mercredi 2 mars 2016

ET À FLEURY, LE CARNAVAL ? / Fleury d'Aude en Languedoc


Et bé, après Pézenas et Limoux, ébaubi et baba je l’ai bée... Néanmoins, serait-ce par petites touches et avec l’espoir que des contributions plus substantielles viendront étoffer ces bribes, quelques pistes... 

Heureusement que le mardi gras est inscrit dans le calendrier et qu’il donne l’envie et l’idée de se masquer, surtout chez les enfants. Il suffit de quelques vieilles fripes dans l’armoire ou le cagibi et du masque qu’on peut s’il le faut, acheter chez Odette ou Madama Zan, les deux bureaux de tabac du village. 

L’après-midi de ce mardi à part, on rencontre dans les rues des groupes déguisés munis d’une casserole ou mieux d’une poêle pour passer de porte en porte en quêtant « Vingt soous din la padeno ! » (vingt sous dans la poêle). C’est un joli tableau quand ces bandes qui se croisent dans les quartiers : les masques se jaugent, se toisent presque à se provoquer, au point de lever, pour rire, la canne ou le bâton car la concurrence est rude et la générosité des maisons limitée !
« Pitchou, les autres sont passés, tiens, un bonbon quand même ! »
Parfois, quitte à revenir ensuite sur ses pas, mieux vaut aller au plus court taper à la bonne porte, souvent chez une mamé curieuse, ridée jusqu’au bout des doigts mais à l’œil guilleret et engageant... les gamins ne s’y trompent pas... Retenant sa pièce au bout des doigts, elle sourit « Qui es-tu, toi ? ». Alors, gêné mais ravi, on dévoile sa frimousse, on bredouille son nom, elle insiste en articulant bien, pour la mamette qui est derrière, encore plus ridée, la paume ouverte contre l’oreille « C’est le fils de François ! ». Et on rougit un peu de tant de fausse modestie ou seulement d’exister tandis que leurs pommettes fripées rosissent... « Ces vieux ! ça n’a qu’une goutte de sang dans les veines, et à la moindre émotion, elle leur saute au visage...» écrivait Alphonse (1) Daudet dans les Lettres de mon Moulin... C’est vrai qu’on en oublie le noir des tabliers qu’elles portent toutes...


Le carnaval rend donc hommage aux mamés (les hommes sont plus bourrus !) mais les masques repartent vite tandis que le préposé à la récolte compte les sous. La fin de l’après-midi pointe, il est temps d’aller à l’épicerie pour du chocolat Cémoi, des barres de Malakoff, des pâtes de fruits et des nougats Dumas, la marque de Pézenas, bref un goûter du tonnerre !


Dans Caboujolette, avec la variante « Un soou à la padeno ! », papa s’est fait l’écho de ces sorties déguisées. Je cite :
« Un de ceux qui tenaient à voir le visage du quêteur masqué, avant de lui donner la pièce, c’était, racontait papé Jean, qui l’avait vu faire chez Pierre Marty, le bourrelier, Cazanave :
« Cal sès, tu ? Te baillarei quicon si m’enlevès lou masqué et si me ba disés ! » (Qui es-tu, toi ? je te donnerai quelque chose si tu m’enlèves le masque et si tu me le dis !)
De quoi tempérer mon sentiment sur les hommes... et sur Carnaval ! Il suffisait de se lancer...
(à suivre) 


(1) maman, Alphonse Galmarre fait 91 ans en mars... comme toi, presque...

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