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mardi 1 août 2023

L'ANGLAIS (fin)

Charles_de_Gaulle_au_micro_de_la_BBC Domaine Public. Auteur inconnu

Voilà ce que nous coûtent ces hommes dits providentiels... Seul De Gaulle fait exception, lui reprocherait-on le « je vous ai compris » sur la Guerre d’Algérie... mais pouvait-il en aller autrement avec une situation dont il héritait ?   

Faire la guerre à tout le monde ne peut que mener à la catastrophe et sur terre, les Anglais assurés de leur suprématie maritime, ont toujours bénéficié de coalitions contre la France révolutionnaire puis Napoléon, toujours isolés. L’Anglais, coupable d’une mise en coupe réglée du monde, tout comme le Français, l’Espagnol, le Portugais, le Néerlandais, l’Étasunien, dans une disposition naturelle à coloniser... Que dire d’Homo Sapiens dans son rapport à Néanderthal ? Et les Bantous, manière de répondre aux Africains si prompts à stigmatiser les colonialismes, ne sont-ils pas partis du Golfe de Guinée pour essaimer jusqu’en Afrique-du-Sud ? 

Winston_Churchill_at_a_conference_in_Quebec 1943 Domaine Public National Archives and records Administration

Reprocherait-on aux Anglais de ne pas avoir écouté Churchill, d’avoir ressenti, tout comme les Étasuniens au contraire une inclination pour Guillaume II puis Hitler, à cause d’un vieux sentiment anglo-saxon partagé, chapeau quand même ! Force est de le reconnaître et dans notre déveine complète, lorsque nous sommes alliés, c’est eux qu’il faut suivre pour que Chamberlain puisse faire passer les accords de Münich pour un succès... Perfide Albion ? Ou frustration de notre part nordique trop mâtinée de sudisme : les grands racistes fascisants comme Renan, Michelet, Méry, Céline, Derrida (cela remonte bien à la IIIe République)... regrettant d’être catalogués dans les Latins, ces pays méditerranéens abâtardis ?

Les rosbifs ? de Gaulle quelque peu ingrat bien que foncièrement réaliste, ne les voulait pas au sein de la CEE.

Au chapitre tourisme, plus rares qu’aujourd’hui et dans les années 50-60, que les Allemands, les Hollandais ou encore les Belges, ils emmenaient leur nourriture pour ne rien acheter, disait-on. Si nous avions les phares jaunes, eux les avaient orange ! Qui s’en souvient ? À présent ils se font discrets tout en occupant une part non négligeable de nos campagnes, dans les Corbières notamment... où d’Européens ils sont passés au statut d’étrangers, ce qui ne va pas sans difficultés...

Suite au Brexit, l’hôpital se moquant de la charité, on ricane sous cape de leurs difficultés... Les merdias voudraient nous persuader qu’ils ne sont plus rien, seulement des vassaux des Étasuniens... Et nous on a un président des déficits exponentiels, un « après moi le déluge » qui s’est autorisé parce qu’il a réussi à entraîner Van der Leyen en Chine, à prétendre que l’Europe n’a pas à faire de suivisme concernant Taiwan. Juste pour se faire mal voir... l’essentiel étant de favoriser le business en mettant de côté l’État policier chinois, la main-mise du parti, l’autoritarisme du premier dirigeant, la soumission des entrepreneurs libres néanmoins de s’enrichir... Notre roitelet n’en est pas à une gaffe près et comme il ne peut postuler pour un troisième mandat (quelle marionnette nouvelle les puissances d’argent vont-elles pouvoir promouvoir à sa place ?), alors que cela ne lui aurait pas déplu de faire un peu comme Poutine, c’est sûr qu’il va se placer pour un destin européen... ou attendre 2032... mais ce n’est qu’un point de vue alors qu’en partant de Sète, je me suis pris pour l’analyste politique que je ne suis pas... Un Sétois célèbre, Paul Valéry, était au fait de l’Histoire manipulée pour droguer les consciences, instiller de faux souvenirs, faire naître des folies de grandeurs et saluer d’un seul élan éthylique Mussolini, Franco, Hitler ou Putain au balcon, sur l’estrade, haranguant une foule par définition dans un état second...

Bien Français en cela, du dénigrement des Anglais jusque pour le rugby, j’en suis venu à l’estime pour ce peuple plus solidement ancré et solidaire dans ce qu’il est et représente, que nous...  Finalement nos piques ne traduisent que le dépit du faible au fort : cette réalité est sous-jacente lorsque Liz Truss en était arrivée à refuser de dire si Macron était ami ou ennemi. Quelle idée aussi de parler d’amitié en politique, chaque pays regardant ses intérêts (de Gaulle l’avait noté). Croyez-vous que Scholz soit un « ami » de la France ? Dans ce cas, la définition de facebook suffit : un « ami » n’est que quelqu’un à qui nous prêtons attention... je vous laisse compléter... Dans les relations de pays à pays, restons-en au terme « allié » qui nous sort d’un embarras certain...  L’Allemagne n’a jamais eu à la bouche l’expression « couple franco-allemand » : encore une preuve de notre faiblesse séculaire... je vous laisse prolonger ou contester sinon les deux...   

jeudi 15 juin 2023

SÈTE 4. Pêche, migrations et capitalisme...

Robert_Mols_-_port_de_Sète 1891 domaine public musée Paul Valéry. 

Sète, un Languedoc maritime, mâtiné de Catalogne, de Campanie jusqu’en Calabre, Sète, port de pêche. Si, localement, l’activité concernait l’Étang, avec les Catalans d’abord, puis les Italiens, elle s’est tournée vers la mer. Encore au début du siècle passé, les Sétois originaires d’Italie faisaient construire à Agde des dizaines de bateaux-bœufs ainsi nommés parce qu’ils tiraient le filet comme les bœufs tiraient la charrue. Sauf que cette technique prévoit que le second fait la vache, pour dire qu’il ne bénéficie pas du partage de la pêche, à charge, la fois d’après, d’inverser les rôles, exception faite de la semaine sainte où tout le monde a besoin d’argent frais pour fêter Pâques. Même au port, coques alignées, rangées, quel bel ensemble ces voiles carguées sur les antennes ! Au point que Paul Valéry, le penseur qui ne se voulait pas philosophe, d’habitude plus compliqué, avait revendiqué la beauté des voiles de Sète ! (si quelqu’un me retrouve cette citation, je suis preneur !) Et cette antenne ! vingt-deux, vingt-quatre mètres de longueur... imaginons le mousse chargé d’y grimper ! D’ailleurs on le voit sur le détail d’une marine « Le Port de Sète », du peintre Mols. Autre détail : les filets hissés en haut du mât ! Superstition ou simple prévention contre les vols ?

Ces immigrés particuliers (beaucoup, dans l’agriculture, les forêts, sont longtemps venus du Nord de l’Italie) nous les retrouvons, par exemple, à la tête de chantiers de construction maritime ou comme patrons de bateaux, des « dynasties » toujours à la barre. Pêcheurs, ils sont originaires de Cetara dans le Golfe de Salerne. A partir de 1850, comme à Sérignan, ceux de Cetraro (Calabre), à Frontignan, ceux de Gaete (golfe au nord de Naples). Par les lettres au pays puis le bouche à oreille, ils seraient partis parce qu’il n’y avait plus chez eux, ni sel ni anchois, le long de cette côte au Sud de Rome. Ce sont eux qui ont impulsé la pêche en mer, les locaux démontrant moins de courage ou se révélant plus terrestres que marins, moins aguerris, disposés seulement à exploiter la lagune du Thau et plus haut le long du golfe, la gourmette d’étangs jusqu’à Aigues-Mortes. 

Depuis, prenant le pas sur Agde, Sète reste notre plus important port de pêche sur la Méditerranée. Dans les années 60, ce sont les rapatriés d’Algérie, souvent arrivés sur leurs propres bâtiments, qui ont apporté du sang nouveau. 

Sète chalutiers et thoniers Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Christian Ferrer


A voir les belles unités flambant neuves, alignées le long du quai, le polyester immaculé à la place de l’acier qui lui-même avait repoussé les coques en bois, une génération de plus en arrière, nous n’allons pas regretter les voiles pittoresques appréciées de Valéry, le ravaudeur de filets sur le quai qui chante si bien l’Italie (si, si ce n’est pas une carte postale, j’en ai été témoin), une belle voix qui doit faire le bonheur des tablées de fêtes. Non, nous n’allons pas fondre en commisération à la vue du quartier haut, le pauvre (à Mèze nous avions l’inverse, comme quoi...), celui des petites maisons des pêcheurs avec le linge pendu aux balcons. Rien ne saurait rester figé. Entre aimer le passé et rester passéiste, faut pas confondre. Comme partout, le confort, l’argent sont passés par là ; c’est un calcul, un investissement à long terme, envisageable si une pêche rapporte et que peut-il y avoir de plus exaltant même pour ces pêcheurs-hommes d’affaires, qu’une fièvre pour le thon égale à celle du chercheur d’or d’une autre époque ? 

Tuna_ensnared, pris au piège.  Domaine Public  from the U.S. National Oceanic and Atmospheric Administration Auteur Danilo Cedrone (United Nations Food and Agriculture Organization)


Dans quelle limite ce calcul reste-t-il acceptable ? C'est bien parce que le système complètement amoral ne s'impose pas de limites qu'une fin du Monde, du moins de l'anthropocène, est devenue plausible... Inutile d'en référer à Nostradamus et à Malachie...  

dimanche 15 mai 2022

Un "RUSSE" à Pérignan (12) / Porfiri veut revoir Odessa, les siens, sa maison...

Odessa, le port qui mène vers l'inconnu, les autres, le Monde ; Odessa, le havre qui ramène dans le familier, les siens, son monde. C'est ce qu'a vécu, c'est ce que vit Porfiri Pantazi. 

Русский Мыс Большой Фонтан, Одесса. Wikimedia Commons Author Alexey M.

Odessa, village d'Ukraine fondée par Catherine II, impératrice de Russie, allemande de naissance. Nommée pour rappeler en grec le nom d'Ulysse "Odysseos", mais au féminin, impératrice oblige. Son gouverneur Du Plessis de Richelieu, Français passé chez les Russes (contre Napoléon) de la famille du cardinal bien que deux siècles les séparent, fait du village une ville superbe (dont le grand escalier de la "Perle de la Mer Noire", avec sa statue en haut des marches). 

Odessa, plus d'un million d'habitants, son port, son tissu industriel, agroalimentaire, textile. 

Wikimedia Commons Authors : Alex Levitsky & Dmitry Shamatazhi

Odessa, méditerranéenne, appréciée, du moins au centre (en dehors c'est de style soviétique) pour son architecture italienne, française, un peu espagnole aussi. 

Odessa, ville libre, maniant volontiers l'ironie, cosmopolite, au surnom aussi de "Marseille d'Ukraine", avec ses cafés, sa vie nocturne, ses plages pour les vacances. Sous terre, ses galeries d'extraction de calcaire, par la suite refuges de vagabonds, de malfrats, de contrebandiers, de partisans, suivant les époques. 

Odessa, déjà bombardée en 1854 par les marines ottomane, britannique et française. 

Odessa, c'est le soulèvement révolutionnaire de 1905 avec l'intervention du cuirassé Potemkine (film en 1925 de Sergueï Eisenstein / chanson de 1965 de Jean Ferrat censurée par l'ORTF d'Etat). Odessa en 1917, ensanglantée par la terreur rouge locale (400 officiers du croiseur Almaz transformés en blocs de glace ou jetés vivants dans les chaudières, 400 familles dites bourgeoises massacrées). 

Odessa, en 1919, c'est Porfiri Pantazi, le "Russe" bessarabien, moldave, roumain et grec, qui embarque de justesse dans la Légion, alors que la flotte française de l'amiral Amet est venue soutenir une armée Blanche et avant que la guerre civile ne fasse rage. 

Odessa, au printemps 1933, c'est Holodomor, la famine voulue par Staline et Moscou. Alors que l'URSS exporte du blé, les autorités soviétiques réquisitionnent tout moyen de subsistance... le cannibalisme a été le seul moyen de survie : des millions de victimes (entre 2,6 et 5 millions de morts)

Odessa en 1941, ce sont les Roumains alliés des nazis qui occupent la ville. Suite à un attentat, dans la nuit qui suivit le 22 octobre, 5000 Juifs ou Communistes sinon les deux, furent tués. Le lendemain, 19.000 Juifs seront exécutés, le 24 plus de 5.000 furent mitraillés, le peloton d'exécution s'avérant trop long pour la besogne. Des 33.885 restant, surtout des femmes et des enfants, beaucoup moururent de typhus et de dysenterie dans les kolkhozes où ils étaient déportés (novembre 1941). Un massacre éradiqua ce qu'il restait de survivants (décembre 1941). Les Tziganes non plus ne furent pas épargnés. 

Odessa, en 1946-47, c'est une nouvelle famine provoquée par le pouvoir, difficilement estimable, avec de nombreux orphelins non enregistrés, ces "enfants-loups" livrés à une survie sauvage suite à la mort ou au retour des pères prisonniers de Hitler, directement envoyés au Goulag par un Staline vieillissant dans la hantise du complot et terrorisant en conséquence et la population et son entourage direct. 

Odessa, malgré les vagues d'émigration (surtout des Juifs), malgré les problèmes de corruption, malgré la dénatalité ambiante (sauf en Afrique), ce sont les progrès espérés, initiés par le développement économique des années 70 (métallurgie et construction navale, raffinage, agroalimentaire, chimie, pêche, le port)... 

Odessa, en 1999, c'est le film Est-Ouest, avec Staline promettant amnistie et bon accueil aux émigrés russes de toujours, sans dire qu'il va confisquer les passeports, contrôler, contraindre, cuisiner, pressurer : ceux qui reviennent ne peuvent être que des espions ! Le film est une critique acide d'un totalitarisme qui tourmente et torture, retenant par la force la Française (Sandrine Bonnaire) voulant fuir la dictature alors que son mari russe s'accommode. Atavisme dû à des siècles de servage d'un peuple patriote jusqu'à l'arrogance ? Amour psychiatriquement indéfectible de l'enfant battu ? Coproduit par la Russie, le film témoigne d'une ouverture certaine, capable d'un regard droit sur le passé, prometteuse pour l'avenir mais qui s'est rétractée sur ses vieux démons... bien aidée par le machiavélisme de l'Occident... Clinton moquant et rabaissant Eltsine dans son ivrognerie en étant peut-être un des signes visibles...   

Suite à la destitution du président Ianoukovytch prorusse, frein à la dynamique vers l'UE (février 2014), une partie du Donbass s'oppose par les armes à Kiev (mars 2014 / 9000 morts entre 2014 et 2015), suite au "retour" de La Crimée à la Russie (mars 2014 / problème de l'intangibilité onusienne des frontières lors des indépendances), Odessa est directement impliquée en mai 2014, lors des affrontements entre des légalistes et des partisans de la Russie, incendiés dans la Maison des Syndicats où ils s'étaient réfugiés (40 morts ?). N'oublions pas la désintégration en vol du MH 17 de la Malaysia Airlines par un missile Buk russe lancé depuis la zone séparatiste (juillet 2014). 

Et aujourd'hui, Odessa qui reçoit ci un obus, là un missile, pour tuer, donner une leçon, maintenir sous pression. La plage des vacances est minée par crainte d'un débarquement ; les monuments, cachés par des sacs de sable ; les avenues barrées par des chevaux de frise... Était-ce pire, Porfiri, lors de ton retour, en 1924 ?  

Un "Russe" à Pérignan (12e volet). 

« Pantazi, vous le regretterez, lui a dit le capitaine. Je vais vous donner un bon conseil : faites cinq ans de plus, et je vous garde à mon service. Réfléchissez bien, et apportez-moi demain votre réponse.

– C’est tout réfléchi, mon capitaine. Je suis très bien à votre service, à vos côtés. Rien ne me manque au point de vue matériel. Mais je voudrais, une fois encore, revoir mon vieux père, ma vieille maison, mon pays, quoi. Je dois retourner en Europe.

– C’est dommage, Pantazi. Je vous regretterai. »

Revenir.

Et Porphyre a repris un autre bateau. Ils sont beaucoup moins nombreux sur celui-ci. Le voyage semble plus long encore qu’à l’aller. Mais on finit par arriver dans cette bonne vieille mer Méditerranée, et on aboutit à Marseille. Porphyre va se faire démobiliser au bureau spécial de la Légion Etrangère. Il reçoit son pécule, c’est toujours bon à prendre, et c’est de l’argent bien gagné. Et alors on lui dit :

« Vous avez droit à un voyage de retour gratuit. Où voulez-vous aller ?

– A Touzora, chez moi, en Russie ; non, pardon, en Roumanie à présent.

– Vous vous êtes engagé où ?

– A Odessa.

– C’est bien en Russie, ça ?

– Oui.

– Eh bien, on va vous ramener à Odessa… si nous le pouvons, car avec la Russie il y a des histoires. Le gouvernement soviétique n’est pas encore, je crois, reconnu officiellement par la France, mais cela ne saurait tarder : il en est question. »

Et c’est un troisième bateau qui ramène Porphyre au pays natal. C’est le plus beau voyage qui commence, avec, au bout, les veillées devant la porte, les balalaïkas retrouvées, tous les souvenirs qu’il a emmagasinés depuis cinq ans pour les resservir, à peine embellis, à ses anciens camarades. Que sera devenu le petit Serge, lui qui avait le chic pour mettre en colère le vieux Speletski, leur instituteur ? Et le grand Nicolas, au visage parsemé de taches de rousseur ?

Il revoit les petites maisons de Touzora au toit de chaume et aux murs crépis, sans étage, au sol de terre battue. Ni eau, qu’il faut tirer au puits de la cour, ni électricité : à propos, peut-être ont-ils à présent la lumière électrique ? Non, il en doute. A Kalarach, encore, oui, c’est possible. Mais Touzora…

Il n’a pas dit bien clairement qu’il allait revenir, s’installer pour toujours au pays, riche de son expérience, de ses voyages, et prêt à tout moderniser. Il a vu comment se cultivait la terre dans des pays aussi divers que Sidi-Bel-Abbès ou le Tonkin. Il pourra sans doute faire quelque chose de valable

Et ses pensées ne sauraient quitter la terre natale. C’est avec une précision inouïe qu’il revoit les moindres détails de la maison, la grande table de la cuisine où il a fait une encoche au couteau, du côté qui donne sur la petite fenêtre, près du tiroir où se rangent fourchettes et cuillers ; le vieux poêle nourri au bois, aux carreaux de faïence un peu craquelés sur les bords ; la barre à saucisse suspendue à deux gros clous rouillés à la maîtresse poutre (on a dû renouveler les deux bouts de ficelle, par exemple !), les oignons qui sèchent, accrochés au mur du fond par paquets de quatre ; et l’ail dont il savait faire les tresses. En a-t-il eu, de l’ail, cette année-ci, le vieux papa Pantazi ? Ou bien a-t-il été attaqué par la « graisse », cette maladie qui le rend immangeable et détruit en quelques semaines toute une plate-bande ? Et des tomates, en a-t-il planté dans le petit jardin, près du prunier fourchu aux fruits si délicieux ?

Dans quelques jours, il pourra voir, toucher tout cela, respirer à pleins poumons l’air de sa plaine. Quelle joie ! Même la baie de Naples, avec son Vésuve fumant sur le ciel, ne parvient pas à l’émouvoir… Voici les îles grecques de la mer Egée, et la Grèce, dans le lointain, à bâbord : le pays des ancêtres du côté de papa.

Enfin, les détroits : on longe Istanboul, sur la gauche à présent : c’est le Bosphore, et la mer Noire. Le bateau s’arrête à Constantza.

Touzora, mon village perdu.

Une journée de plus, et voici Odessa avec son escalier monumental du duc Armand de Richelieu, Odessa où tu t’étais engagé, Porphyre, voilà déjà plus de cinq années !

Nous attendons les formalités de débarquement, Kalarach n’est plus qu’à deux cents verstes, Kichinev à cent soixante environ. Attendons…

Notre ex-légionnaire songe à Touzora. Il va en avoir à raconter aux anciens copains ! Il lui semble les voir, en train de boire ses paroles… Et son vieux père, qu’est-il devenu ? Et la maison, avec le « joli coin », comme on appelle l’endroit où trône l’icône, près de la petite veilleuse toujours allumée dans son verre de couleur rouge ? Maison bien pauvre, certes, à côté de celles qu’il a pu voir de par le vaste monde. Mais n’a-t-il pas vu également des cases bien plus misérables ?

La petite place avec ses quelques tilleuls qui sentent si bon quand le printemps bat son plein, l’église orthodoxe de Kalarach qui va lui paraître si minuscule, les jardins, les vignes cultivées d’une façon bien archaïque, les arbres fruitiers des si nombreux vergers, tout danse devant ses yeux une farandole endiablée.

Et les vaches, si calmes… Tiens, à propos, Sacha le laitier, passe-t-il toujours de bon matin d’une isba à l’autre avec sa grosse cruche étamée au bec de laquelle il suspend sa « mesure » de fer-blanc ? Avant d’arriver, Porphyre, tu devras encore traverser des champs de tabac, de betteraves à sucre, des champs de blé aussi et des prairies où les veaux gambadent auprès de leurs mères.

« Mais j’ai bien lu quelque part, pense-t-il, que les troupes roumaines ont occupé le pays en 1918, et qu’alors la Russie soviétique et la Roumanie avaient rompu leurs relations diplomatiques, comme ils disent. Les Alliés ont bien reconnu les faits, pas l’URSS. »

Ses pensées reviennent à Touzora. Il revoit Anna, jeune encore, la femme de Petru, revenant chaque jour que Dieu fait de la source où elle a rempli ses deux énormes seaux qu’elle suspend ensuite chacun à sa chaîne au bout du gros balancier de hêtre. Et il lui faut charrier tout ce poids jusqu’au logis ! L’eau courante, c’est encore un luxe pour Touzora : tout juste s’ils viennent de l’avoir – et encore sans doute pas partout – à Kalarach.

Et il revient à sa situation présente. « Puisque tu seras à nouveau en Roumanie, Porphyre, que viens-tu faire à Odessa, en Russie ? »

Soudain, un brouhaha, une agitation : il doit certainement y avoir du nouveau.

Une délégation vient de monter à bord. Enfin le dénouement. Et nous apprenons tous qu’il est absolument impossible de débarquer, même à Constantza.

La déception est terrible. Si près du but… Est-ce mon Dieu possible ? Il faut, bon gré mal gré, se rendre à la triste évidence. Quelle misère ! Il faut donc repartir pour la France.

Partir pour toujours…

Le retour s’est bien effectué, mais c’est la mort dans l’âme que Porphyre a revu les côtes françaises et le port de Marseille. Il est bien démobilisé et ne sait plus que faire. On lui a offert une place de forestier là-haut, en Lorraine. Il a accepté : que faire d’autre ? Mais il n’a pu s’y habituer. Alors, on lui propose la Camargue. Cela le change, bien sûr, mais c’est décidément intenable, infesté de moustiques. Il en a assez vu en Extrême-Orient. 

François Dedieu, Un "Russe" à Pérignan / Caboujolette, Pages de vie à Fleury II, 2008. 

"... Je le revois dans mes bras, Nicolas
Je l'ai serré sur le cœur dans une salle de départ
Il m'a dit qu'il nous aimait, Maria Ivanovna
Mais nous reparlerons de lui un autre soir
Il m'a dit qu'il nous aimait
Mais parle-moi plutôt de toi
Je suis heureux de te revoir..." 
Michel Delpech / Ce fou de Nicolas / 1974. 

dimanche 13 mars 2022

La guerre d'Ukraine doit-elle alarmer le monde entier ?

Ukraine drapeau wikimedia commons flagpicture1-xFpfHq 

Un article sur Hérodote notant une "rupture historique"...  

"... Pour le reste du monde, y compris même les États-Unis, elle demeure un non-événement, si ce n’est par ses possibles répercussions économiques..." 

Guerre d'Ukraine - Notre avenir en questions - Herodote.net 

Réaction n'engageant que son auteur : 

Une "rupture historique", un "sens de l'Histoire", Le retour de l'Histoire ? Il faut être naïf pour user de poncifs... Parce que, d'une part, entretenir une politique de blocs par définition agressive, et de l'autre laisser noyer la Russie dans la décennie 90, a consisté à entretenir le sens de l'Histoire dans ce qu'il a de plus rétrograde et négatif, à persister dans l'héritage le plus nocif du XXe siècle. 

Sinon plus une guerre est lointaine moins elle concerne, relève d'une lapalissade (temps de réaction des USA dans les deux guerres mondiales). Encore faut-il considérer l'écho qu'en donnent les médias, référence faite, si proche de nous, au conflit Serbie, Kosovo, analysé partiellement car partialement. Encore faut-il considérer que les ogives atomiques font partie du mondialisme... 

Le "Méfiez-vous de vos amis" par rapport aux Etatsuniens aurait dû figurer dans le fil rouge peut-être gaulliste d'une Europe de l'Atlantique à l'Oural : pourquoi n'avoir pas proposé à la Russie et ses satellites proches, une adhésion à l'UE... à l'OTAN, sinon un statut de membre associé, une solidarité de destin ?! 

Isolement ou non de la Russie, l'essentiel n'était-il pas de rompre avec le cycle suicidaire hérité de la seconde guerre mondiale ? 

Le monde entier devrait seulement considérer que l'extinction de l'humanité suite à une "ère" anthropocène aussi débile, insensée que ridicule dans la durée, est pour tout à l'heure et même pour tout de suite si les champignons atomiques sortent comme les morilles !  

La guerre en Ukraine en restera-t-elle au stade de "non-évènement... ""... pour le reste du monde" avec ou sans majuscule...   

vendredi 2 juillet 2021

Sur le pont de Coursan, on y danse... (1)

Coursan depuis le pont / wikimedia commons / Author Christian Ferrer... merci l'auteur même si la saison ne répond pas à l'entrain de la belle saison...
 

Sur le pont de Coursan, on y danse, on y danse... Aussi bien que sur celui d'Avignon pardi, puisque le quartier voisin fête la Barque plusieurs jours durant encore, parfois, au mois d'août... Graillons et flonflons, des moules aussi... Que reste-t-il de sa renaissance dans les années 60 quand des orchestres réputés drainaient la jeunesse des villages voisins ?   

Le quartier médiéval de la Barque c'est celui qui domine l'Aude, derrière le mur haut et épais censé protéger des crues. Sinon les gens s'enfermaient derrière le portail de Notre Dame et les remparts quand le guet, depuis la tour au-dessus du gué, (par la suite clocher de la Rominguière), signalait une approche non reconnue, aiguillonnée par la hantise d'un raid sarrasin.  

C'est donc un passage à gué, voire grâce à un bac, idéalement situé sur la trajectoire la plus courte entre Narbonne et Béziers qui a valu l'installation du village. Corciano marque le passage de l'Aude sur la via Curtia plus directe par les collines de Nissan que la via Domitia plus à l'ouest, coupant la pointe de l’Étang de Capestang, plus exposée encore aux hautes eaux des inondations. 

Si la présence d'un pont de bois reste historiquement confuse, le tour de France à l'initiative de la régente Catherine de Médicis pour présenter son fils au royaume et à l'Espagne parle d'une traversée difficile de l'Aude à Coursan il est vrai le 4 janvier 1565. Et si pont il y eut, nul doute qu'il n'a pas tenu longtemps suite à une colère récurrente du fleuve. Le site de la ville relève un paragraphe de l'Histoire Générale du Languedoc : 

 " Le 14 octobre 1632, le Roi Louis XIII, la Reine, suivis de toute la Cour partis de Béziers à 11 heures du matin pour se rendre à Narbonne, passèrent l'Aude à gué à 4 heures du soir (sans doute au lieu dit "La Barque"). Il s'éleva aussitôt un orage extrêmement violent accompagné d'éclairs et de tonnerre et d'une si grande abondance de pluie qu'en moins de 2 heures la rivière et tous les ruisseaux du voisinage débordèrent, inondèrent toute la plaine à une lieue aux environs de Narbonne, ce qui produisit une fange si épaisse, que la plupart des carrosses et fourgons de la Cour s'embourbèrent et que presque tous les cochers ou charretiers furent obligés de dételer leurs chevaux et d'abandonner leurs bagages pour se sauver. Une heure plus tôt, le Roi et la Reine auraient été noyés."

(à suivre) 

Sources : wikipedia & site de la ville de Coursan.


samedi 31 mars 2018

EN RÉPONSE, SUR MAYOTTE, A ALAIN RUSCIO, PLUME DES LENDEMAINS QUI CHANTENT…


Wikimedia Commons Maritime_boundaries_between_Seychelles_and_France-fr.svg Auteur Sémhur (talk)
Vos raccourcis ne vous honorent pas. Vous êtes partial, ce qui est incompatible avec la qualité d’historien. Et si toute la partie recevable est bien étayée de sources, ce n’est pas le cas quand cela ne vous arrange pas… Il est vrai qu’il faut se méfier d’un historien lorsque, trop subjectif, il se départit de sa neutralité : « …Oui on a bien lu… ». De même est-ce parler pour ne rien dire lorsque vous prétendez « …Il a même réussi à changer la géographie… quand ça l’arrange… » cet Homme Blanc, en italique, dont vous vous désolidarisez à bon compte… La géographie naturelle de la France ne va-t-elle pas jusqu’au Rhin, dûssions-nous, pour une fois, ne pas taper sur Buonaparte.


https://humanite.fr/comores-mayotte-neo-colonialisme-francais-petit-cours-dhistoire-recente-652244


Quant à l’histoire, zéro l’historien ! Mayotte a été « achetée » en 1841. Le protectorat sur Anjouan, la Grande-Comore, Mohéli ne date que de 1886 avec un gouverneur basé à Mayotte restée colonie. Les références à l’appartenance ethnique, linguistique, religionnaire laissent de côté la longue période 1740-1820 qui a vu le sultanat d’Anjouan tenter de conquérir Mayotte. Pourquoi éluder aussi les guerres anjouano-malgaches[1] qui, à force de razzias d’esclaves laissèrent l’île pratiquement dépeuplée. De même, personne ne relève qu’avec la complicité de la France, les notables Anjouanais dont le président Abdallah, grand musulman qui faisait vendre par ses mapinduzi (ses révolutionnaires !) le riz de la solidarité internationale, se sont accaparés les bonnes terres de Mayotte… Des bisbilles encore d’actualité dernièrement, concernant quelques 300 hectares, une broutille !  

Et si le TOM des Comores n’avait pas refusé d’accéder à l’indépendance lors du référendum de 1958, voulant demeurer Tom alors que Mayotte demandait déjà la départementalisation ? 
Et si le transfert de la capitale de Dzaoudzi à Moroni (1958) ne s’était pas accompagné du dépouillement avec intention de dépouiller l’île de Mayotte (vers 1962, 136 km de routes seulement, quatre fois moins qu’à la Grande-Comore, six fois moins qu’à Anjouan !)[2] ? 
Et si les Anglais avaient voulu de Mayotte en 1841 ? Avec des « SI », bien sûr, mais juste pour mettre en relief ce que l’Histoire peut avoir de fragile…   

On raconte comment les femmes ont empêché le départ du dernier bulldozer sur la plage d’Hamouro… La date ? J’ai oublié. Je suis pas historien mais mon argument ne peut se comparer aux arrière-pensées de ceux qui se contentent de dire et d’écrire trop facilement « une même histoire » pour l’archipel géographique des Comores !   

Passons sur vos « Comoriens » devenus Mahorais (?). Passons sur les étrangères venues « pondre », un vocabulaire n’engageant que vous et me rappelant les propos sur le vagin des Mahoraises, d’un nommé Perrin, vice-recteur de son état.  


Le monde n’attendait que vous pour que la grande vérité éclatât : « …la France est en ce domaine une hors-la-loi internationale… »… bel enfumage des cocos de la belle époque (Tchèque par ma mère j’ai eu à savoir ce qu’était la Tchécoslovaquie depuis 1957).

« Hors-la-loi internationale » ? Pourquoi cacher que les résolutions de l’ONU n’ont AUCUNE PORTÉE CONTRAIGNANTE EN DROIT INTERNATIONAL ? Pourquoi taire que l’intangibilité des frontières contredit le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ? Pourquoi ne pas citer tous ces exemples ni blancs ni noirs, ces pays entre deux principes dont des hors-la-loi selon vous : 


1948 République populaire de Corée coréenne.

1950 La Chine entreprend de « libérer » le Tibet.

Années 50 – 60. La fédération Ouganda – Kenya – Tanganyika ne se fera pas à l’indépendance.

1960 L’indépendance sépare le peuple Ewé (0,5 Million) séparé entre le Ghana, le Togo, le Bénin.

1961 Les Britanniques trahissent la promesse d’autonomie faite au Buganda (royaume intégré à l’Ouganda).

1961 Cameroun britannique partagé entre le Nigeria et le Cameroun français

1968 Rodrigues refuse l’indépendance mais est intégrée à Maurice.
1971 Taiwan refuse la Chine Populaire à l’ONU et perd son siège
1973 Cap Vert bissau-guinéen ?

1976  République arabe sahraouie marocaine.

1983 République turque de Chypre du Nord

1988 Palestine israélienne.

1990 Transnistrie russo-moldave

1991 Ossétie du Sud russo-géorgienne

1991 République du Somaliland somalien

1992 Haut-Karabagh Azerbaïdjanais

1992 Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine, Macédoine, Kosovo yougoslaves

1993 Erythrée éthiopienne

1999 Abkhazie russo-géorgienne

2002 sécession du Timor oriental indonésien

2006 Montenegro yougoslave puis serbe

2008 Kosovo yougoslave puis serbe puis indépendant non reconnu par tous…

2011 Soudan du Sud soudanais ? 

2012 Azawad malien

Et pour quelles raisons l’AOF et l’AEF n’ont-elles pas donné lieu à deux entités fédérées ou non ? L’historien que vous êtes devrait nous éclairer plutôt que de rester idéologiquement coincé… Et quid des îles guinéennes en face du Cameroun ou du Gabon, à y être ?

Quant à donner un « petit cours d’histoire récente », ayez la condescendance plus modeste.  En citant Giscard, vous faites croire que la parole d’un chef d’État est droite et sacrée, n’essayez pas de nous persuader de votre naïveté de façade. Giscard change d’avis comme de Gaulle le fit à propos de l’Algérie... Tant que les fausses promesses ne seront pas interdites par une Constitution nettoyée ou nouvelle... 


D’accord pour le néocolonialisme sauf qu’il n’est pas honnête de gommer le contexte à savoir la guerre froide entre les deux blocs et Mayotte enfoncée comme un coin entre le Mozambique république populaire et Madagascar république démocratique, rouges s’il faut vous colorier le dessin… 


Et puis laisser penser que 80 % d’analphabètes (ce sont les termes que vous reprenez), à 99,4 % pour rester français (référendum du 8 février 1976), valent moins que les 18,19 % d’éclairés qui ont mis leur roi en orbite pour la dernière présidentielle, quelle morgue ! Quant à ne pas savoir situer la France sur une carte… il est presque inutile de répondre que même un président peut commettre un lapsus sur les océans, que même une ministre ne sait pas aujourd’hui où est Mayotte. 


Un coup de force, couronné, dîtes-vous par la départementalisation « dans l’indifférence générale de l’opinion métropolitaine » Toujours des sous-entendus indignes de l’Histoire… Heureusement que seules les populations concernées ont leur mot à dire lors d’un changement de statut, par exemple St-Pierre-et-Miquelon devenant DOM en 1976 et se rétractant pour un statut de collectivité territoriale en 1985. 


OUI Mayotte est le 101ème département malgré tous les liens que vous voudrez « … familiaux, amicaux, économiques, tissés depuis des siècles… » avec les Comores (on dirait un discours politique !) Mais à condition d’y ajouter les précisions historiques qui ne vous arrangent pas !  


« … Et pour quels intérêts ? Économique(s) ? La métropole a engouffré en pure perte des milliards d’Euros (une moyenne de 680 millions d’euros par an, d’après une enquête du Monde de 2011… » Si maintenant les communistes se mettent à penser en mimant la logique capitaliste ! Le préfet remercié a dit récemment un milliard par an… un développement sincère en nécessitera cinq si demain en finit avec le mépris. Ne soyez pas horrifié, les 0,3 % de la population actuelle ne reçoivent que 0,2 % de redistribution par l’État ! 


Et s’il vous plaît de citer à loisir André Oraison (funèbre) avec ses propos simplistes sur Mayotte eldorado (et laissant entendre que l’islam est incompatible avec la République[3], c’est marxiste ça ?), sachez, et vos chiffres en attestent, qu’ici on veut rester Français pour vivre LIBRES ! 
Quant à la catastrophe annoncée, plutôt que de voir la paille dans l’œil de Mayotte, préoccupez-vous de la poutre qui vous empêche de voir que le pays court au naufrage parce que depuis Pompidou-Rotschild, droite et gauche confondues ont sabordé de concert le navire France.   
  




[1] 1984 Allibert C. Mayotte plaque tournante et microcosme de l’Océan Indien occidental : son histoire avant 1841, pages 130-132.
[2] Guy Fontaine. 1995 Mayotte / éditions Karthala p. 27
[3] https://www.franceculture.fr/emissions/les-enjeux-internationaux/libye-derriere-le-spectacle-des-armes-et-des-scandales-de-quoi-les-libyens-veulent-ils-parler / A Mayotte faudra demander à Saïd Kambi, ce "monsieur islam" épinglé à juste titre par le Canard enchaîné !

samedi 21 octobre 2017

“ J'AI PAS VOLÉ, PAS VOLÉ, PAS VOLÉ L’OR...” (fin) / Faites donc "Monsieur Hitler" !

  Le 18 juillet 1944, à Bretton Woods, Henri Morgenthau, ministre des finances de Roosevelt accuse la BRI (Banque pour les Règlements Internationaux) d’être instrumentalisée par les nazis... Il se garde bien de revenir sur la période antérieure à décembre 1941 qui a vu les États-Unis continuer à exporter vers l’Allemagne nazie, la BRI, en tant que prête-nom, se chargeant des transferts d’argent. 
 
    La BRI, intermédiaire entre les banques centrales européennes, a son siège à Bâle, en Suisse. En 1944, elle est contrôlée par la Reichbank qui possède plus de 70% des actions. En outre, ses actifs, à hauteur de 300 millions de francs suisses, sont aussi investis en Allemagne. Il serait anecdotique de souligner que le directeur général est français, un nommé Fournier, de la Banque de France mais aux ordres d’un commissaire allemand. Est-ce utile de préciser aussi que le directeur adjoint est allemand, ancien de la Reichbank, membre du parti nazi ? Serait-il accessoire encore de dire que le président de la banque, T.H. Mc Kittrick est américain ?
    
Dans cette logique, la BRI qui, malgré la guerre, touche, rubis sur l’ongle, les intérêts de ses investissements en Allemagne, se permet en retour, de bénéficier de devises fortes ; ainsi l’or pillé par les nazis s’en retrouve blanchi. La banque suisse qui a aussi transporté de l’or vers le Portugal pour le compte de l’Allemagne traitait qui plus est la vente du métal précieux au profit d'Hitler.
    
Avant la guerre, alors que tous les signes de son imminence sont tangibles, les gouvernements occidentaux (Angleterre, France, États-Unis) sont bien les seuls à toujours croire qu’elle est évitable (1). Dans ce but, le gouvernement anglais, ne voulant surtout pas déplaire à “Monsieur Hitler”, a favorisé le versement de la valeur de l’or tchèque vers l’Allemagne. Pauvre Tchécoslovaquie, lâchée par ses alliés, envahie et dépouillée d’avoirs censés être en sécurité en Grande-Bretagne ! C’est à mettre sur la liste des lâchetés anglaises et françaises (2) qui eurent un effet inverse à celui escompté. Triplement même puisque, Hitler encouragé dans sa politique d’agression qui augmenta d'un tiers ses capacités guerrières grâce à l'équipement et aux chars tchèques (usines Škoda principalement) bénéficia aussi des fonds nécessaires au développement de sa machine de guerre. Pis, cette politique d’apaisement se conjugua avec une impréparation certaine des alliés alors que la probabilité de la guerre se renforçait.
  
  
 La presse britannique, elle, témoigne néanmoins de cette indignité en dénigrant la BRI, une banque qui récompense avec 23 tonnes d’or (804,591 millions d’euros / cours du 18 oct 2017) l’occupation illégale d’un pays souverain. La question est posée à la Chambre des communes, le 15 mai 1938 et Chamberlain dit vrai mais ment à la fois en affirmant que l’or tchèque n’a pas été livré. Le 31 mai 1938, une dépêche de l’Associated Press en Suisse viendra confirmer la transaction.

Johan Willem Beyen (3), président de la BRI de 1937 à 1940, laisse aussi entendre qu'il s'agit d'un jeu d'écriture, "que c'est très technique", que l'or est toujours là.

Mc Kittrick, sur le point d’être nommé à la tête de la BRI, a préféré considérer que la situation était seulement comparable à ce qui s’était passé en Autriche (22 tonnes d’or transférées en Allemagne suite à l’Anschluss, l’annexion).           
Alors qu’elle ne l’a pas fait en faveur des Soviétiques pour l’or des pays baltes, La BRI a livré l’équivalent de l'or que la Banque Tchécoslovaque avait mis en sûreté à Londres. 

A la fin de la guerre T.H. Mc Kittrick fut reconduit dans ses fonctions et la BRI n’eut aucun compte à régler concernant la dénazification. 
Beyen, son président fut ministre des Affaires Étrangères des Pays-Bas jusqu'en 1956 et honoré lors du Traité de Rome (1957) pour "son rôle majeur dans la création du Marché Commun" (Wikipedia). 

Cher copain de taverne, toi qui a voulu mettre ce malaise entre nous, tu as une idée, à présent, pour ton or volatilisé... Je ne sais pas si tu es intéressé par mes déductions mais en cinquante ans, l'image de la France idiote utile se fait moins floue. Les alliés ont toujours joué de ses fiertés mal placées pour la faire suivre comme un âne qui trotte. Elle qui se voulait entre les deux blocs se retrouve engagée avec une Europe atlantiste en froid avec la Russie, complice obligée des dominateurs de Washington, représentants de commerce d'un monde pas aussi libre qu'il le prétend.    

(1) Le bellicisme allemand est analysé et annoncé bien avant 1930... Est-ce la hantise du bolchévisme, l'intégrisme capitalistique et le désir pour l'Occident de pousser Hitler contre Staline qui ont favorisé la montée en puissance du totalitarisme nazi ?.. La réponse n'est-elle pas dans la question ?  
(2) « Vous avez eu à choisir entre la guerre et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur, vous aurez la guerre. » Winston Churchill à Neville Chamberlain, premier ministre, à propos des Accords de Munich (1938). Churchill a eu le mérite de dénoncer en temps utile les volontés hégémoniques de l’Allemagne. Pas écouté face à la politique d’apaisement de Baldwin puis de Chamberlain, il a même été hué pour son avis à propos des accords de Munich (sept. 1938) : « Nous avons subi une défaite totale et sans restriction » ! 
(3) considéré comme un des « Pères de l’Europe » ! Après Monnet et Schuman dont on sait qu’ils acceptèrent l’agent de la CIA, ne sautons pas comme des cabris pour une UE vraiment pas en odeur de sainteté...    

Source : Marc-André Charguéraud / Le Banquier américain de Hitler, Ed. Labor et Fides, 2004. 

photos autorisées : 
1. Holoubkov Panzer-35 Auteur  MoRsE assumed

vendredi 20 octobre 2017

“ TU AS VOLÉ, AS VOLÉ, AS VOLÉ L’OR...” / Un Monde "libre" de vous dépouiller !

Pardonnez ma pirouette avec "L'or...ange du marchand" de Gilbert Bécaud même si le hasard rapproche doublement le présent papier du premier article de ce blog en octobre 2013 : 

ČESKOSLOVENSKO / Nathalie de Bécaud ?


Des choses vous reviennent, comme ça, sans crier gare, prolongeraient-elles les récents articles
Un samedi soir à la bière, dans une auberge enfumée de Bohême. Nous sommes en 1969, peut-être 1970, chez la bleda lady de l'Hospoda U Šmucrů, la pâle tenancière  qui porte le gris du vieux crépi de la façade sur son visage fermé. Mais notre jeunesse fleurit, la blonde aidant, entre les chansons entonnées et les œillades aux jolies étudiantes, oubliant le printemps de Prague trop vite étouffé. Un samedi soir aussi rituel qu'agréable quand mon voisin jusque là inconnu de moi, me fait  :

« Et l’or des Tchèques que vous avez volé ? » 
 

Je tombe des nues, me demandant avec crainte si, déjà parjures et lâches d’avoir accepté Munich en 1938, puis l’appropriation illégale de la Bohême-Moravie par le Reich (mars 1939), nous, Français, serions aussi des voleurs. La France n’aurait-elle jamais rendu l’or confié par nos amis ? Faute d’éléments, ce soir-là, et de bouteille aussi, pas comme quand je dirai "conard" à un étudiant seulement pré-adulte osant m'écrire que l'esclavage est de mon fait parce que je suis blanc et que lui est noir (je regrette même d'avoir argumenté alors), la question se fige dans sa parenthèse : nous entonnâmes un autre air et trinquâmes à autre chose mais moins légers et chaleureux qu'à l'habitude ! 

Lui comme coincé, moi, blessé dans mon amour-propre. J'étais la France accusée de vol entre deux chansons, serait-ce par un copain de taverne accusant sans preuve. Nous sommes encore à l'âge où la réflexion, les réactions manquent de souplesse.  
 
Cette histoire ramène dans les soubresauts de la seconde guerre mondiale, au sens large, avec la “montée vers la guerre”, le chaos salement dit et les embrouilles qui suivent. Des documents, déclassifiés, remontent à la surface, tels ceux qui confirment que le capitalisme  a généré  sa créature : Hitler... Cela aurait-il changé de nos jours, avec le financement, d’abord des talibans puis des groupes terroristes ? Mais pour l’oligarchie de l’argent, (qu’ont-ils d’humain, en fait ?), spolier les nations, détrousser les peuples, escroquer les particuliers relève d’une même logique bancaire ! Notre époque en perdition à cause de la banque, bras armé tout puissant des milliardaires, ne déroge pas à la règle... Cette réalité crue devient de moins en moins contestable tout comme nous pouvons évaluer combien les principes démocratiques, de solidarité, de respect, ne sont que des mots destinés à endormir, à tromper les moins favorisés quand la petite minorité de puissants confisque toujours davantage à son profit. 

Que lui est-il passé par la tête ? L’invasion par les troupes du Pacte de Varsovie ne date que d’un an et cela peut rappeler la politique anglo-française délétère, l'hypocrisie des États-Uniens, l’assujettissement aux nazis, une trentaine d’années auparavant. 
    Près d’un demi-siècle est passé et si le temps et l’ordinateur permettent désormais de reprendre les sujets en suspens, il n’y a vraiment pas de quoi lever nos chopes, l'ennemi étant plus que jamais la finance ! 
    C’est donc une recherche sur le Net qui est à même de dire si j'ai volé. (à suivre)

carte autorisée : carte Tchécoslovaquie 1939 Auteur autorisation SVG Czechoslovakia 1939.SVG derivative work Themightyquill