vendredi 20 février 2015

DES FLOCONS D’AMANDIERS DANS UN MONDE DE BRUTES / Fleury en Languedoc.




Dans les temps reculés du roi Vamba, Deska, un seigneur wisigoth du Razès (mais dans les Corbières et le Minervois, on raconte aussi la même histoire), avait fait acheter pour son compte, dans une cité aux confins des contrées païennes, une belle esclave blonde et vierge prénommée Snihà. C’est que l’esclavage, aussi ancien que l’histoire des hommes, emblématique de l’oppression des dominants sur les dominés, fut aussi légitimé par les chrétiens avant d’être généralisé par les musulmans. C’est un fait, chez les Germains et peut-être même déjà en France, à Verdun, on vendait des êtres pris comme butin de guerre et notre seigneur du royaume wisigoth, converti, marié, mais toujours barbare, voulut s’attacher une nouvelle concubine esclave. Au-delà des joies d’un long voyage en char fermé, je vous laisse imaginer le fatalisme et le peu de cas qu’on faisait alors de la vie et du respect d’autrui.
Néanmoins, lorsque, devant le maître, la fille baissa le capuchon masquant son visage et laissa tomber le manteau à ses pieds, quelque chose vint perturber les penchants aussi instinctifs que charnels du possesseur comblé. Étaient-ce les longs cheveux d’or, les pommettes rosées, la peau diaphane, l’attitude humble qui contrecarraient sa prédation ? Quand il lui ordonna de lever les yeux, le bleu d’un ciel lavé par le Cers ajouta à son trouble et quand il réclama de l’entendre, les inflexions douces et mélancoliques d’une langue inconnue de lui, le pénétrèrent de frissons. Comment un ascendant immatériel pouvait soudainement entraver des pulsions d’ordinaire frustes ? Deska ne réalisait rien de l’emprise mystérieuse sur ses sens et seul comptait pour lui l’être nouveau qu’il croyait avoir toujours été. Mais qu’était donc devenu le banal prédateur aux rudes pratiques machistes ? (à suivre) 



crédit photos 1, 2 & 3 amandiers d’Eygalières en Provence. Merci Annette http://mamoue13.blogspot.com/search/label/ALPILLES  

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