoin de se mettre en retrait, tenter de faire le point, blackboulé entre un passé fermé, un futur étriqué, des amours mortes qui pourraient renaître, ou ressuscitées qui pourraient remourir, ou vivantes ou qui n’en ont que l’air, autant de constructions mentales peu, mal partagées, ou trop bien, ce qui n’est pas mieux. Plus abrupts mais plus mesurables, les sentiments filiaux ou paternels pour des parents qu’il faut quitter, un fils qu’il veut retrouver. L’analyse est dure et quand sa difficulté dissuade, sa « camisa negra (1) » chante ses amours dans sa tête, sentiments et attraits physiques mêlés, avant que les devoirs, naturels sinon sociétaux, ne reprennent le dessus.   
Dans le KLM, un Airbus il ne sait plus quel chiffre, la présence des passagers est contrôlée par tablette. Un jeune a perdu sa carte et le personnel de cabine tient à mettre chacun à sa place. Un que je connais trop bien dit sans détour que le fond de l’appareil est vide. La rombière en uniforme bleu barbeau (les bleuets de la Clape sont plus bleus !) répond qu’on verra après. Je suppose que c’est pour ne pas salir et ne pas impacter le service. 
Décollage vers les Cévennes. Vent peu établi, peut-être d'Espagne : au sud de l’Étang de l'Or, les flamants se tiennent contre les sénils. 


Petite crêpe salée fourrée, variante d’un sandwich venu d’ailleurs. Très bonne à son avis. Une Heineken, d’origine. 


A part le Ventoux et une ligne imprécise de la chaîne alpine enneigée, plus rien de visible avant la descente au-dessus de la Mer du Nord. Plages des Flandres avec des maisons juste derrière une ligne de dunes si fragiles vues d’en haut. « Ay Marieke, Marieke je t’aimais tant... (2)» chantait Brel avec qui j’imagine les blés, bleuets et coquelicots de son plat pays :
«... Zonder liefde warme liefde – / Weent de zee de grijze zee –
Sans amour la chaleur de l’amour / Se lasse la mer la grise mer...»

(1) https://www.youtube.com/watch?v=kvEvATBiQ5U
(2) https://www.youtube.com/watch?v=jalwU5D8Kag

crédit photos : 3. Flamants roses avec La Grande-Motte au fond. Auteur probable Fred.th
4. De Panne, la plage par un beau jour d'hiver, auteur MJJR.