Article du 4 nov 2021 à l'origine. Quant à la sortie, début ou fin 78 ?
Robert en pêche à l'étang de l'Ayrolle. Diapositive de 1978. |
Aude, Languedoc, Tchécoslovaquie, Ariège, Pyrénées, Brésil, Océan Indien, Lyon, foyers familiers mais unique maison des hommes. Passer ou dire qu'on passe ? Apprendre du passé pour alerter sur la gouvernance cupide suicidaire. Se ressourcer dans l'enfance pour résister, ne pas subir. Les aïeux, l’accueil des autres, les langues, les traditions, le quotidien et ce que chacun, à son niveau, se doit de léguer aux jeunes (mémoire, histoire, arts...) rapprochent les cultures.
Article du 4 nov 2021 à l'origine. Quant à la sortie, début ou fin 78 ?
Robert en pêche à l'étang de l'Ayrolle. Diapositive de 1978. |
Thalassa, l'émission mythique, avec, pour sujet, la mer de la région Occitanie. On passe des beautés sous-marines de la Côte Vermeille à la pêche à Gruissan, plus particulièrement la pêche à l'étang de l'Ayrolle, pour finir avec la Prud'homie et la fête de Saint-Pierre.
Bateau Thalassa à Paris wikimedia commons Author Peter Potrowl |
C'est de vagabonder sur la cinquantaine de chaînes du "bouquet" qui m'a arrêté sur les images, si heureux de voir que les pêcheurs de l'Ayrolle restent. Et dynamiques, solidaires, sérieux quant à la ressource, respectueux des traditions, de la fête dédiée à Saint-Pierre, notamment. Au point que l'étang le leur rend bien on dirait. Allez voir plutôt !
Et moi qui les croyais sur le déclin ! Et moi qui pensais l'étang moribond sinon mort ! Il faut dire qu'à une époque des nouvelles affligeantes nous sont arrivées, sur des maux mettant à mal la fragilité de ce milieu à part... Des ravageurs, des pillards, toute une escouade de mercenaires, venus, paraît-il, en minibus, dans la logique exacerbée de l'offre, de la demande, de l'exploitation de main-d’œuvre, auraient déversé du poison pour faire remonter les palourdes d'un commerce lucratif au profit de gens à hauts revenus, en deçà et au-delà des Pyrénées, vu le prix au bout de la chaîne. Ma consternation fut telle que j'en restai paralysé, incapable d'aller au bout de l'info. Qu'y avait-il de vrai dans la rumeur ? Représentait-elle un désastre irrécupérable ? Je le pensais.
En regardant Thalassa, touché par la lumière à part de notre Méditerranée, reprenant d'un coup les couleurs d'un monde que je croyais à jamais perdu, vibrant encore de l'avoir parcouru il y a peu parce qu'à vélo (ou à pied) le pays qu'on aborde pénètre à cœur, frémissant de la foi en héritage de ces pêcheurs si forts pour se projeter dans l'avenir, pour la première fois depuis mon incapacité au moins trentenaire à faire le deuil de cet étang aimé, c'est à eux, désormais, que je devrai demander.
Loin des jérémiades, les causes en seraient-elles fondées, dans une dignité remarquable où domine l'attache indéfectible à leur pays de ciel et d'eau, l'attitude toute pétrie de fraternité, de communion aussi avec un milieu qu'ils veulent préserver, ils ne minimisent pas les bienfaits que l'étang offre. Au fil des images, on peut voir des loups énormes, des dorades bien royales, ainsi qu'une "perruque" géante d'anguilles s'entremêlant en vain, accumulée dans les pièges terminaux du filet qui fait barrage et les oriente. Ils ne cachent pas, ils n'exagèrent pas, ils ne sont pas dans l'exubérance dois-je ajouter à l'intention des demeurés qui, avec Renan, Méry, et même Michelet ou Hugo bien qu'en marge, sans parler du traître Maurras ou de ce salop intégral de Destouches qui aurait dû finir son voyage dans un fourgon de la gestapo fuyant dans la nuit... Pardon pour cette parenthèse digressive mais qui n'entame en rien ma sérénité... L'âme légère, je crois entendre gangui ou pantane pour désigner ces filets sauf que, plus proche de la lévitation (tous des Tartarins vantards ces Méridionaux !), loin d'une objectivité minimale, je m'en remets plutôt à Gilbert Larguier :
https://books.openedition.org/pupvd/5358?lang=fr
Comment rester objectif lorsqu'on l'a aimé de près, cet étang ? Pourtant, dans les années 70, la beauté du site, son cadre, l'horizon des Corbières et des Pyrénées, s'appréciait, mais de façon ordinaire, sans évaluer le caractère exceptionnel de cette nature préservée... c'est comme trouver belle la femme de qui on se sépare, comme ne voir le bonheur que lorsqu'il s'échappe... C'était un temps où tonton Vincent partait de Narbonne à mobylette pour se casser le dos sur des palourdes. Nous mêmes avons dû y aller, une ou deux fois, en début de saison. Et si, dans la baignoire du petit faisant office de "boîte à pêche", pour régaler la famille, nous rapportions, sur un lit de laitues de mer pour la fraîcheur, des moules, des huîtres plates de la race perdue, des couteaux remontés au gros sel, quelques palourdes aussi malgré la technicité de cette pêche, c'est toute une ambiance qui imprégnait tous nos sens. (à suivre)
Carte des abords au sud de Gruissan. Source et remerciements à Geoportail. |
Pour arriver à Gruissan, la piste cyclable emprunte le tracé de l'ancienne route et longe l'étang... un pointu sur le miroir de l'eau, la tour Barberousse sur la presqu'île, le village qui "s'enroule autour comme un gros chat fatigué" (1), à l'arrière plan, les pins de Saint-Martin, une entrée magique tant pour les peintres que les photographes... 1968, j'ai promis aux camarades de classe de passer les voir ; ça n'a pas traîné en ce début d'été ; avec la motivation, je n'ai jamais l'impression de devoir forcer sur mon routier bleu. Quand ce n'est pas l'allant pour l'aventure, l'instinct pousserait aux aventures, cela devient sérieux quand on a dix-sept ans... pousser sur les pédales, je n'y pense même pas. "Les fleurs de mandarine... ne savent pas qu'on les aime déjà": je n'ai retenu que des brins de la chanson qui revient en boucle, celle avec les mots qui confortent ma psychologie du moment (2). Aussi, que la cave coopérative soit ou non sur ma gauche, je n'ai en tête que la digue donnant sur le village de chalets...
Photos de l'étang avec ce pêcheur au lancer qui profite du flux entrant depuis le port. Photos de la tour en perspective depuis les rues et ruelles qui rayonnent. Sur cette rocade avec les véhicules à part, rayonnants aussi les gens aux petits ou gros chiens, les familles à pied ou à vélo sans la multitude de la pleine saison, avec un soleil plus convivial.
Photos des salins et de la montagne de sel, la camelle. De nombreux visiteurs encore.
Photos de l'Ayrolle sans la bonne odeur iodée des posidonies que les locaux appréciaient jusque pour les matelas des petits... L'étang est-il, après les calanques de Marseille notamment, envahi par ces autres algues brunes, trop vivantes elles, arrivées du Japon avec les naissains d'huîtres du bassin de Thau (3) ?
Photos des cabanes de pêcheurs et de la cale avec les barques, les pieux et partègues ; les ganguis (4) et autres filets des petits métiers de l'étang. Justement un pêcheur, son placide korthal aux basques (il doit se faire vieux le pauvre), charge sa barque .
(1) in "La Vigne de Jean" de Jean-Pierre Grotti, un écrivain romancier qui sait si bien parler du pays !
(2) de Michel Fugain (1967).
Gruissan wikimedia commons Author Raphael Frey |
Gruissan-Étang_de_Gruissan_2010 wikimedia commons Author Wikinade |